Ca me perturbe un peu tout ça. Je dois être vraiment excessivement neutre, j'en sais rien... Mais si je regarde une oeuvre de fiction, je vais rarement aller chercher la "qualité féministe" dedans, et encore moins critiquer cette oeuvre parce qu'elle est machiste. Pour moi ça reste de la fiction. Alors, OUI je sais bien que les oeuvres de fiction sont les premières à véhiculer des messages sexistes qui s'ancrent profondément dans la psyché collective, mais ça me semble surréaliste de pousser les auteurs à aller dans le sens du féminisme s'ils ne le veulent pas.
Je garde en tête que les créateurs sont des créateurs, ils veulent faire passer un message, une idée, une histoire, et c'est la leur. Ca me fait penser à l'idée du token qui s'est infiltrée dans les séries et les films dans les années 80/90, et qui perdure toujours. L'idée étant qu'il faut un "quota" de personnages non caucasiens. Ca part d'une bonne intention, mais ça a donné lieu à des festivals de clichés parce que les auteurs étaient "obligés" de mettre un personnage non-caucasien, qui, en général, n'aidait en rien parce que l'auteur n'en avait rien à foutre et avait casé un stéréotype (un asiat' geek, une mama black, un jeune latino dans un gang...). Demander aux auteurs de "faire des efforts" résulte souvent en catastrophes. Ils sont libres de véhiculer les idées qu'ils souhaitent, et les oeuvres seront beaucoup plus réussies comme ça, même si elles ne plaisent pas aux féministes. Quand je vois les femmes être traitées comme des putains dans Mad Men, je ne vais pas crier au scandale, c'est l'univers qui est comme ça. Si ça ne me plaît pas j'arrête de regarder, ça plaira à d'autres. Si un autre auteur a créé un univers fictif où il y a une majorité de caucasiens, soit, tant pis, c'est comme ça. Je ne juge pas une oeuvre sur son équilibre de genre ou de nationalités, ou sur la place qu'il y est faite à la femme. Les idées mises en scène peuvent traiter d'autre chose, ils ont le droit aussi de ne pas avoir envie de parler de féminisme. Je ne me réserve pas le droit de vouloir changer des oeuvres de fiction parce qu'on y voit une scène de maltraitance animale ou une scène où un type jette une bagnole dans l'océan (message : polluer c'est bien, regardez comme c'est cool). Chacun a le droit d'utiliser les procédés qu'il souhaite pour servir son discours, peu importe le discours, c'est une liberté que je ne veux surtout pas remettre en cause.
J'apprécie le fait que des oeuvres qui ne suivent pas mes idées existent, parce qu'elles me permettent de découvrir comment d'autres personnes pensent, et d'approfondir mes connaissances sur un débat ou un sujet. Je serais bien triste que toutes les oeuvres soient lissées, causent toutes de féminisme, d'écologie ou de la préservation du bien-être animal. Ce sont des causes qui me touchent particulièrement, mais je respecte le droit d'autrui à penser autrement et créer des oeuvres qui véhiculent leurs idées. Alors oui, il y a une majorité qui donne une mauvaise image de la femme, ou la sous-représente, mais il existe beaucoup d'autres films, livres, séries, jeux vidéos et autres qui méritent beaucoup plus notre attention, et quand je tombe sur quelqu'un qui ne pense pas comme moi, je vais lui faire la promotion de ces oeuvres-là plutôt que de lui dire "ah mais tu regardes ça ? c'est trop sexiste !". J'aimerais vraiment que ce qu'on voit du féminisme dans les médias et les créations arrête de véhiculer un désir de changer les productions pour les rendre plus féministes. Pourquoi on ne garderait pas cette énergie pour mettre en avant ce qui existe déjà et qui correspond davantage à nos idées ? Pourquoi on ne passe pas notre temps à chercher des initiatives féministes, des films, des webséries, des jeux qui mettent en avant la femme en tant qu'être humain et pas comme porte-nichons, pour en faire la promotion ?
Ca me fait de la peine de parfois être la seule à penser comme ça, j'ai l'impression que beaucoup considèrent la critique comme plus efficace que la création. A mon sens, les oeuvres "positives" pour la femme méritent beaucoup plus d'attention que les oeuvres négatives, et on perd beaucoup trop de temps à taper sur ce qui ne nous plaît pas (et qui ne changera pas pour autant).