Je me suis toujours trouvée grosse, avec 10kg de plus ou de moins

[Mijou]

A la réédition de ce témoignage, je suis toujours sidérée de voir à quel point un chiffre, qui est l'un des rares chiffres qui ne soit pas du tout objectif car il dépend de pleeeeein de facteurs, peut conditionner tout une façon de penser et induire une spirale tellement destructrice, que j'ai moi aussi connu.

Je suis en surpoids, depuis la primaire, et j'ai comme beaucoup ici fait le yoyo... il y a un poids "palier" que je redoute d'atteindre, mais quand je repense aujourd'hui à tous ces chiffres qui ont pourrit ma vie, je suis sidérée.
J'ai une grosse charpente, de gros os, et pas mal de masse musculaire (sport depuis toute petite puis métier physique depuis mes 19 ans). Mesurant 1,70m, mon poids de forme, que j'ai conservé grosso modo de mes 18 à 25 ans, c'est-à dire celui qui restait stable et surtout dans lequel je me sentais bien (le mieux en tout cas) était 80 kilos et une taille 44... Soit en suproids selon les standards et ces conn*** d'IMC, en attendant j'avais une silhouette qui sans être mince était harmonieuse et sportive. Je collectionnais les relations, sentimentales ou coups d'un soir, et c'est la seule période où je n'ai jamais eu de remarques désobligeantes sur mon apparence. Quand je regarde les photos de l'époque je ne me trouve pas grosse. Pas fine, mais pas grosse.

A une époque, j'ai fait un burn out, je suis descendue à 70 kgs et une taille 42, tout en continuant un métier physique.Tout mon entourage me trouvait " trop mince" (ce sont leurs mots), sur les photos ma tête parait énorme par rapport au reste de mon corps et le reste fait bizarre par rapport à ma carrure (épaules et hanches). Et moi je me sentais mal, je me sentais fragile physiquement, j'avais tout le temps froid. Pourtant j'avais toujours un bon capital muscle (ce qui explique mon poids sur la balance, toujours au-dessus des normes acceptables selon la presse "féminine", celle qui est toxique et te dis qu'il faut faire 10kgs de moins que tes centimètres, et pour laquelle j'aurais du perdre encore 10 kgs), et notamment le bas de mon corps qui conservaient des formes toniques, mais des formes. Mais ma silhouette pour le coup n'était pas du tout harmonieuse. A l'époque j'en revenais pas de rentrer dans un 42, d'avoir si peu de ventre, ou de bras, j'étais même contente du fond de ma dépression (liée au burn out), puis j'ai réalisée que je n'avais en réalité pas en corps en bonne santé... En plus, j'avais les inconvénients de la perte rapide de poids, notamment au niveau des bras, où la peau pendouillait.
Et pourtant, si on regarde les chiffres... j'étais toujours "grosse".

Aujourd'hui, je me stabilise, toujours au dessus de mon poids de forme que j'aimerais retrouver, mais sans que ça me pourrisse la vie. En tout cas je suis stabilisée en ayant changé de boulot pour un travail de bureau, en ne mangeant pas toujours très bien et en faisant du sport de façon épisodique. Je me réconcilie peu à peu avec mon corps, comme il est.
Mon gynéco m'a dit une phrase très juste (avec son humour un peu space que j'adore) : "vous ne serez jamais sylphide, c'est pas votre nature ! Si vous n'êtes pas bien dans votre corps, ce qu'il vous faut c'est faire du sport... mais pas pour maigrir !" Je trouve ça assez juste.

 

[Tzig0ne]

J'ai beaucoup été dans cette dynamique, jusqu'à récemment, où je me suis mise à cuisiner TOUT ce que je mange. Ce qui est en fait infiniment plus simple et moins chronophage que ce que je m'étais imaginée jusque là (le batch cooking, la vie).

Et en fait ça a tout changé. Déjà parce que manger très sainement et de façon très satisfaisante, c'est un cercle vertueux niveau forme physique. Ca m'a donné envie de faire du sport et, pour le première fois, non pas pour "être plus bonne" (ou "moins dégueu"), mais pour continuer de me faire du bien, à mon rythme, selon comment ça m'amuse et l'énergie que j'ai pour me pousser (ou pas, selon les périodes). Donc, pour la première fois, de manière durable et plaisante.

Donc oui j'ai perdu du poids au passage, et les premiers mois ça restait une obsession. Et puis j'ai appris à ne plus monter sur la balance, parce qu'elle n'indiquait toujours pas ce que je souhaitais (aka le poids que je faisais y a 15 ans pendant ma croissance lol ça n'a aucun sens).
Mais aussi parce que maintenant je suis fière de ce que je mange, fière de ce que je bouge. Tous les jours je mange "trop", j'ai calculé mes calories à un moment, je suis tous les jours en excès. Par contre je suis en excès de fruits, de petits plats de légumes maison, de gâteau à la banane et à la farine de pois chiche ou de yahourt de soja au sirop d'agave avec une poignée d'amande (ou 10).

Du coup je garde du gras, voilà. Pas beaucoup, parce que même en mangeant à plus-que-satiété, je ne peux pas tellement en prendre plus (parce que oui les amandes c'est calorique, mais y a peu de chance que j'en mange 1kg d'un coup)(alors que les chips... on connait lol).

Par contre au delà de l'image de moi, quand je me regarde, je vois que je donne à mon corps tout ce qu'il lui faut, que je lui permets de se faire des plaisirs gloutons, que je suis plus forte, plus souple, plus joyeuse.

Je ne dis pas que c'est la solution pour tout le monde, je partage simplement que perso j'ai rompu ce cercle vicieux du "+ ou -10kg on se déteste bien pareil" non pas en travaillant sur mon mental et mon acceptation, mais sur mon assiette. Peut être que ça peut aider quelqu'un qui, comme moi, n'a pas tellement de force d'auto persuasion

Plus jamais je ne suis dans le dilemme de "manger une baguette au Nocciolata pcq la journée a été dure alors fuck" VS "manger 2 pommes pcq demain on a un date et qu'il faut compenser la baguette d'hier". Et ça ben peu importe l'épaisseur de mes poignées d'amour, ça change drastiquement la manière dont je les regarde.