Diglee, les harceleurs et les passagères du métro

[Nagoya]

Y a deux jours, j'étais seule au bord de la mer en train de me balader tranquillement. Et là, deux jeunes hommes (type wesh) me voient et un me lance "hé bah c'est pas joli joli ça !" et l'autre de répondre "oué ça va pas faire miss france"...
J'aurai pu répondre, j'aurai peut être dû ... Ce n'est pas le fait de ne pas être à leur goût qui m'a déstabilisée c'est le "ça" le "ça" m'a fait l'effet d'un poignard.
Bon sang est-ce que c'est comme ça que certains hommes nous considèrent ? Comme des objets ? Franchement je me suis dis que c'était un triste jour pour l'humanité.

 

[machmalow]

Merci Diglee de nous avoir fait partagé tout ça !

Moi aussi, j'en ai marre de me taire face au harcèlement de rue.

Ca faisait longtemps qu'on était pas venu m'emmerder (sûrement dû à mon mètre quatre-vingt, merci les gènes de géant) mais j'y ai eu le droit Samedi dernier.
Assise toute seule sur les marches d'une place depuis à peine 5 min, un mec (accompagné de son pote, c'est tellement mieux à deux) m'interpelle puis vient s'asseoir à côté de moi, d'ailleurs beaucoup trop près. Accusez moi de racisme et de tout ce que vous voudrez, TOUTES les fois où on est venu me faire chier, et celle-là inclue, LE crocodile en question était d'origine maghrébine ...
Sauf que moi, c'est pas compliqué, j'aime pas qu'on vienne me faire chier. Le mec parlait à toute vitesse, pas moyen d'en placer une, "jt'offre une cigarette", "t'as pas un briquet", "je sais que ton copain va arriver", "ça me rend triste de te voir toute seule là" ...
Et puis au bout d'un moment, je lui ai lâché le plus naturellement du monde : "Mais ... je m'en fous." Le mec s'est arrêté de parlé, surpris. J'me suis dit que c'était risqué de dire ça (alors qu'en temps normal, y a AUCUNE RAISON d'avoir peur !).
L'abruti continue : "De quoi ?",
"Ben, j'm'en fous de ce que tu me dis là, que tu viennes me voir, tout ça, tout ça. J'men fous."
"Ouaaiiis mais genre tu crois que jviens te draguer, mais des meufs j'en ai à la pelle, je les jarte comme des peluches sur mofneanieancdkcjn ..." dit-il en s'en allant.

C'était pas grand chose, mais c'était un début, de refuser de se taire. Après, c'est sûr, j'aurai pu parler plus fort, avec plus de conviction, en le regardant droit dans les yeux. Mais je suis quand même fière de moi pour avoir osé ne pas m'écraser.

 

[Seinouille]

Voilà , j'ai eu les larmes aux yeux quand la mamie apparaît, quand tu pleurais aussi.

Témoignage de bravoure trop émouvant!

Merci à tous ceux et celles qui témoignent et donne des armes pour répondre... la prochaine fois.

 

[Maelluuu]

Bravo Diglee pour cet article ! mais aussi pour ton courage.

Quand je travaillais à Paris, il m'est arrivé de mettre des jupes robes ou autre, comme c'est très regardé je met des collants assez sombres pour avoir la paix. Mais bon on reste quand même " des proies à abattre" j'aurais bien dit qu'on arrête de me fixer, mais quand c'est tout un quai de métro qui te regarde avec insistance c'est plus vraiment de la sécurité, on passe direct aux conclusions hâtives..

De plus étant assez pudique je met quasiment du temps que des shorts sous mes jupes afin que l'on ne met reluque pas, donc il y a des moments ou je me sent obligé de montrer que j'ai un short en dessous *en y sortant quelque chose d'une poche* et les regards insistants partent de suite.

En fait mettre quelque chose de court se résume à devoir TE justifier parce que ça chauffe des mecs..

 

[Janis Harvey]

J'ai repensé à ce texte en lisant vos témoignages et cet article. Il date de 1976,  écrit par Annie Cohen, on ne dirait pas qu'il a presque 40 ans tellement le constat qu'elle fait pourrait être le nôtre, aujourd'hui :

"Dans quel état de guerre vivons-nous pour frôler les murs baisser la tête subir à longueur de vie la peur de rentrer de sortir de marcher de flâner?
Dans quel état de guerre vivons-nous pour nous barricader à tout âge derrière trois verrous et un judas?
Dans quel état de guerre vivons-nous pour voir derrière tout homme un violeur en puissance?
La guerre existe et nous ne l'avons pas déclarée.
A nous maintenant de nous défendre et d'y répondre."

