Je suis complètement d'accord avec
@AprilMayJune et je pense que c'est très important de l'entendre parce que ça explique vraiment fort bien pourquoi je ressens une bouffée de haine et de violence quand je lis, au hasard, ça :
Bonjour, je n'ose pas lire les autres commentaires mais je tiens à dire aux policiers (et à tous ceux qui veillent sur notre sécurité : pompiers, militaires etc) qui passeraient par là que je les remercie pour ce qu'ils font. Merci d'être là, et d'avoir le courage de faire votre métier.
Parce que justement, les policiers ne veillent pas à la sécurité de tout le monde. Là où je vis, ils veillent surtout à l'insécurité de mes amis, les mêmes qui s'étrangleraient de lire qu'on remercie la police pour son oeuvre.
Alors pour faire contrepoint je vais raconter comment moi je perçois la police. Là où j'habite leur principale activité est de tourner en rond au ralenti à quatre dans une voiture pour trouver des jeunes qui pourraient avoir un peu de shit sur eux. Après ils descendent, ils jettent ou prennent tout, ils distribuent des amandes, ils envoient parfois au poste. La plupart du temps du temps ils parlent mal et ils nous tutoient. Moi je suis blanc ça ne m'arrive pas, mais les insultes racistes ne sont pas rares (et ironie de l'histoire, y'a des personnes racisées dans la polices, elles même victimes de racisme, qui assistent ou même perpetuent ça).
Quand un jeune en à plein les fesses qu'on l'interpelle pour rien et qu'on lui parle mal, et aussi parce que c'est sa manière de parler, il insulte en retour. Vous avez déjà surement entendu parlé du délit d'outrage, et ben typiquement c'est le truc parfait pour tartiner les banlieues et alourdir les peines quoi qu'il se soit passé à la base.
C'est simple, une fois au tribunal, c'est la parole des flics contre celle des prévenus. Vous vous doutez bien qu'entre Mohammed, 22 ans, petite main notoire d'un trafic de cannabis, et un flic, ben c'est la parole du flic qui sera écoutée en premier. On insulte pas un flic. Mais un flic peut facilement insulter, menacer les petits frères, voir frapper (bah oui, faut pas se défendre, sinon en plus de l'outrage tu gagnes ton point rebellion).
D'ailleurs, c'est tellement pratique d'alourdir le procès verbal avec des outrages et rebellions que ça s'est totalement généralisé. En manifestation aujourd'hui, quand on t'arrête et qu'on a rien a te reprocher, la petite astuce c'est "outrage et rebellion" même quand tu dis rien, même quand tu te débats pas. C'est d'autant plus pratique qui si tu tates du tonfa, les flics pourront toujours dire que t'étais menaçant, et là tous les gens de bien pourront dire la bouche en coeur que "oui les violences policieres mais faut voir ce qu'ils prennent hein, parfois c'est mérité"
Dans ce que tout le monde se plait à appeler les "quartiers difficiles" y'a des familles en deuil. Vous avez surement entendu parler de la famille d'Adama Traore. Y'a des jeunes qui vont au poste et qui n'en reviennent jamais. Chaque cité en connait et en garde la mémoire. C'est pour ça que dans toutes les manifs de gauche, quand ça dure un peu longtemps, quand ça commence de nouveau à parler violence policière, y'a un moment où ça finit par répéter comme un mantrat "MALIK, ZYED, BOUNA ON OUBLIE PAS"
Iels sont tous là :
http://www.urgence-notre-police-assassine.fr/123663553
Là où les chaines d'infos se plaisent à parler de bavures, dans nos cités c'est un traumatisme et une menace. Y'a pas un gamin qui se demande pas si il sera le prochain, ou une de ses connaissances.
C'est d'autant plus vrai que la vérité et la justice est difficilement obtenue. C'est la police alors forcément, c'était de la légitime défense, l'interpellé était dangereux ou que sais-je.
Là où j'habite, jamais les flics sont polis. Jamais ils se promenent sans armes, jamais ils disent bonjour, jamais ils viennent discuter. Ils viennent pour distribuer des problemes. C'est pour ça qu'ils sont aussi mal reçus. Le commissariat, il sert à rien. Si tu veux porter plainte, déclarer un vol ou que sais je, ils sont pas là les keuf. Depuis l'état d'urgence et meme avant tu dois attendre à la porte et c'est eux qui décident si ta raison est valable ou pas et si t'as le droit d'entrer. Du coup, au bon vouloir des flics, parfois y'a eu un viol et tu restes à la porte.
