Des cours en anglais à la fac ?

[popomme]

Entièrement d'accord avec @Félix. Ce qu'on n'a pas compris en France c'est que si l'on continue à s'isoler sous prétexte d'exclusivité du français, on finira mal. Le français était la langue numéro un au XVIIe, depuis, les choses ont changé. On s'adapte ou on crève. Surtout que personne ne parle non plus de faire tous les cours en anglais. Maintenant, il est vrai aussi que cela demande de l'organisation notamment pour des raisons soulignées par @Mojave. En même temps, si cela peut amener des têtes étrangères et permettre aux chercheurs francophones de bien partager leurs résultats, c'est ce qu'il faut faire quitte à en baver dans un premier temps.

 

[Samburu]

Un enseignement unilingue dans tous les cursus dans aucun pays. Dans la plupart des pays, il a des cursus en anglais qui côtoient de façon tout à fait apaisée des cursus en VO. Même aux Pays-Bas et en Suède, les cursus sont loin d'être tous en anglais. Pas d'inquiétude à avoir à ce sujet là.

A Maastricht, tous les masters sont en anglais. Une seule exception: le droit néerlandais. Amsterdam, c'est 105 masters sur 170 en anglais.
En Suède, 9 thèses sur 10 sont rédigées en Anglais. L'objectif en Suède aujourd'hui, c'est de s'assurer que le suédois reste parlé en parallèle de l'anglais dans l'enseignement supérieur. Il est clair que le suédois est en train de s’appauvrir dans les domaines scientifiques et des sciences économiques.
Aujourd'hui, l'Hochschulrektorenconferenz allemande, l'équivalent de notre conférence des présidents d'université, est en train de revenir sur l’anglicisation des cursus, parce que le bilan n'est pas bon. Si ils ont pu attirer plus d'étudiants initialement, ni les étudiants étrangers ni les professeurs n'ont le niveau suffisant pour que cet enseignement soit de haut niveau. Et la polarisation sur l'anglais s'est faite au détriment des autres langues, de l'ouverture internationale vers d'autres aires, et de la diffusion de la culture et de la langue allemande. Même au sujet de Kant, la recherche se fait maintenant en anglais !
Ce rapport explique très bien comment l'avancée de l'usage de l'anglais comme langue unique des cursus de haut niveau s'est faite au détriment de la qualité des cours, parce que malgré leur niveau correct en anglais, les professeurs dont ce n'est pas la langue natale n'ont pas les mêmes capacités qu'un locuteur natif pour développer une pensée, interagir avec les étudiants...

Plutôt que de vouloir défendre à tout prix un enseignement en Français (quitte à nous isoler), il serait selon moi plus profitable d'imposer des cours intensifs en Français à ces étudiants étrangers.

Défendre l'usage du français ne va pas nous isoler. Je n'ai jamais dit qu'il fallait refuser les étudiants étrangers ni refuser d'utiliser l'anglais dans la recherche. Évidemment que l'anglais est aujourd'hui indispensable quand on fait de la recherche. Il faut bien sûr permettre un meilleur apprentissage de l'anglais, favoriser l'apprentissage par immersion avec des échanges, mais l'anglais doit rester la langue véhiculaire d'usage modéré pas la langue d'étude et de travail.

Lisez donc cette tribune signé par un groupe d'universitaires étrangers (USA, Brésil, Chine, Japon, Ukraine, Roumanie, Turquie):
"Ce que nos meilleurs étudiants viennent chercher en France, la raison pour laquelle nous les y envoyons, c'est justement une autre façon de penser, une autre façon de voir le monde, un modèle culturel et intellectuel alternatif aux modèles anglo-saxons dominants. Nous avons impérativement besoin de cette autre voie. Or cette différence est liée à la langue que vous parlez."


Qu'avons nous à gagner de cette réforme ? Rien puisque les étudiants étrangers préféreront toujours l'original à la copie, l'université anglo-saxonne à l'université française qui tente piteusement de la singer.
Qu'avons-nous à perdre avec cette réforme ? Tout puisque les cours dispensés en un code de quelques centaines de mots ne permettront jamais d'obtenir la même clarté et la même précision qu'un cours dispensé dans la langue maternelle de son auteur.
Proposons plutôt d'améliorer le niveau des cours dans le secondaire, d'augmenter le volume horaire des cours d'anglais dans l'enseignement supérieur - en médecine, j'ai eu une heure par semaine pendant deux ans, cette année, j'ai eu 3h sur l'année !

 

[Kirkja]

A Maastricht, tous les masters sont en anglais. Une seule exception: le droit néerlandais. Amsterdam, c'est 105 masters sur 170 en anglais.

