Le droit d’accéder à leurs origines des enfants nés de dons d’ovocytes va-t-il freiner les donneuses ?

[Aesma]

Je donne régulièrement à l'EFS, du sang, du plasma et même des plaquettes lors de mon dernier don. J'avais envisagé le don d'ovocyte quand on m'avait parlé des procédures PMA et notamment de la pénurie. Sauf que.... Ben c'est trop chiant, c'est trop long, c'est trop douloureux. P'têtre que j'aurais pu tenter un jour (notamment si les dons d'ovocyte étaient rémunérés) mais la levée automatique de l'anonymat me freine alors même que si on me laisser le choix je serais probablement encline à laisser des infos pour me retrouver dans 20 ans, à minima une lettre pour expliquer ma démarche. Je pense que ce qui me gêne ici c'est de rendre le truc obligatoire mais également incitatif, comme si il fallait absolument chercher son origine biologique.

@Carton_Pate Mais il me semble qu'il est déjà possible de laisser une lettre à l'enfant lors d'un accouchement sous X pour donner des informations pour éventuellement être retrouvé·e ou simplement expliquer les raisons qui ont poussées à l'abandon (et pour le coup si elles ne sont pas exposées j'aurais tendance à penser qu'il ne vaut mieux pas trop creuser quitte à tomber sur des histoires dramatiques qui a mon sens peuvent être encore + destructrices que l'incertitude)

Pour ce qui est de la recherche génétique, il y a aujourd'hui plein d'outils qui permettent d'y avoir accès, ma mère a fait un test ADN via un site, le test en lui-même coûtait 55€ (c'est pas tant que ça d'autant que les personnes qui passent par des PMA sont relativement privilégiées) Le test ADN permet de donner des infos sur nos origines ethniques avec des pourcentages (ma mère est 27% italienne et 25% anglaise ) et est capable d'établir de liens entre ta famille proche, élargie et lointaine (ma mère partage 0,8% de son ADN avec Jean-Louis B, 50 ans qui vit en France et 0,2% avec Bittinger JB, septuagénaire suédoise)

 

[Carton_Pate]

@Aesma cest une possibilité mais rien d'obligatoire, il est possible de ne rien laisser du tout, pas même un renseignement médical.

 

[Kettricken]

En Belgique, le don est anonyme aussi. Une amie en couple avec une femme a pris le temps de lire les rapports des comités éthiques de plusieurs pays concernant cette question. Elle a été notamment frappée par la situation des Pays Bas qui avait choisi le don anonyme pour des raisons éthiques et puis a changé d'avis pour d'autres raisons éthiques. Je n'ai pas lu ces rapports mais elle l'a résumé par : "certains enfants ont besoin de connaître leurs origines et les en priver arbitrairement est injuste car eux n'ont rien demandé a personne"
Elle a donc profité d'un flou de la loi belge (qui est en train de se verrouiller) pour acheter à prix d'or les paillettes de sperme a la fameuse banque danoise. Elles n'ont pas pu choisir le donneur (le médecin a choisi qlq qui ressemblait a l'épouse de mon amie) et ne savent pas qui s'est. Mais si il le souhaite un jour, quand il sera adulte, leurs fils pourra voir accès au dossier.
La loi danoise verrouille bien les choses : le donneur a 0 obligation vis a vis de l'enfant. Il peut refuser de le rencontrer s'il le souhaite (je pense que le dossier ne contient pas de moyen de contacter le donneur, c'est juste un historique médical et une photo).

Comme l'a dit @Mellys notamment, certains enfants ont besoin de savoir d'où ils viennent. Et c'est super rare que ça soit une démarche de recherche d'un parent de substitution. Juste de ne pas être dans le noir concernant une partie de son histoire. Et je ne vois pas de quel droit on les en priverait.
Le bien de l'enfant passe avant.

