@Poule.Heureuse Etant donné que le roman a été prépublié dans une revue fasciste pro-Pétain puis repris par les éditions Denoël à la réputation sulfureuse après-guerre (largement collaborationnistes, n'hésitait pas à publier des ouvrages d'extrême-droite à côté d'autres ouvrages hétéroclites, son fondateur Denoël était un grand fan de Céline, etc.), je doute que les scènes montrant des héros pratiquant un autodafé dans l'allégresse, prônant le retour à la terre comme le faisait Pétain ou assignant les femmes à un rôle de pondeuse soient réellement une critique des régimes totalitaires et des dictatures. Après, je veux bien concéder que Barjavel ait pu être simplement "ambigu", dans le sens où peut-être qu'il était juste pessimiste, influencé par les tendances de son époque et séduit par certains concepts traditionnels sans pour autant être pro-fasciste, mais je ne pense vraiment pas que c'est censé dénoncer ce qui arrive aux héros à la fin ou présenter le héros comme un anti-héros!
Après, c'est sûr que les romans appartiennent aux lecteurs donc si tu le comprends totalement différemment, c'est une analyse tout à fait juste
Mais je pense quand même compte tenu du contexte de publication et de rédaction et des débats qu'il peut y avoir autour de la pensée de Barjavel (accusé d'avoir collaboré avec les Nazis après la guerre avant que ces accusations soient levées grâce à ses relations), ce n'est pas un livre qu'on devrait faire lire à des adolescents sans leur proposer une analyse critique des possibles idéologies qu'il contient car il y a trop d'éléments suspects pour être vraiment certains qu'il n'y a pas un peu de propagande dedans. Moi en 3e, on n'a absolument pas parlé du fascisme et du pétainisme en me faisant lire ce livre. Personnellement, je l'ai totalement compris à l'inverse de toi, non pas comme une dénonciation mais comme une célébration. Et j'imagine qu'aujourd'hui encore vu la popularité des idées fascistes et misogynes, certains verront la fin comme un idéal tandis que d'autres le percevront comme une horreur absolue, et ça influencera leur lecture. Franchement, tu fais lire ce bouquin à un fan de Zemmour, je suis pas sûr qu'il y voit une dénonciation de la condition des femmes et de la destruction de la démocratie!
Et sinon, dans les récits d'apocalypse, les héros sont rarement des Harry Potter ou des Luke Skywalker, ce sont des survivants quelconques dont on raconte le parcours de survie, donc c'est littéralement les gens au loin dans les champs
Quand ils deviennent chefs, c'est souvent chefs de leur petite communauté, pas du monde entier! Du coup, ce qu'on raconte dans ces fictions, ça pourrait aussi bien s'appliquer à nous qu'à Barack Obama.
@Valentina- C'est assez intéressant de lire ce que tu dis sur la place des hommes et des femmes en période d'apocalypse car personnellement, je ne suis pas sûre que dans une vraie apocalypse définitive comme dans Ravage, ce serait l'ordre naturel que de se retrouver avec les femmes au foyer et les hommes aux tâches difficiles.
J'avais trouvé que c'était une trajectoire justement très intéressante autour des rôles genrés dans la série
The Walking Dead. La saison 2 m'avait choquée à l'époque car elle paraissait hyper sexiste. Il y a littéralement des scènes où les femmes se disent ravies d'être affectées aux tâches ménagères et aux soins des enfants pendant que les hommes les protègent, et elles interviennent pour disputer une autre femme qui aspire à jouer un rôle plus guerrier (Andrea). Le personnage d'Andrea est assez décrédibilisé et malmené, justement parce qu'elle cherche beaucoup trop à se détacher son rôle féminin. Il y a aussi les hommes qui partent du principe que les leaders seront forcément à choisir entre les mâles alphas ou le vieux gars qui commande à sa famille tel un patriarche avec un conseil exécutif qui inclut zéro femme.
Puis en fait, plus le temps passe et plus ce schéma vole en éclats car il s'avère qu'il n'est en réalité pas du tout efficace ou pertinent dans un monde dans tous les codes et les barrières sont bouleversées. Les femmes qui sont cantonnées à un rôle féminin sont mises en danger et les hommes prennent des mauvaises décisions en pensant pouvoir décider arbitrairement pour tout le monde parce qu'ils ont plus de force physique, tout en ayant un effet désastreux sur leur santé mentale. Le personnage d'Andrea ne se remet pas vraiment de sa perte de crédibilité mais les femmes trop "ménagères" sont aussi contraintes d'évoluer pour se réinventer ou meurent rapidement après la saison 2. Plusieurs saisons après, l'égalité des genres est totale dans le groupe des héros et les sociétés où elles sont un peu malmenées sont des sociétés bancales.
J'avais trouvé cette évolution très intéressante et finalement possiblement réaliste. Dans un premier temps, face à une crise majeure, les protagonistes se replient sur des schémas conservateurs dans un réflexe protectionniste. Mais en réalité, ces schémas conservateurs ne sont pas des schémas "naturels", ce sont des schémas sociaux. Donc s'ils peuvent fonctionner dans une société établies autour d'un certains nombres de structures, de lois et d'institutions, ils ne fonctionnent pas du tout pareil dans un monde totalement bouleversé, et peuvent même devenir dangereux. Au final, les protagonistes réalisent progressivement que la division des tâches par genre est totalement inefficace puisqu'elle prive le groupe de personnes compétentes à certains postes en les assignant à un poste qui ne leur convient pas et qu'il vaut donc mieux attribuer les rôles en fonction des prédispositions et des intérêts manifestés par chaque individu. De même, le leadership ne peut pas être confié aux mêmes personnes que dans l'ancien monde juste parce que les préjugés font penser que c'est mieux comme ça car sans le soutien de la société patriarcale mais tout en continuant à s'y référer, ils prennent des décisions qui peuvent avoir des impacts catastrophiques sur le groupe.
Bref, personnellement, je pense donc que si dans un premier temps, on serait effectivement potentiellement assignées à des rôles traditionnellement féminins, ceux-ci s'avéreraient rapidement peu viables et voleraient certainement en éclat pour une rédéfinition des rapports sociau
e genre.