J?ai commencé à fumer en seconde, à l?âge de 15 ans en janvier 2000. A l?époque, beaucoup de mes camarades de classe fumaient, c?était autorisé et la clope ne coutait pas cher. Au collège, fumer donnait un coté racaille ? rebelle, mais là au lycée c?était devenu différent, ça faisait adulte. J?ai passé 4 mois à regarder avec admiration les terminales qui aspiraient la fumée, parlaient, puis soufflaient ensuite. Je me demandais bien comment ils faisaient. Et puis j?ai essayé, un jour, un copine me donnant sa cigarette allumée en disant « tiens moi ça », j?ai essayé. Deux amies me voyant passer me demandant « depuis quand tu fumes », j?ai répondu « depuis deux minutes ». C?était parti.
Après deux mois de crapotage, j?ai fini par fumer pour de bon. J?ai tiré une latte et ça m?a tourné la tête pendant deux heures, mais j?étais contente : j?avais enfin compris comment ouvrir la bouche sans recracher tout de suite la fumée. J?ai acheté mon premier paquet en avril, un paquet de 20 Lucky Strike à 17 francs, je m?en souviens encore. J?ai fumé comme ça jusqu?en terminale.
En terminale, je me suis mise avec quelqu?un qui ne voulait pas que je fume, totalement anti-tabac. J?ai fumé en cachette de lui pendant le temps qu?a duré notre histoire : 3 ans. En cachette de lui, plus en cachette de mes parents, ça commençait à faire beaucoup, mais rien ne pouvait me dissuader de fumer. Pauvre lycéenne de 17 ans, je trouvai quand même le temps, l?argent et la planque pour fumer.
Après le bac, en math sup et math spé, on est tellement dans le boulot et le stress des concours que fumer ou pas fumer est le cadet de nos soucis. J?ai continué de fumer compulsivement pendant ces deux années et sans même m?en rendre compte, je crois. Je trouvais l?argent en donnant des cours de maths ! le prix du tabac avait déjà considérablement augmenté, mais je suivais, j?avais pas le choix.
En 2004, j?ai intégré une école d?ingénieur et quitté mes parents. Mes parents qui étaient un frein au tabac des l?instant que j?étais chez eux. Là, c?était terminé, je fumais quand je voulais, ou je voulais et même dans ma chambre. Etant beaucoup plus libre qu?en prépa, je donnais des cours à gogo et pouvait donc me payer des paquets à gogo aussi. J?avais peu d?argent et la clope passait avant la bouffe : je fumais, mangeait peu, et en un an j?ai perdu 15 kilos sans trop m?en rendre compte.
C?est vers ma deuxième année d?école que la cigarette a commencer à me dégouter. Mon nouveau petit ami était un fumeur, celui là, mes parents pas là, mes collocs fumeuses. N?ayant plus besoin de me cacher, n?ayant plus d?interdit à braver, j?ai commencé à me demander à quoi ça rimait. J?ai également commencé à ressentir des douleurs de type « point de coté » au réveil, suite à un stage chantier très très enfumé. Là, j?ai commencé à me dire que puisqu?il fallait que j?arrête un jour (je n?ai jamais imaginé fumer jusqu?à la fin de ma vie), autant le faire maintenant, car chaque jour passé serait plus difficile sinon.
J?avais 22 ans et je sentais déjà le tabac m?abîmer.
2006 : Dernière année d?école et je déménage. Je vais en profiter pour défumer puisque je change de vie, ce sera plus simple. Mes amis passent me voir dans mon nouvel appart parisien, on fume comme des pompiers. Rapé. Noël : je pars 10 jours en vacances avec mes parents pour la dernière fois, je ne vais donc pas fumer et au retour, je ne reprendrai pas. A mon retour, premier pote croisé = première cigarette fumée. Rapé, mais cette fois la décision est fermement ancrée dans ma tête.
De janvier 2007 à aout 2007, j?essaie 4 fois de défumer, prenant chaque fois pour prétexte un changement dans ma vie : nouveau stage, déménagement, premier emploi, etc. A chaque fois, la défume dure une semaine grand max.
Finalement, j?ai abandonné, je n?y arrive pas, ça me fatigue, mais ça me fatigue encore plus de me dire que je n?y arrive pas. Je préfère encore ne plus essayer.
D?aout à décembre, je ne savoure plus la cigarette. Je passe de l?envie de fumer à l?envie d?écraser la clope que je viens à peine d?allumer. Je me réveille le matin en me disant « eh merde, je fume », j?émerge à peine de mon sommeil que me première pensée est qu?il faut que j?arrête de fumer? Plus personne n?est là pour me dire que c?est pas bien. Comme j?ai un emploi j?ai les moyens enfin de m?acheter mes paquets. Et pourtant je m?en veux à mort, je suis mal. Quand je parle d?arrêter de fumer mes amis me disent « mais bien sûr? ». Je l?ai dit tellement de fois, j?ai raté à chaque fois?
J?apprend qu?en 2008, les bars, restaurants et boites de nuit deviennent non ? fumeurs : voilà l?ultime occasion à saisir, c?est toujours dans ce genre de lieux que je replonge, et il a toujours été hors de question de devenir associable pour arrêter de fumer.
Plus que jamais motivée et encouragée par les collègues, je vais chercher de la motivation un peu partout : sites, tabac info, pubs anti tabac, forums, dés le premier jour. Ma secrétaire m?aide vachement : on se fait un footing par semaine, qui finit vite en séances de natation car j?aime pas ça. Je recouvre mon souffle à vitesse grand V.
Beaucoup autour de moi ne comprennent pas pourquoi c?est dur : après tout je n?ai fumé que 8 ans c?est pas très long. Si, justement, quand on a 23 ans, 8 ans c?est plus du tiers de sa vie et la totalité de sa vie d?adulte. C?est énorme. Mes souvenirs en tant que non fumeuse datent pratiquement de l?enfance. Etre adulte sans fumer, je ne sais pas faire, j?ai jamais fait. A 15 ans je suis en seconde, à 23 ans je suis cadre en bureau d?étude. J?en ai accompli, des choses avec la clope. C?est dur. Il faut que je perde mes repères. Mais je sens que je suis sur la bonne voie.
3 semaines sont passées, et je sais déjà que cette défume est la bonne. J?ai souvent envie de fumer, mais je sais déjà que je ne le ferai pas. Mon chéri, qui vit avec moi, accepte d?aller dehors pour fumer. Puis il arrête. On se fait des petits cadeaux avec l? « argent non dépensé » pour tenir : console de jeux, puis vélo.. etc.
Mes amis, me voyant sans tabac et grossir à vue d??il, sont un moment persuadés que je suis enceinte. Je me marre bien ! Il me croient incapables de tenir une défume sans une raison aussi importante. Bah, je me dis que dans 5 mois, ils verront à mon ventre que c?est faux.
Puis j?ai oublié la clope. Je ne me vois plus avec une clope, je sais plus, c?était pas moi. Voir les gens fumer me fait toujours envie mais très modérément, et pas toujours.
j'ai pris cette kilos cette année là : 2008. en 2009, j'en ai reperdu 10.
Aujourd?hui, 2 ans et 4 mois après, j?ai confiance et je considère que cette confiance a été la clé de ma réussite. Je ne regrette rien et surtout pas la clope, j?ai gagné un fric monstre, j'ai retrouvé mon souffle en toute occasion.
Aujourd?hui, en 2010, j?ai 25 ans, je viens de retrouver mon âge et j?ai une vie sans tabac devant moi.