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Membre supprimé 372447
Guest
J'ai de l'empathie pour ta situation, mais elle est difficile à plein de niveaux, et pas seulement du fait du fonctionnement du système d'aides sociales.MAIS mon salaire avant l’abandon imposé de mon travail était un très bon salaire. Mes études, de très bonnes études. Mes perspectives professionnelles et financières, excellentes. Ces 650€ qui sont desormais mes seuls revenus, ils sont d’une violence terrible pour moi. C’est une indemnité qui n´en porte que le nom, elle est à des années-lumière de compenser la perte financière que ce handicap génère : le manque à gagner de toute la carrière à laquelle je n’aurais plus jamais accès, je n’ose même pas le calculer. La perte est IMMENSE (financière, mais pas que : il y a tout ce qui est lié plus ou moins directement à la vie professionnelle - l’épanouissement intellectuel, la vie sociale, la reconnaissance et l’accomplissement, etc).
Qu’on puisse considérer qu’il est injuste, au motif que mon conjoint à de bons revenus, que je touche ces 650€ en compensation des journées éprouvantes que je passe (car le handicap d’un enfant, c’est un quotidien abominable, ma vie a très très peu d’intérêt et laisse peu de place à la joie, aux relations sociales, aux loisirs et aux perspectives d’avenir) en lieu et place d’une vie professionnelle « normale », c’est à mes yeux un terrible manque d’empathie et d’humanité. Et encore une fois, je ne parle même pas des coûts cachés du handicap.
Je pense que le débat porte plutôt sur la question suivante : quel est le but des aides sociales ? Permettre aux personnes qui en ont besoin de s'en sortir ? Ou "compenser la perte financière" par rapport à l'alternative qui serait ta carrière ?
Je pense que dans le système actuel c'est la première option.
D'ailleurs, si les autorités adoptaient la seconde option, cela reviendrait à indemniser davantage les personnes les plus diplômées et ayant eu le plus haut revenu avant leur "accident de la vie" (dans ton cas enfant handicapé, mais cela pourrait s'appliquer à toutes les situations possibles de type invalidité etc). Or, en plus d'avoir potentiellement accumulé davantage d'épargne en début de carrière, les diplômes et le début de carrière sont corrélés positivement au patrimoine des parents, au revenu du conjoint, etc. Donc cela reviendrait aussi à indemniser davantage les personnes qui ont le plus de chances d'avoir du soutien familial par ailleurs (bien sûr qu'il y a des exceptions à cette corrélation générale)
Après c'est la question du modèle d'état social :
Les distinctions entre les États-providence beveridgiens et bismarckiens
Beveridgien | Bismarckien | |
---|---|---|
Objectifs de l'État-providence | Répondre gratuitement aux risques de la vie | Compenser la perte de revenu |
Conditions d'accès aux prestations | Être dans le besoin | Avoir cotisé |
Financement | Impôt pour tous | Cotisations en fonction du revenu |
Type de redistribution | Verticale [des riches aux pauvres] | Horizontale [parmi les cotisants et vers les "accidentés de la vie"] |
source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Système_bismarckien [j'ai ajouté les parties entre crochets]
En France on a un modèle hybride entre ces deux "idéaux-type" d'état social. Les compensations pour handicap suivent clairement le modèle beveridgien