Pareil quand tu les appelles. Une bagarre, une agression, un viol, des violences conjugales ? Pfffffffffff tu peux toujours rêver. Un dealer qui est là tous les foutus jour de l'année ? Ils rappliquent direct.
Idem pour les caméras. Il peut tout se passer sous les caméras, ce qui les fera le plus déplacer c'est TOUJOURS un joint.
Maintenant je vais parler manifestation. J'ai déjà été au milieu du blackblock à plusieurs reprises mais je suis pas là pour me battre. On m'a jamais vu ramasser un caillou. En général je porte des couleurs bien flashy, facilement identifiable pour qu'on puisse pas me reprocher d'avoir tenté de me dissimuler. Et j'en ai vu des horreurs.
Déjà faut ramener un peu de réalité dans les scènes de "guerilla urbaine" qu'on nous montre. Y'a beaucoup de casse matérielle c'est tout à fait vrai, mais pas de cibles humaines. Les techniques de maintient de l'ordre sont faites pour faire monter la pression. Ceux qui ont déjà été dans une nasse voient de quoi je parle : y'a des crs des deux côté, ils avancent des deux coté, tu te retrouves de plus en plus serré contre les copains, parfois la tête collée à un bouclier, et si tu refuses de reculer (de marcher sur quelqu'un) tu te fais gaze ou frapper. Alors que c'est censé être fait pour la dispersion. Et que là tu peux pas bouger.
Quand tu crains pour ta vie tu réfléchis plus, tu ramasses ce que tu trouves et tu balances sur tes agresseurs.
La violence des manifestants se construit : plus il y a de répression policière plus il y a de violences chez les manifestants. La police le sait, l'état le sait. D'ailleurs, certains syndicats de police le dénoncent et rendent l'état responsable des ordres donnés qui sont dangereux pour tout le monde.
David Dusfresnes est un journaliste qui s'est fait particulierement connaitre cette année pour avoir ressensé les "bavures" policières. /!\ Attention beaucoup d'images très dures
https://twitter.com/davduf?lang=fr
Au passage ça a déjà été fait mais c'est interessant de rappeler que concernant les manifestations, y'a plein d'instances qui ont interpellé la France quant à ses techniques de maintient de l'ordre : ligue des droits de l'homme, ONU, Amnesty International à plusieurs reprises... Il ne me semble pas que ces instances aient pointé du doigt les gilets jaunes, qui ne se rendent pas coupables d'atteintes aux droits de l'homme
Pour finir, j'ai vécu à Notre Dame des Landes. Je n'y ai rien construit à part des potagers, mais j'y ai connu des gens qui avaient leur vie la bas, leur cabane. NDDL c'est pas seulement une histoire de Vinci qui veut ça tandis que quelques extremistes écolo s'y opposent, c'est aussi un endroit où les gens qui la police ne protège pas (et donc l'état) viennent se refugier. Il y a des trans, des pauvres, des sdf. Et là bas on les regarde comme des personnes. Ils ont pas à faire la manche et à baisser les yeux. Ca a été salutaire pour beaucoup de gens. C'était aussi un îlot écologique, une chance rare d'avoir quelque part en France qui n'est pas motorisé, qui est silencieux.
Je n'y étais pas quand la police est venue tout détruire, j'étais chez moi, mais j'ai pleuré en entendant les noms des lieues qui ont été abattus. La boite noire. La chèvrerie. La cour des miracles et des dizaines d'autres. On a dormi là bas, on a mangé là bas, on s'est aimé là bas, des amis vivaient encore là bas.
Aux yeux de l'état et aux yeux des flics c'était même pas des maisons, la question du logement ne se posait pas. On a détruit ça comme quand à Paris on harcèle les réfugiés en détruisant leurs campements, jour après jour, comme si ça représentait rien pour des gens qui n'ont rien d'autres.
