@MorganeGirly
Marrant je parlais hier à une de mes collègues psychologues qui disait que ses cinq ans d'études ne lui suffisaient pas pour accompagner des personnes en thérapie. Qu'elle ne se sentirait pas éthique d'accueillir par exemple une personne dépressive si elle ne s'était pas reformée spécifiquement. Alors qu'elle a un master quand même. Voilà par exemple une piste pour réfléchir à "l'éthique". Comment est-ce que je peux accompagner au mieux une personne en souffrance ? Comment lui donner le meilleur traitement/soin/accompagnement... ? Pour moi la théorie est un pilier fondamental, et jamais je ne pourrais m'endormir sur mes deux oreilles en encaissant de l'argent sans me donner à fond sur l'aspect théorique. Et de manière solide : les meilleures études, les meilleures recherches... En conscience des limites de tout ça hein.
Après ton amie coach voilà, les gens qui vont la voir savent qu'elle est coach. C'est ce qu'il faut espérer, que les gens prennent ces rendez-vous en conscience des choses. C'est souvent bancal, parce que par exemple je vois des praticiens en médecine alternative dire qu'il ne se substituent pas à la médecine, mais en même temps donner des avis diagnostiques. L'un ne va pas avec l'autre en fait. Si tu vas jusqu'au bout du "je ne suis pas médecin/psychologue...", tu ne te prononces pas sur le terrain médical ou psychologique.
Enfin je vais aborder une longue réflexion mais qui a été importante pour moi.
Je travaille beaucoup en lien avec des psychiatres, j'ai moi-même consulté personnellement, et puis j'adore le domaine de la psychiatrie, ça me passionne. Donc j'ai côtoyé pleiiiiin de psychiatres. Il y en a que j'ai vraiment détestés, qui m'ont mal accueillie en tant que patiente, par exemple. Mais il y en a que j'admire énormément, notamment de par leur bagage théorique.
Un de mes collègues éloignés, par exemple, s'est spécialisé dans plusieurs domaines comme le TDAH, la bipolarité, ou l'anorexie. Quand il décrit un patient, il est capable d'aller si finement dans la synthèse de ses idées que c'est très percutant, vraiment aidant. Il peut recommander plein de bilans complémentaires, orienter vers des pistes intéressantes. Et si la personne était autiste ? Et si elle avait un déficit attentionnel ? Et comme il ne travaille pas tout seul, il a tout une équipe de psychologues, paramedicaux... Bref, un groupe qui fait vraiment un bon travail très fin.
L'autre exemple que je voulais donner, c'est celui de ma psychiatre, qui a été avec ma psychologue l'une des professionnelles les plus aidantes que j'ai pu rencontrer. J'ai pris rendez-vous avec elle à un moment d'énorme détresse. À notre première rencontre, elle m'a dressé une analyse complète de ce qu'elle pensait que j'avais, de manière très précise et très vulgarisée. Du style "vous n'êtes pas dépressive car vous n'avez pas tous les signes, rassurez-vous, mais je vous retrouve plutôt dans l'anxiété", "l'anxiété c'est tel, tel, tel symptômes, et je peux vous proposer tel traitement si vous le voulez", "vous avez beaucoup d'éléments de votre enfance et adolescence qui peuvent expliquer la construction de vos fragilités, comme ça, ça, et ça...". Et toutes ces explications avec une énorme prise en compte de mes craintes, mes désirs, un souci de bien m'orienter ensuite vers les bons professionnels...
En même temps que ma quête personnelle de soin, une autre amie est allée voir une praticienne obscure (dont j'ai déjà parlé ailleurs). Mon amie a aussi des signes en faveur de troubles psychologiques importants. Elle va voir des tas de gens qui lui proposent des tas de trucs qui selon moi aggravent ses troubles. Les naturopathes qui par exemple conseillent pléthore de dogmes hallucinants sur la nourriture à des gens qui ont clairement des troubles alimentaires... Ça me hérisse très fortement. Et c'est le cas de ma pote. Bref, elle me parle de son rendez-vous avec sa nouvelle praticienne, pleine de joie d'avoir trouvé des solutions. Et elle m'explique qu'avec elle elle a réfléchi aux émotions prédominantes chez elle, et qu'elle s'est rendu compte qu'elle avait très souvent peur.
Voilà.
Et je me suis dit beh ouais, en fait qu'est-ce que sa praticienne peut lui offrir de plus comme analyse ? Ma pote je pense qu'elle fait des dépressions chroniques, qu'elle a eu des phases de quasi anorexie, elle aurait bien besoin aussi de traiter son stress. On imagine ce que ma super psychiatre aurait pu lui dire ? Ou une psychologue compétente ? Et au lieu de ça, elle sait qu'elle a souvent peur de la part de quelqu'un qui ne maîtrise sûrement même pas bien le fonctionnement émotionnel humain. Yahou.
Mais de là découlent plein d'interrogations, du droit des gens à s'orienter où ils le veulent même là où c'est nul, au droit des gens de s'installer n'importe où en tant que n'importe quoi, à l'information sur la santé, à la considération de la médecine ou des psychologues ou des paramédicaux, à l'organisation du système de santé...
Parce que par exemple, ma super psychiatre, je l'ai eue par piston. Parce qu'un jour je suis allée au travail en pleine angoisse, qu'une collègue s'est beaucoup inquiétée pour moi et qu'elle m'a conseillé une maman de l'école de son fils qui est psychiatre. Mais sinon, ma psychiatre, elle ne prend plus de nouveaux patients dans son cabinet libéral. Et puis mon super collègue psychiatre, il travaille dans un service qui fonctionne en flux tendu total vu que l'effectif de personnel est explosé. Donc autant dire que pour avoir accès à lui, il faut s'y prendre bien ou être au fond du sceau... Et puis les bons professionnels, ils sont difficiles à trouver ! Il y a plein de médecins qui sont désagréables, qui font peur... Mention spéciale à la psychiatre qui a un sabre sur son bureau et qui m'a donné envie de fuir la profession pendant des années. Enfin voilà, dans cet exemple précis que j'ai pris de la santé mentale, des tas d'éléments dans le système seraient à revoir, et des idées ont déjà été données au-dessus. Et je pense que cette réorganisation serait salutaire pour tous les patients, pour qu'ils aillent vers les meilleurs soins possibles tout en prenant en compte leurs craintes éventuelles envers le système de soin conventionnel.
En fait ce qui m'énerve aussi, c'est que les personnes qui partent d'un constat intéressant sur ce qu'est le système préfèrent le fuir, jusqu'à même fuir la rationalité, plutôt que d'y rester et d'encourager les gens à y rester et à réclamer plus. Tu veux te reformer et aider les gens ? Il y a tellement de beaux métiers que plus personne ne veut faire... Et puis il y a tellement de notions passionnantes et dehors de la magie ou du complotisme ! Franchement ils sont où les gens qui aiment les domaines comme le bio, les modes de vie alternatifs, mais qui aiment aussi la science et la pensée matérialiste ? Ça reste toujours possible ou pas ? Je suis la seule restante sur Terre ? C'est sûrement du pur jugement désagréable, j'en suis désolée, mais je suis tellement déçue quand je commence à discuter avec quelqu'un de choses supers intéressantes mais que ce quelqu'un finit toujours par être anti-vaxx et me conseille un bilan ayurvédique. Je trouve que ça prend une ampleur folle, je le constate comme vous depuis le covid.