 

[Astipalaya]

Je suis d'accord avec toi @Kettricken En Suisse les enfants issus d'un don de sperme (on ne peut pas donner les ovocytes) peuvent à leur 18 ans savoir qui est leur donneur, et idem, un donneur n'a aucune obligation vis à vis de cet enfant. Je pense que beaucoup d'enfant s'en fiche de connaître leur géniteur, mais pour ceux qui sont en recherche de leur origine ça peut être source de grande souffrance.
Concernant le fait que l'enfant pourrait chercher dans le donneur un parent de substitution... malheureusement une personne dans ce cas là peut se projeter avec n'importe qui, j'ai une amie dans ce cas là et c'est souvent des profs sur qui elle se projette

Spoiler: Pas citer

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Aussi je pense qu'on ne peut pas comparer le don de gamètes avec le don de sang/organes. Les receveurs sont, en général, dans une démarche active d'accepter un don anonyme, si cela pose un problème trop grand à qqun de recevoir une poche de sang d'un donneur anonyme, c'est normalement possible de refuser une transfusion. Un enfant né d'un don n'a pas pu choisir de connaître ou non ses origines, c'est pour ça que je suis pour que les enfants aient le choix d'avoir accès aux information sur leur donneur s'ils le souhaitent.

 

[Aesma]

@Carton_Pate Tout à fait mais encore une fois ça ne concerne que 600 naissances par an, et sur les 800 000 autres naissances je ne pense pas que tous les bébés aient un accès complet à leurs antécédents médicaux (si tu connais pas ton père, si l'un de tes parents biologiques a été adopté, si tes aïeul·es sont décédé·es prématurément - les travailleureuses précaires ont + de chances de mourir dans un accident du travail ou de développer des maladies, si ta famille est issue d'un parcours migratoire une partie a peut-être été tuée à la guerre ou durant le trajet vers l'Europe...).

Les antécédents médicaux servent surtout à gagner du temps. Si tu as des antécédents de cancer on va chercher ça en priorité si tu as un souci de santé et il y aura un peu + de contrôle que la moyenne (du fait des soignant·es mais également de ton fait à toi) mais tu peux partir avec un dossier médical vierge le rôle des soignant·es sera toujours de trouver de quoi tu souffres si tu as un problème.

Ah tiens sinon j'ai oublié de râler. J'ai cliqué sur le lien vers l'agence de biomédecine, non seulement on t'indique toujours que c'est anonyme mais on te précise que tu dois être consentante et... ton ou ta conjointe aussi

Enfin, je souscris aux trois grands principes qui régissent le don d’ovocytes et tous les dons d’éléments du corps humain en France :

• L’anonymat – Aucune filiation ne peut être établie entre le ou les enfants issus du don et moi.
• La gratuité – Je ne recevrai aucune rémunération en retour de mon don puisque cela s’inscrit dans une démarche de solidarité. Mes frais médicaux (du bilan préalable au suivi après le don) et non-médicaux occasionnés par le don (frais de transport, d’hébergement, de garde d’enfants…) sont pris en charge.
• Le libre consentement – Je suis informée et librement consentante pour donner des ovocytes. Je devrai signer un formulaire de consentement, tout comme mon/ma partenaire si je suis en couple.

 

[Ocytocine.]

@Aesma ah oui je me souviens que ça m'a ait bien choquée que le.la conjoint.e doive être consentant
Ça avait bien jasé en cours

 

[....]

Les hommes doivent aussi avoir l'accord du ou de la conjoint.e pour donner leur sperme?
Parce que sinon, le beau combat que voilà, ce serait hallucinant.

 

[Pipistrelle.]

@... Je viens de vérifier du coup, et la règle est la même pour le don de sperme (voir ici : démarches préalables au don --> Recueil du consentement)

 

[Shiho]

Oui c’est pareil pour le don de spermatozoïdes.

Je suis un peu heurtée par « Le bien de l’enfant passe avant ». Je ne suis pas d’accord. La personne qui donne aussi doit être consentante pour la suite. J’hésitais à faire un don d’ovocytes car c’est une procédure très intrusive (moi qui ai horreur des piqûres et des examens gynéco, c’est un combo ) mais clairement la levée de l’anonymat est un stop.

Je donne mon sang et mes plaquettes régulièrement, je ne veux rien avoir à faire avec la personne qui en bénéficie. Si ça se trouve, c’est une personne affreuse que j’ai contribué à sauver, alors que jamais je n’aurais accepté en connaissance de cause.