 

[ZimZamZoum]

Tout d'abord, bravo Diglee de ne rien avoir lâché, et de nous en avoir parlé, parce que parfois, on ose pas trop se confronter aux agresseurs, et cela me semble pourtant essentiel...

Cet article a un écho particulier puisque aujourd'hui, je suis allée porter plainte... pour agression sexuelle.

J'allais au travail. Tailleur, chemise, talons, car présentation devant ma boss. Et là, je me sens qu'il me suit. Mon cœur bondit. 100m plus loin, il m’attrape le bras, me retourne: "eh dis mam'zelle, t'aurais pas une cigarette ?" .
Je lui réponds par la négative, et lui demande d'arrêter de me toucher.
Il me reprends le bras et je crie : "laissez moi tranquille, arrêtez de me toucher s'il vous plait".

Et là, je vous le donne dans le mille: "mam'zelle, vous êtes charmante..." et le voilà qu'il fout une main sous ma jupe, pour coller la main au panier.

Je hurle: "Nan mais ça ne va pas, non? Laissez moi tranquille, ne me touchez pas !"

Personne n'a réagi, dans la rue, et dieu sait qu'il y avait du passage (y compris une équipe de tournage, avec la scarlett et tout le toutim).

Je suis arrivée blanche comme un cul au boulot, fait la bise à tout le monde. Quand j'ai demandé à un gars du bureau de m'accompagner fumer une cigarette, parce que je ne voulais pas descendre toute seule, il m'a dit:
"porte plainte. Tu as été agressée sexuellement, c'est pas anodin."

CE N'EST PAS ANODIN.
je n'aurais jamais osé porter plainte s'il ne m'avait pas accompagnée au commissariat.

Ce qui m'est arrivé est tristement banal. Mais juste pour info: l'agression sexuelle est passible de 5 à 7 ans de prison, est un délit, et est passible de la correctionnelle.

Donc restons fermes, les filles. Parce que même si j'ai perdu aujourd'hui ma foi en l'humanité, je ne laisserai pas cette personne me pourrir le vie (l'agresseur est manifestement un SDF connu du quartier selon les services de police).

Courage les filles !

 

[Aesma]

Ton témoignage nous donne de l'espoir, merci.

Sur le thème du harcèlement de rue, il y a cette vidéo aussi qui a peut être déjà tournée sur le forum je ne sais pas mais je m'y suis vraiment reconnue.

 

[LovelyLexy]

Diglee mon idole

J'ai déjà évoqué mes plus récents épisodes de harcèlement de rue, et les posts de ce forum m'en rappellent un autre qui m'a faite réfléchir. C'était dans le car, de retour du boulot; un mec s'assied à côté de moi ( alors qu'il y a personne dans le car, tiens donc). Je mets mon sac, mon sac de cours sur mes genoux. Il me semble vite qu'il tripote ma cuisse, mais je mets sur ça sur le fait qu'on est serrés, je me concentre sur ma Kindle. Il se met alors à me parler, déclare "Tu es amoureuse de ton ordinateur". Je réponds que c'est une liseuse d'un ton qui indique que je ne veux pas parler plus, mais il continue. Me parle du temps, du fait qu'il n'aime pas le froid, commente le fait que je lis en anglais, que c'est bizarre, que l'anglais c'est difficile, me demande si je parle arabe. On arrive à Grange Blanche, il descend, je respire; mais il se retourne et me demande pourquoi je descends pas. Heureusement le car repart. Donc cet homme, en plus de m'avoir peut être ( sûrement) tripotée m'a imposé une conversation que je lui ai indiqué ne pas vouloir et m'a considérée comme gagnée et devant le suivre. Pas un humain, un poisson à ferrer.
Oh, et j'ai eu aussi un mec qui m'a suivie de Part Dieu à chez moi ( plusieurs arrêts d bus après), et quand je dis chez moi c'est devant mon palier ( il a attrapé ma porte façon habitant de l'immeuble) et m'a fait un argumentaire comme quoi il était un mec bien ( et pas un stalker) :sick2:

 

[Freehug]

C'est super "culturel" aussi ça. Quand je parle de harcèlement de rue à des amis étrangers (russes, anglais), ils sont toujours super choqués d'entendre ce qu'on peut nous sortir, et les filles sont toujours surprises du comportement de certains mecs français. Genre pour nous c'est le quotidien, pour eux c'est incroyable!

