archibrald;4631499 a dit :
A voir certains commentaires, on dirait que vous avez lu un article intitulé "J'ai tout quitté pour me faire tatouer et me teindre les cheveux".
Eh ben moi cet article m'a parlé. J'ai pas fait de "vraie" crise d'ado non plus, j'ai toujours été cool avec mes parents, tout s'est plutôt bien passé. Ils m'ont suivie dans mes lubies, ma mère me tressait mes atébas et m'a aidée à démêler ces horribles dreads dont j'étais fière, je lui ai toujours tout dit, même ma première clope qui m'avait fait jurer de ne plus y toucher (lol), et ma première cuite. Ma rébellion? Imiter sa signature sur les justifications d'absence en EPS quand elle oubliait de le faire elle-même. Elle savait très bien que j'allais glander au parc à côté pendant ce temps. Je ne faisais pas de conneries, et en échange nous vivions dans une sereine complicité de transgressions minuscules et régulières.
En contre-partie j'avais pas tellement d'opinions propres (dans les deux sens du terme parce que les leurs sont plutôt sales), et comme Marie-Charlotte je n'ai pas l'impression d'avoir déjà pris une décision importante sans eux. Ca a dû limiter les frictions.
Et c'est maintenant que j'ai assez de cran pour m'affirmer devant eux que ça se passe un peu moins bien. Bah oui, quand ta fille te met le nez dans ton caca après une blague misogyne ou raciste, c'est moyen agréable, surtout de reconnaître qu'elle a raison. Quand j'affirme que la carrière et l'accession à la propriété ne sont pas des fins en soi, mon père m'insulte de communiste idéaliste. Et moi qui l'admirais à 16 ans, j'ai aujourd'hui pitié de sa vie d'ouvrier exploité pendant 25 ans dans la même entreprise, pour rembourser le crédit d'une maison dans un village laid, avec un voisinage laid et des lampadaires laids.
Même si je pense comprendre ton ressenti pour avoir eu sensiblement le même il y a une dizaine d'années, la fin de ton message me donne envie de t'avertir : se construire en méprisant les autres, a fortiori ses parents (tu parles de "pitié" mais c'est plutôt du mépris que je ressens dans tes propos ; peut-être que je me trompe), c'est casse-gueule. Peut-être qu'eux même ont construit cette vie d'ouvrier qui te paraît moche et minable en réaction à des gens, des faits, et que cela leur a paru bien. Peut-être, quand tu auras leur âge, seras-tu revenue de certaines choses qui te paraissent bonnes aujourd'hui. Je pense sincèrement qu'on ne peut décemment pas revendiquer son droit d'exister en crachant sur la vie des autres.
Peut-être tes parents sont-ils de gros beaufs sans intérêt, je n'en sais rien, je ne les connais pas. Mais toi tu les connais, ce sont tes parents. Ne sont-ils donc que cela pour mériter des propos aussi durs et arrêtés?
La question n'est pas rhétorique, c'est une vraie question, et peut-être que la réponse est "oui".
Mais quand même, je persiste à croire que c'est un peu facile de vouloir sans cesse de nos parents qu'ils soient ouverts, tolérants sur nos choix etc. quand beaucoup d'entre nous sont si prompts à juger leur existence et leur mode de vie/de pensée (et je ne fais pas référence qu'à toi, là, mais à pas mal d'interventions lues à l'occasion de différents articles et témoignages).