Houla, le débat a beaucoup avancé depuis ma dernière participation!
Je suis heureuse de voir que nombreuses sont celles qui soutiennent la filière, et je serais aussi heureuse d'essayer d'expliquer pourquoi une TVA à 7% plutôt qu'à 20% à celles qui ne voient pas le problème. (@
Euki )
J'aimerai pouvoir être claire, apporter des arguments justifiés, avec des exemples précis, malheureusement, je ne suis pas assez renseignée sur le sujet (l'économie, la gestion...), et surtout, pas suffisamment objective: c'est le métier de mes parents, c'est mon mode de vie depuis toujours.
Je vais essayer néanmoins d'expliquer quelques petites choses sur le fonctionnement d'un centre équestre, et sur l'impact qu'aurait cette augmentation de TVA. (En chiffrant un peu @
Kbi )
Un centre équestre avant tout, c'est une grosse entreprise. Ce sont des écuries (bâtiments à construire ou acheter...), des carrières et manèges à entretenir (bâtiments encore, sable, arrosage), suffisamment d'espaces pour mettre les chevaux en liberté (quand on sait le prix du mètre carré). Même lorsque l'on veut faire une "petite structure familiale", ça demande déjà un énorme investissement financier (en plus de l'investissement personnel, mais nous ne nous plaindrons pas, après tout, personne ne nous a forcé à vivre de notre passion).
Les prix sont très variables, mais histoire de donner quelques exemples chiffrés
Prix d'achat minimum d'un terrain:
150 000 euros en moyenne + construction.
Prix d'achat d'écuries: minimum 500 000 euros, si on veut qu'il y ai des boxes, des prés et une carrière.
Petit comparatif avec les autres sports => il existe bien sûr des clubs privés, qui ont leurs propres installations, ce qui coûte un bras à leurs propriétaires, mais il y a énormément d'installations municipales! Certes, l'utilisation de ces installations a un coût, mais il est bien moindre, peut parfois être partagé entre différents clubs... Il n'existe que très peu de centres équestres municipaux.
Passons au matériel. Qui dit centre équestre dit cavalerie. Et ça aussi, ça coûte cher. Plus cher qu'un chien ou qu'un chat d'élevage. Pour un "petit cheval de club" lambda, sans papiers, jeune, pas trop éduqué (il faudra donc lui apprendre les ficelles du métier, ce qui prend du temps, et le temps, c'est de l'argent, n'est ce pas?
), on peut aisément compter 1000€. Si on veut un peu plus de qualité, on passe à 2500€. Tout ça sans TVA (qui est déjà passée à 20% pour les ventes). Prenons une cavalerie "moyenne", avec 5 chevaux à 1000€ et 5 à 2500€ => 17 500€ + 3500€ de TVA. (contre 1225€ si on avait une TVA à 7%. Là, on les sent passer les + 12% @
La Gloïre )
Je ne sais pas combien de ballons de foot/cages/filets de tennis/raquettes il faut acheter pour atteindre pareille somme...
Et puis pour conserver ce matériel, il ne suffit pas de mettre les chevaux dans un placard. Il faut des boxes sur paille ou copeaux, il faut de l'eau en abondance, il faut de la nourriture, il faut payer les frais vétos (au moins pour les vaccins, dans le meilleur des cas), il faut payer le maréchal ferrant. La seule chose sur laquelle toutes les activités peuvent se rejoindre je crois, c’est l’entretien. Un palefrenier vs. Technicien de surface ou quelqu’un s’occupant de la maintenance, bref, un employé, généralement au SMIC.
Pourtant, malgré tous ces frais, un cours d'équitation n'est pas beaucoup plus cher qu'un cours de tennis (chez moi, 14,5€ ttc l'heure de cours collective). Grâce à cette TVA réduite, les centres équestres survivent.
Et si les gens protestent dans la rue, ce n’est pas tellement parce que le prix de l’équitation va augmenter (ok, si, quand même), mais c’est avant tout parce que les écuries qu’ils aiment sont menacées, parce que certaines fermeront, parce qu’elles n’ont pas la marge suffisante pour amortir cette hausse de TVA.
Le principe de la TVA, c’est que «
les entreprises jouent un rôle de collecteurs d'impôt pour le compte de l'Etat : elles facturent la TVA à leurs clients, au taux de 19,6 % (taux normal) ou 5,5 % (taux réduit) et la reversent ensuite au Trésor, déduction faite de celle qu'elles auront payées sur leurs achats. C'est donc le consommateur final qui supporte la charge de la TVA, et non les entreprises qui concourent à la production des biens et services. »
[Ici]
Seulement, dans le monde du cheval, les achats sont essentiellement agricoles (donc TVA 7%), tandis que les biens revendus sont à 20%. Ce n’est donc pas le consommateur final qui supporte la charge TVA, c’est l’entreprise, il n’y a pas de compensation. Sauf si on augmente encore nos tarifs, au risque de perdre nos clients.
Enfin, si les professionnels du cheval protestent et grognent, c’est aussi parce que le maintien d’une TVA à 7% était une promesse du gouvernement en Décembre 2012 («
le gouvernement de Jean-Marc Ayrault met le pied sur le ballon en expliquant qu’il va geler le passage de TVA à 20 % pour les centres équestres en 2014, que ce taux restera à 7% comme pour les autres activités agricoles et ce contre l’injonction de l’Europe »). Alors oui, ils ne prévoyaient pas forcément que l’UE allait leur retomber dessus (surtout après ce que vient de m’apprendre @
Nephtys concernant la TVA réduite en Belgique sur l’activité sportive. Merci !
), mais ils n’ont même pas essayé de se battre ! Puisque le gouvernement ne le fait pas, nous le feront pour lui.
Edit: @
lilipoune : Oui, je suis d'accord avec toi (même si je refuse d'en manger), la boucherie chevaline a aussi permis de sauver l'économie de la filière. En matière d'économie, l'élevage allemand est moins performant (rentable) alors qu'ils produisent des chevaux de sport de bien meilleure qualité, juste parce qu'ils n'en vendent pas à la boucherie...
Par contre, attention de ne pas prendre les moniteurs d'équitation pour des benêts incapables de gérer leurs biens.
Les formations monitorat incluent des heures de comptabilité, gestion, management... Pas selon de la pédagogie et de l'hippologie. Et une fois qu'on a commencé à être formé et renseigné, on continue de s'intéresser au sujet!