 

[MiaAttacks]

DIGLEE 

Elle avait posté il y a quelques jours son histoire dans le métro, ça m'avait complètement chamboulé. Avec tous les articles qui parlent du harcèlement de rue, ça a commencé sérieusement à me faire réfléchir.

Comme beaucoup je me suis dit "Je n'ai jamais vécu ça". Ce qui est totalement faux et j'ai ouvert les yeux il y a peu de temps. Explication : Je traverse tous les jours un énorme carrefour pour aller au boulot et souvent je me fais siffler (que je sois en jeans ou en jupe). Il y a deux jours un homme à crié par la fenêtre "Eh mademoiselle,eh t'es bonne, tu veux pas monter ?" en se rapprochant au ralentit vers moi. Et là, j'ai vraiment compris que je vivais le harcèlement assez souvent, sauf que j'ignore, j'intériorise tout, comme si c'était normal, j'en oublie ces situations humiliantes. Ce jour là, je me suis énervée, j'ai répondu et j'ai insulté ces deux mecs qui me dégoute. Je me suis bien évidemment fait insulté d'abord "Salope, pute..."

Tout ça pour dire que désormais je ne me laisserai plus faire ! (bon tout dépendra bien évidemment de la situation, si je suis en danger ou pas).

Il est temps de faire évoluer les choses !

 

[Lafastod]

Bien joué Diglee.
Vraiment.
Et bien joué à toutes les filles qui ont déjà osé s'interposer.

Y'a de plus en plus de commentaires sur le sujet, et d'un côté je me dis "c'est cool, les gens en parlent, le tabou se lève". Mais d'un autre, je me dis que merde, on est tellement, tellement, tellement, que c'est partout, que c'est épuisant et que je sais pas si un jour on pourra éradiquer ça.

Perso, je n'ose jamais répondre. Sauf si les garçons en question ont dans les 12 ou 13 ans. Sinon, je suis flippée au possible, et je ne dis rien. Et dans ces cas là, on se sent tellement lâche, que le fait de s'en vouloir s'ajoute aux remarques qu'on vient déjà de se bouffer, et on en sort pas.

 

[Edolie]

A tous ceux qui rejette la faute sur les jupes trop courtes, les décolletés trop profonds, les jeans trop serrés, mais surtout pour toutes celles qui ont regretté d'avoir porté des vêtements qui "révélaient trop leurs formes" après s'être fait embêter dans la rue, j'aimerais (re)dire ceci : on porte ce qu'on veut, et ce n'est JAMAIS une invitation.
J'habite à Dublin depuis presque 2 ans, et ici, le harcèlement de rue, ça n'existe pas. Du moins, ça ne m'est personnellement jamais arrivé alors qu'à chaque fois que je rentre en France, chaque fois que je pars faire un tour dans ma ville natale, j'ai le droit à un petit commentaire plus ou moins discret, plus ou moins agressif, plus ou moins salace.
Bien sûr, il y a mecs un peu relous partout, et si on a déjà commencé à me parler sur le trottoir en sortant de boite, ça n'a jamais été avec l'insistance et la lourdeur qu'on trouve en France. D'ailleurs, la seule et unique fois où un mec m'a arrêté dans la rue pour me dire "Ah non, mais j'aimerais bien apprendre à te connaitre, t'es charmante, et puis t'as pas l'air coincé, je peux avoir ton numéro ?" alors que je rentrais chez moi après une longue journée de cours, il était français !
Pourtant, la mode à l'anglaise ou à l'irlandaise, c'est beaucoup de shorts ou de robes très (trèèès) courts, de crop-tops, de brassières apparentes, de talons vertigineux, de décolletés, de dos-nu... Mais on ne se fait pas embêter. Les mecs connaissent le respect, ils comprennent qu'ils peuvent nous parler mais qu'on n'a pas toujours envie d'être importunées, et ils acceptent.
Je ne comprends pas pourquoi cela change d'un pays à un autre. Ce n'est pas une question de culture. Depuis quand le Français est-il emmerdeur des rues ?! Ce n'est pas non plus une question de QI, ou de filles qui paraissent plus disponibles... Ce que je sais en revanche, c'est que ce n'est PAS une question de VÊTEMENTS.
Alors les filles, n'ayez pas peur de porter ce qui vous plait. Si les cons veulent agir comme des cons, il le feront, que vous soyez en jupe ou en gros jogging bien moche. Ne les laissez pas avoir ce pouvoir là sur vous.