Idem pour le don d’ovocyte. Je veux bien filer des ovocytes pour aider quelqu’un , au lieu de les « gaspiller » chaque mois, mais le reste ne me regarde pas. Peut-être qu’il n’y aura pas d’enfants, peut-être qu’il y en aura, peut-être que je serai en désaccord complet avec cette personne et ses valeurs. Si je dois risquer de rencontrer un jour cette personne, alors je veux pouvoir choisir les parents qui utiliseront mon ovocyte, pour limiter le risque qu’ils/elles élèvent un c****** fini.
Ce serait dans l’intérêt de l’enfant de pas avoir des parents abominables non ?

 

[Dame de lotus]

Le problème du "Le bien de l'enfant passe avant" c'est que c'est un argument qui, pris isolément, a été utilisé pour refuser l'adoption aux couples homosexuels par exemple, il fut un temps.

"On ne va pas accepter que des enfants n'aient pas un parent de chaque sexe, parce que ce n'est pas bien pour son équilibre mental : le bien de l'enfant passe avant le désir des parents"

"Pour le bien de l'enfant" c'est un argument qui est beaucoup utilisé dans le chef des familles "non canoniques" et qui contribue à créer un fossé entre les familles """normales""" et les autres familles.

Note ici : je ne dis pas que c'est que @Kettricken a voulu dire, d'autant plus que l'article montre qu'il y a des personnes concernées qui ressentent le besoin de connaître leurs donateurs, ce que je dis juste, c'est que prendre isolément l'argument "Le bien de l'enfant passe avant tout" et le promulguer comme axiome, c'est donner du poids à d'autres dérives. Il faut vraiment le contextualiser, lui donner du relief.

 

[Aesma]

@Shiho T'imagine notre sang a peut-être été utilisé pour maintenir en vie Jean-Marie Le Pen

 

[Pasd'idéespourunpseudo]

@Dame de lotus j'ai trouvé ton message tres interessant et je t'en remercie
Mais en comprenant maintenant bien les craintes qu'on peut avoir notamment celle d'être une presence ecrasante dans une famille, je ne pense pas que la levée de l'anonymat soit pour autant une telle "menace" du statut quo actuel et atteint aux droits des autres de façon déséquilibrée.

Tout d'abord, cela se fait lorsque la personne est majeure. Ça laisse aux parents la totalité de leur responsabilité parentale. Ils ont tout leur temps pour éduquer leur enfant faire famille, inculquer leur vision des choses. Le donneur ne "s'impose pas" plus qu'avant. Pas moins non plus puisque la question de la procreation revient trees souvent sur le tapis et ce n'est pas anodin. Bref, la levée de l'anonymat ne sape pas du tout tout le travail effectué par les parents en amont et il est fort à parier que cela ne soit un reconfort en plus pour une minorite denfants en souffrance (sinon ça voudrait dire que le système est foireux...mais je ne pense pas). Ca aide ceux qui en ont besoin, ça ne change rien aux autres. En plus ça permet a des adultes de pouvoir se réaproprier leur notion de la parentalité, de l'identité etc. Le donneur, lui, a moins de protection morale puisqu'il y a une chance sur x que 18 ans plus tard il ait une rencontre inopinée, MAIS sil a en compensation un statut légal de donneur a part entiere, on ne pourra rien en tirer de plus que ce qu'il voudra bien

Tu dis que tu comprends que les parents négocient leur relation avec le donneur, ou que la progéniture ait besoin de contacter le donneur a un moment donnée. Ce que l'anonymat ne permet pas de faire, facilement en tout cas. C'est une regle unique. En revanche, la levée de l'anonymat donne une plus grande latitude puisqu'on peut recontacter/avoir des informations sur le donneur....ou pas. Ça donne une plus grande incertitude quant à ce qui peut s'ensuivre pour toutes les parties mais ce n'est pas forcément un problème si on l'accepte comme tel dès le début de la démarche.

Ça donne juste un droit supplémentaire a qqun 18 ans plus tard et cela donne au moins un pouvoir decisionnaire à une partie qui n'en avait aucun jusque là.