Et l'argument de la mixité sociale, non, je n'y crois pas. A 16 ans, c'est trop tard, c'est dès le plus jeune âge qu'il faut s'y attaquer. Les privilégié-es resteront ensemble, et les classes populaires feront de même.
Je suis d'accord avec le reste de ton message mais je voulais revenir là-dessus car ce n'est pas la première fois que je vois passer ça sur ce fil, et je pense en fait que c'est presque l'inverse. Beaucoup de gens pensent que tout s'acquiert dans l'enfance, mais je pense que les adolescents et les jeunes de moins de 25 ans sont beaucoup plus des éponges pour ce qui est de sortir de leur cercle de confort. Les enfants et les pré-ados ont leur emploi du temps beaucoup plus organisé par les adultes et même s'ils sont confrontés à des schémas de vie différents du leur, quand ils rentrent chez eux le soir, ils n'ont pas encore l'âge de vraiment remettre en cause le modèle familial. En plus, quand on grandit au milieu d'un groupe, on adopte une partie de ses codes, on efface les différences et même si ça peut paraitre génial, ça veut aussi dire qu'on oublie que la vie des autres n'est en fait pas la même que la nôtre, ce qui empêche de prendre conscience des difficultés auxquelles ils peuvent être confrontés. Même en tant que "minorité" du groupe, quand on est très bien intégré, on a tendance à "oublier" certaines de nos spécificités en ayant l'impression d'être "comme les autres" jusqu'à ce qu'on soit confronté à des difficultés flagrantes que ne vivent pas les autres.
Personnellement, je ne pense pas que j'aurais eu la même prise de conscience sur le fait qu'on pouvait avoir le même âge et vivre à quelques minutes de RER, et avoir l'impression d'évoluer dans des bulles séparées si j'avais eu 8 ou 12 ans. J'aurais probablement expliqué nos différences de parcours avec les propres références qu'on m'avaient enseignées dans mon environnement comme le fait de bien travailler en classe ou d'être sage à l'école. Je pense qu'à 8 ou 12 ans, à moins que l'expérience de vie dont on est témoin soit vraiment d'une différence extrême, on n'a pas assez d'expérience de vie pour réaliser qu'on n'a pas la même que les autres. A 16 ans, on peut en prendre conscience beaucoup plus facilement.
Et pour ma part, la mixité sociale s'est faite à la fac. La fac était gratuite et ouverte à tous, même à ceux qui n'avaient pas de bac puisqu'ils pouvaient passer une capacité pour y entrer, et comme en sciences humaines les horaires étaient super souples pour accomoder les contraintes de chacun (travail, famille, etc.), on avait des gens de milieux très variés, avec des âges et des contraintes de vie différentes. C'était certes pas la mixité absolue (il fallait quand même un certain niveau d'études) mais c'était très varié comparé à mon milieu d'origine (la majorité de mes camarades de classe étaient partis en prépa pour les écoles d'ingé et de commerce, en droit, à Sciences Po ou en médecine). Et ça a beaucoup fait changer ma perspective sur les choses, car j'étais suffisamment âgée pour recréer des références de vie, réaliser qu'il y avait eu tout un pan de monde que je ne voyais pas jusqu'alors, et suffisamment jeune pour être prête à intégrer ce nouveau pan de monde dans mon expérience de vie (je pense que c'est plus compliqué de faire ça quand on a 50 ans et qu'on est complètement installé dans sa vie que quand on est un jeune qui quitte le nid et commence sa vie d'adulte).
C'est pour ça que je trouve que c'est très important de se retrouver dans une situation à l'adolescence où on provoque notre mélange avec des jeunes d'autres milieux, parce qu'on peut très bien passer une vie entière sans sortir de sa bulle et ne jamais réaliser qu'il y a d'autres modes de vie juste à côté de chez soi.
Quand on débarque dans un univers où on ne connait personne mais que tout le monde autour de nous est dans le même bateau, on parle plus facilement au premier venu. C'est exactement ce que j'avais fait à ma JAPD. J'ai parlé aux premières filles que j'ai vues et qui avaient l'air aussi perdues que moi alors qu'on n'avait absolument pas le même style vestimentaire. Peut-être que ça aurait été différent dans un contexte long terme, que je me serais progressivement rapprochée des filles plus bourgeoises qui avaient l'air plus familières mais en tout cas, ce n'est pas vraiment ce qui s'est passé à la fac (qui était aussi un milieu impressionnant où on devait se débrouiller tout seul, notamment dans les relations sociales car rien n'était organisé), où on avait quand même un certain brassage dans les groupes les deux premières années.
