Je suis plutôt d'accord mais je me considère déjà comme féministe. Je trouve que cet article propose des idées similaires mais avec des références et peut-être un peu moins d'agressivité :
http://www.egalitariste.net/2013/02...ches-les-plus-courants-au-sujet-du-feminisme/
Comme vous le voyez, le site s'appelle égalitariste.net, il semblerait donc que pour ces gens là il n'y ait pas d'opposition entre féminisme et égalitarisme.
Je me suis engueulée hier sur youtube (je sais, le truc inutile) avec un mec qui critiquait le féminisme à 100% et qui se revendiquait égalitariste. Je lui ai demandé ce que ça voulait dire pour lui : et bien rien, ce n'est pas un mouvement juste une façon d'être "la meilleure personne que l'on puisse être" et ça demande de "traiter tout le monde de la même manière" (en gros, et j'ai fini par le comprendre, de ne pas considérer les rapports sociaux existants au préalable, pour lui le privilège n'existait pas).
Il a bien sûr fini par m'insulter personnellement alors que j'essayais de lui répondre avec des documents et des faits (parce que d'après lui aucune féministe ne discute de choses concrètes). Sa réponse à mes articles : je n'y crois pas car les auteures sont des féministes (c'était des femmes, rien ne disait si elles étaient féministes ou non), qu'elles interprètent les intentions des hommes et qu'elles sont sexistes, et puis "les statistiques ne veulent rien dire pour moi, ça réduit l'individu à un nombre". En gros ils venaient de dire que les femmes n'avaient pas de légitimité scientifique et que la réalité d'un groupe devait se taire face à sa conception du monde individualiste. Si tous les gens qui se prétendent égalitaristes sont juste des défenseurs du statu quo et des abstinents (d'ailleurs abstentionnisme est un mot en -isme) qui ne font que critiquer les autres mouvements (donc qui se place du côté des plus forts), alors non merci, je vais conserver les grilles de lecture du féminisme intersectionnel parce qu'au moins il me fait réfléchir et m'améliorer en tant que personne.
Au lycée je me considérais plus comme un individu que comme une femme, je ne voyais pas en quoi mon genre affectait mon comportement, puis je me suis lancée dans des études de socio et je suis montée à Paris (j'étais dans un petit village avant). J'ai compris ce qu'étais le harcèlement, le fait d'être réduite dans le regard de l'autre à mon corps de femme que maintenant je désire reconquérir, et puis je me suis rendu compte que certains de mes comportements que je pensais m'être propres étaient partagés par un grand nombre de filles (l'auto-censure, le manque de confiance en soi etc).
Se penser individuellement c'est un luxe (parce qu'on ne se sent pas réduit à une caractéristique) mais aussi un moyen d'oppression, parce qu'en se pensant unique on ferme les yeux sur des réalités collectives et on décide de s'approprier entièrement sa réussite (oui vous avez bossé comme des folles mais oui aussi le féminisme a fait en sorte que vous ayez la possibilité de ne pas avoir un môme à 25 ans), ou au contraire, et c'est plus grave, de culpabiliser seul sur sa défaite. Dans le monde professionnel c'est ce qui s'est passé à partir des années 70, on a dégommé les syndicats et on a individualisé les travailleurs (primes perso au lieu d'augmentation générale des salaires par exemple) à leur propre demande. Résultat les salariés n'ont plus la possibilité de faire des revendications collectives alors même que le rythme de travail s'est accéléré, et on les fait culpabiliser pour leurs échecs d'où les forts taux de dépression et burn-out. Pour le travail des femmes c'est pire, les nanas étaient tellement hostiles et en compétition entre-elles qu'elles se faisaient marcher dessus sans monter de collectifs de lutte. Je vous renvoie à l'article de la sociologue Danièle Kergoat qui explique comment l'identité des travailleuses s'est construite en opposition avec les autres femmes et non pas comme un groupe uni :
http://iref.uqam.ca/upload/files/publications/textes_en_ligne/Kergoat_2001_syllogisme.pdf
C'est pour ces raisons, entre-autres que je me méfie de l'individualisme, et que j'ai choisi le féminisme.