Qui est-ce que la police protège à ce moment là ? Leurs grenades ont aussi tué des dizaines d'oiseaux, de hérissons, de rongeurs qui vivaient là aussi. Des chevres et des poules qui n'ont pas pu être évacuées. Ils ont empoisonné la terre et l'ont piétinée alors qu'elle était justement en train de revivre. Les dégats sont terribles.
La police n'a rien protégé du tout, elle a tout détruit. J'ai encore la gorge nouée et les larmes qui viennent en pensant à ce qu'il s'est passé.
Je hais les flics. Y'a pas d'autres mots. Je sais pas si on a besoin d'eux, personnellement je suis plutot opposé aux peines d'enfermement (c'est au autre sujet, mais la prison a elle aussi montré son inutilité, elle a montré qu'elle était néfaste depuis longtemps), je pense que c'est quelque chose qu'on fait par facilité et je pense également que si la police a bonne presse malgré tout ce qu'elle fait c'est parce
- elle défend les puissants de ce monde et agresse les plus faibles, or la parole des plus faibles est toujours la moins entendu
- on arrive justement pas à se sortir de ces logiques de violence. Quand bien meme la justice ne raisonne pas tout à fait comme ça, dans la tête de beaucoup de gens meme si c'est pas toujours avoué, y'a un fond de "oeil pour oeil, dent pour dent", on arrive pas a se sortir de l'idée qu'il faut punir, que quand on fait quelque chose de mal on mérite qu'on nous fasse quelque chose de mal.
Ben c'est pas mon avis.
Et comme ça a déjà été dit sur une autre page, perso quelqu'un qui porte une arme ça m'allume direct un warning dans la tete. J'ai la violence en horreur. Je vis à Paris et je supporte juste plus de voir des armes partout. Des flics armés, des sécu sncf armés, des militaires partout. Chaque fois que je les croise (donc tous les cent metres hein) je suis terrorisé. Je me demande qu'est-ce qui a fait qu'on a accordé la confiance à ces gens, qu'on les a jugé aptes à la responsabilité d'une arme. Et si y'en a un qui pete un cable et qui se met à tirer ? Ca me hante.
Moi j'aime bien courir et sauter partout et parfois je le fais pas parce que je sais pas. Je sais pas ce qu'ils regardent en fait, je sais pas ce qui risque d'attirer leur attention, et je me dis que dans le doute si je fais un mouvement trop brusque il pourrait y avoir confusion ou je sais pas. Ils me foutent la trouille.
Mais peut être que je suis juste parano, j'en sais rien. Mais c'est comme ça, les armes me hantent. Je crois que les flics sont plus autorisés à rentrer chez eux avec leur arme de service mais je sais qu'à un moment, parmi les fémicides conjugaux enregistrés, les meurtres commis par les policiers l'étaient avec cette fameuse arme de service.
Vraiment, vraiment, je pense qu'il devrait y avoir le moins d'armes possible en circulation. Je pense que dans un monde qui se veut pacifié la police est une violence (symbolique et réelle) insoutenable.
Donc voilà. Jamais j'ai eu affaire à la police de manière positive. Jamais jamais jamais. Je comprend pas ce corps de métier. Je comprend pas qu'on puisse mettre sa violence au service de l'état. Je comprend pas.
Je comprend d'autant plus pas que quand les flics se réveillent pour dénoncer des trucs c'est pour dire qu'ils manquent de moyen et qu'on les prend pour les cons et qu'on les paye pas assez. C'est tout à fait vrai et c'est bien qu'ils le fassent. En revanche on les entend vraiment tres rarement dénoncer le fait qu'on leur donne des ordres violents, que la hierarchie couvre les actes sexistes et racistes, que des viols et des agressions sont perpetués dans les commisseriat avec le silence de tout le monde. Jamais on entend ça.
Non, les flics se plaignent qu'on les aime pas. Ils se plaignent pas de ce qu'on les force à faire et qui fait qu'on les aime pas.
Enfin, si, y'en a. Y'a quelques flics isolés qui témoignent sur les quotas, sur l'impossibilité de bosser sur de vrais enquetes, sur les incessantes "interpellations chichon" qui servent à rien. Mais c'est tellement rare.
Je précise qu'y'a pas forcément matière à discussion. Mon témoignage n'est pas là pour invalider le témoignage de l'article, il est juste là pour donner le point de vue de quelqu'un qui est de ceux qui insultent la police, à l'occasion.