Bref, pour le moment, la JAPD est littéralement le seul vrai moment où on est mélangé avec des jeunes de milieux sociaux vraiment différents. A moins de sortir de sa classe sociale, ça n'arrive jamais à ce degré autrement car nos choix de loisirs, d'études et de boulots nous maintiennent toujours dans un certain type d'environnement, et je trouve que c'est justement un des principaux atouts de cette journée qui mérite d'être préservée.
J’en vois beaucoup râlé au sujet des horaires, comme quoi les jeunes sont déjà en manque de sommeil donc 22h30 – 6h30 c’est beaucoup trop strict. De mon point de vue 8h de sommeil, cela me parait très bien, beaucoup d’entre vous dorment surement moins que cela comme la majorité des jeunes ce qui explique leur manque de sommeil. Je n’en connais pas beaucoup dormant plus de 8h par jour en semaine.
C'est pas tellement le fait de dormir plus ou moins 8h (ce qui est peu pour des ados en pleine croissance soit dit en passant, ce ne sont pas des adultes, et qui peut être peu pour certains adultes), c'est aussi le fait qu'on n'a pas tous le même rythme biologique. Certains sont des lève-tôt et d'autres des couche-tard, les derniers ne sont pas plus flemmards, c'est juste qu'ils trouvent le sommeil plus tard que les premiers, c'est leur rythme biologique. Je ne vois pas l'intérêt de forcer un tel rythme biologique sur des adolescents alors que même les gens qui vont au travail tous les jours sont loin de tous se lever aussi tôt. Perso, je me lève rarement avant 8h pour aller bosser! Et pourquoi couper les soirées alors que c'est aussi censé être une expérience de découverte de l'autre? Ce genre d'horaires, il serait acceptable à la limite pour des gosses de 5 ans (en se couchant plus tôt), mais c'est complètement absurde pour des ados.
Je ne dis pas que cet horaire n'a pas d'intérêt tout court. Je suppose que dans certains contextes comme l'armée, les métiers où tu travailles en fonction de la lumière du soleil ou ce genre de choses, ça a du sens de s'entrainer à un tel rythme. Mais pourquoi imposer ça à des adolescents?
La seule raison que je vois, c'est l'image de cet horaire : on a ce cliché comme quoi les lève-tôt sont des gens travailleurs contrairement aux lève-tard et que les couche-tard sont des hédonistes qui veulent juste faire la fête et profiter des plaisirs de la vie laors que les couche-tôt sont raisonnables. Donc cet horaire, ça renvoie l'image de "regardez, on va transformer ces jeunes en vraies fourmis travailleuses qui préfèrent bosser et être sérieux que de s'amuser et dormir, on les fait rentrer dans le rang en leur imposant des horaires qu'ils n'aiment pas du tout!".
C'est en plus totalement anachronique étant donné qu'une grosse partie des métiers d'avenir sont liés à l'informatique et au travail avec des gens de pays étrangers, donc on peut travailler à toutes sortes d'heures... Je ne vois pas ce qu'on apprend de pertinent à ces jeunes dans le fait de se lever à 6h30 et se coucher à 22h30, ça ne leur servira même pas spécialement dans la vie à moins qu'ils bossent dans un métier manuel et encore pas comme cuisinier dans un resto ou barman. Par contre, c'est cool pour les couche-tôt, je dis pas le contraire.
Je rappelle quand même que nos grands pères ou pères ont fait l’armee pendant 6 mois voire 1 an et ne sont pas devenus d’horribles fascistes donc je ne vois pas comment en deux semaines Macron transformera ces ados en petits robots.
On peut aussi constater que les hommes de ces générations sont beaucoup plus sexistes, homophobes et même racistes que les jeunes d'aujourd'hui. Le fait qu'ils aient eu un passage forcé par une institution viriliste qui n'a pas trop remis en cause la masculinité toxique et est l'une des institutions permettant à la France de maintenir sa domination sur ses ex-colonies n'était bien entendu pas l'unique raison à ça, mais ça n'aidait certainement pas nos pères et nos grands-pères à remettre en cause leur vision du monde.
Et puis le service militaire n'avait pas le même sens, il devait former une réserve militaire. Le SNU, officiellement, c'est former les futurs citoyens. L'idéologie est au centre du SNU, ce qui n'était pas le cas pour le service militaire.
Du positif pourra peut être en sortir : j’ai vu que certains avaient du le droit à un cours sur le sexisme par exemple.
C'est une bonne idée, mais j'aimerais bien savoir qui donne les cours sur le sexisme parce que l'armée est franchement pas la mieux placée pour ça!