Maastricht, c'est quand même un cas particulier, depuis la signature du traité européen, l'université a clairement voulu jouer sur le côté européen, la plupart des masters qui y sont offerts ont donc cette dimension européenne. Pour être allée sur le site de l'université, j'ai quand même trouvé quelques masters enseignés en néerlandais (en médecine, en plus du droit donc).

Proposons plutôt d'améliorer le niveau des cours dans le secondaire, d'augmenter le volume horaire des cours d'anglais dans l'enseignement supérieur - en médecine, j'ai eu une heure par semaine pendant deux ans, cette année, j'ai eu 3h sur l'année !

Oui, mais quel genre de cours en anglais ? J'ai étudié l'anglais pendant 10 ans, jamais en "cursus principal" (comprendre : à la fac, c'était en option), et chaque année, c'était la même chose : on revoit les règles de grammaire de base, puis on lit des articles (ou on regarde des vidéos, pour changer) et on débat dessus. Au bout de 10 ans, ça devient lourd. Surtout que ce sont toujours les mêmes sujets qui reviennent : la discrimination, l'alcool, les problèmes liés à l'environnement. On tourne en rond. Alors oui, peut-être que la marche supérieure, c'est d'introduire quelques cours "normaux" dispensés en anglais. J'ai quand même eu durant ma licence en France un cours de philosophie en anglais où enfin on ne me rabâchait pas pendant des heures quand utiliser since/for ou le present perfect. J'aurais juste préféré qu'à la place de la philosophie, ce soit un cours plus en cadre avec mon cursus.

J'ai l'impression de toute façon qu'on est encore tellement loin d'atteindre les "scores" des Pays-Bas ou de la Suède : pour qu'on en arrive là, il faudrait vraiment que le niveau d'anglais des élèves français (à la sortie du lycée) s'améliore, je ne pense pas qu'il y en ait beaucoup (pas une majorité en tout cas) qui puissent ou veulent suivre un cursus enseigné entièrement en anglais.

 

[popomme]

Oui, mais quel genre de cours en anglais ? J'ai étudié l'anglais pendant 10 ans, jamais en "cursus principal" (comprendre : à la fac, c'était en option), et chaque année, c'était la même chose : on revoit les règles de grammaire de base, puis on lit des articles (ou on regarde des vidéos, pour changer) et on débat dessus. Au bout de 10 ans, ça devient lourd. Surtout que ce sont toujours les mêmes sujets qui reviennent : la discrimination, l'alcool, les problèmes liés à l'environnement. On tourne en rond. Alors oui, peut-être que la marche supérieure, c'est d'introduire quelques cours "normaux" dispensés en anglais.

Same here ! Cours d'anglais en option, toujours le même scénario : article => lecture => traduction de l'article => questions sur l'article. D'ailleurs, les contrôles consistaient en une synthèse... rédigée en français

 

[Cocoeau]

Je suis pour quelques cours en anglais, mais surtout pas tout les cours, et surtout pas n'importe comment !

Je suis moi même étudiante en LLCE et mes cours sont en bonne partie en anglais. Certains assurés par des anglophones dont c'est la langue maternelle (de divers horizon, tant le Texas que l'Australie ou l'Irlande). Certains assurés par des français excellents dans cette langue, avec une réelle maîtrise des subtilités de l'anglais. Et d'autres enfin assurés par des français n'ayant qu'un anglais douteux.
Si même en LLCE on galère à trouver des profs qui parlent bien l'anglais, j'ai peur des cours en anglais dans les autres filières.

Par ailleurs je me souviens de mon premier CM de l'année, en L1, par un prof texan. Je sortais d'un bac L spé Anglais et ayant déjà fait un an de fac j'avais l'habitude de prendre des notes. Pourtant les 2 premiers cours en anglais, je n'ai pu noter que quelques mots tant mon cerveau était occupé à comprendre le reste.
LLCE est une filière certes majoritairement peuplée de bacheliers L, mais ouverte aux bacheliers S, ES, techno... Ceux-là, même s'ils étaient souvent excellents en anglais dans leur filière précédente, ont vraiment galéré dans les cours en anglais.

Ces cours ne devraient pas être imposés en L1, qui devrait être un an de remise à niveau en langue vivante. Et à partir de la L2, hop, plein pot sur l'anglais !
L'année avant ma L1 de LLCE j'étais en Lettres et je n'avais qu'une heure et demi d'anglais dispensée par une prof qui nous racontait sa vie au lieu de faire cours, mon niveau s'est dégradé par rapport à celui de fin de Tle.
Ce n'est pas comme ça qu'on forme des français anglophones ! Il faudrait au moins 3h d'anglais en L1 - les emplois du temps des étudiants sont assez vide pour rajouter une petite heure et demi - et surtout du vrai anglais, pas un cours d'une heure trente sur le lapin nain de la prof ! (oui oui, vécu. Il s'appelle Kiki. Il est mignon. Mais il est hors sujet.)