Au départ, le diagnostic HPI a été une libération. Maintenant, je me rends compte que ça me perturbe aussi beaucoup, à plusieurs niveaux.
Ça fait revenir beaucoup de souvenirs, tous plus durs les uns que les autres. Tous ces moments où on m'a exclue, où on m'a dit que j'étais bizarre, où les profs m'ont affichée en disant "toi t'es une énigme, tu comprends rien aux trucs simples, et les trucs complexes, tu y arrives mieux que tout le monde, je te comprends pas"... J'ai mis des années à comprendre la règle de trois. Et pourtant, la chimie organique coulait de source.
En fait, c'était pas ma faute. C'est pas ma faute si je fonctionne pas comme tout le monde. Si je ne résous pas les problèmes de maths comme on me le demande, c'est que je ne comprends pas de cette façon, et j'y arrive très bien à ma façon. Mais non. Il faut faire comme le prof demande. Même si on trouve le bon résultat au final. "Tu n'arriveras jamais à rien en suivant ce raisonnement, tu n'as aucune logique, c'est pas comme ça qu'on fait"...
"Je comprends pas comment tu fonctionnes. Tu n'arriveras à rien comme ça.".
Mais je comprends pas avec la façon "pour tout le monde". SI j'y arrivais avec ma façon à moi, qu'est-ce que ça pouvait leur faire, du moment que le résultat final était bon ? Si on est deux à aller au même endroit, que l'un prend l'autoroute et l'autre les nationales, l'important c'est d'arriver au même endroit, non ?
J'ai tellement d'émotions qui sont brassées. Je pleure beaucoup en repensant à tout ça. C'est comme si je réalisais quelque chose que j'avais toujours su. D'ailleurs, mes proches le savaient. Moi je me disais que j'avais une pathologie psychiatrique, que j'étais sûrement aussi nulle et débile que les autres le disaient.
Et là, on me parle d'intelligences multiples, on me parle de haut potentiel, on me dit que finalement, ma façon de penser n'est pas celle de tout le monde mais que c'est OK, c'est pas grave, et si je m'en sors comme ça c'est très bien... Et je comprends d'où vient ma colère, mes souffrances... Je comprends pourquoi depuis que j'ai terminé mes études scientifiques, je suis revenue à mes fondamentaux : l'écriture, la peinture, le dessin... Pourquoi depuis quelques temps, je me rapproche de gens qui parlent la même langue que moi, Alexandre Astier en première place. Je comprends que toute cette cascade d'idées, une pensée en entraînant 25 autres, s'appelle "Pensée en arborescence", que j'ai toujours fonctionné comme ça, et que les gens découvrent ça aujourd'hui, alors que ça a toujours été ma réalité... Les autres n'ont jamais comment je fonctionnais, mais maintenant je sais que je n'ai pas un problème. Je suis juste un zèbre, qui se rapproche d'autres zèbres, qui réalise que son propre père est sûrement un zèbre lui aussi... Je me sens complètement chamboulée. C'est tout nouveau pour moi, et en même temps, je l'ai toujours su. Comme m'a dit un très bon ami "Maintenant, tu dois vraiment te révéler en tant que zèbre, et tu dois exploiter tes potentiels. Ça prend du temps, c'est difficile, mais tu vas y arriver".