En fait, le site "ressources prostitution" est l'équivalent des sites qui prétendent donner des infos sur l'avortement mais qui sont au fond anti-ivg (qui vont d'ailleurs avoir plein de témoignages de femmes qui ont avorté et qui ont été traumatisées). Disons qu'ils/elles ont au moins l'honnêteté de se dire explicitement abolitionnistes mais du coup, je vais clairement pas le considérer comme neutre ou objectif, que ça soit dans la sélection des témoignages ou dans leur fiabilité. Et donc oui je donne plus de poids à des associations créées par les TDS, ou qui travaillent
avec les TDS, ou encore des autres TDS* avec qui je discute, ou même à des trucs comme Amnesty.
* ça inclut une TDS qui considère tous les hommes hétéros comme des gros connards (y compris ses clients) mais qui néanmoins considère son travail comme un choix libre.
Qu'une légalisation ait été mal conduite, mal élaborée, je peux l'imaginer, mais qu'un-e TDS prône l'abolition, ça n'a absolument aucun sens. Qu'il/elle veuille avoir une porte de sortie, oui, évidemment. Qu'on veuille collectivement un monde où ça ne soit pas nécessaire de faire un job qu'on aime pas ou pire qui nous dégoute, carrément d'accord. Mais en quoi interdire le travail du sexe va changer sa situation ? En quoi ça va donner une porte de sortie ? Comme va-t-il/elle porter plainte pour proxénétisme, viol, etc., s'il/elle est criminalisé-e ?
Côté réification des femmes, dates de péremption et autres a priori, le travail du sexe est précisément beaucoup moins trash que les films/séries/etc. Très concrètement, je suis pas la seule à avoir eu une adolescence archi-complexée à cause de l'image qu'on me renvoyait de ce que je devrais être et n'étais pas. On parle des actrices qui à 40 ans ne sont plus envisagées pour des personnages sexuellement actifs ? Des personnages minces qui se trouve 3kg en trop mais pas assez de seins ? de l'industrie de la mode ?
Dans le travail du sexe et le porno, précisément, tous les désirs cachés s'expriment, et donc oui il y a des vieilles putes, des grosses putes, des putes maigres, etc. de même qu'il y a des mots-clés en tout genre dans le porno. J'ai longtemps été anti-porno, et effectivement le porno industriel caricatural et dont les tournages sont violents ça craint. Mais dans tout ce qui existe d'amateur, et de non-mainstream (tout en ayant clairement une visibilité), il y a une diversité de physiques (et de pratiques) jamais vue au cinéma ! je suis désolée, mais finalement c'est beaucoup plus inclusif. Donc y a à redire (je le nie pas!) mais
je trouve la culture "publique" beaucoup plus violente, et elle est collectivement cautionnée au contraire du porno, et plus encore du travail du sexe.
Sur travail normal/spécifique : ça peut être comme un autre travail sur certains aspects, spécifique sur d'autres. C'est le principe d'une comparaison aussi, y a des points communs, y a des différences. Je comprends pas ce truc de tout ou rien. Et y a plein de jobs qui ont des régimes spéciaux parce que spécifiques.
Clairement, je considère (et je l'ai dit dès mon premier message) que bien sûr les non-concerné-e-s peuvent avoir un avis!
Mais quand on en vient à infantiliser les putes qu'il faudrait protéger malgré elles, considérer comme traumatisées d'office même si elles le savent pas encore, ou considérer que les TDS qui ont parlé ici ne sont pas représentatives parce qu'il y a de l'esclavage sexuel (de nouveau, tout ce qui argumente en assimilant l'un à l'autre, juste non), ben on a un peu l'équivalent du mansplaining.
Malgré tous nos désaccords, qu'on ne résoudra clairement pas là tout de suite, je voulais vous remercier pour la discussion
. Le simple fait qu'on puisse en parler est déjà quelque chose. Et à titre personnel ça me donne l'occasion de réfléchir à comment je conçois les choses, à formuler ma pensée.