Complètement d'accord! C'est ce que j'ai pensé sur le coup! J'ai lu Chrétien de Troyes a 10 ans et des grands auteurs en Primaire, mais j'ai JAMAIS PU aller au-delà de la page 10 des Royaumes du Nord, je n'accrochais pas du tout alors que j'avais 15 ans. Perso, j'ai trouvé que Le Rouge et le noir de Stendhal ou les bouquins de Maupassant étaient beaucoup plus faciles à lire! C'est pas parce que c'est de la fantasy et que c'est récent que les enfants adorent forcément!1. À quel moment ce prof a effectivement lu les Royaumes du Nord? Perso, j'ai toujours aimé lire, et je me souviens que ce bouquin, je m'y étais reprise à 2 ou 3 fois avant de réussir à le lire, et je devais avoir dans ces âges. Après, j'ai adoré, mais je me souviens que m'y mettre à genre 11-12 ans n'avait pas été aisé. Alors j'imagine même pas si on m'y avait forcée. Et puis c'est quand même un bouquin assez long si je me souviens bien; donc en exiger la lecture au cours de l'année scolaire, à des élèves dont les niveaux de compréhension et de vitesse de lecture vont grandement varier au sein du groupe, c'était un peu voué à l'échec dès le départ je pense.
Sinon parmi les questions cools des profs, je me souviens qu'on avait dû lire Ravage de Barjavel en 3e et la prof avait demandé ce qu'on pensait de la fin. J'avais écrit une page sur le sexisme du bouquin (avec mes mots hein, je savais pas trop comment m'exprimer) et que je pensais que l'auteur s'était planté sur ce que serait un monde apocalyptique, et que le héros était trop patriarcal et que tout ça m'avait bien gêné et j'avais eu 18/20 grâce à cette question. Pour moi, c'est ce genre de questions qui rendaient les cours de français intéressants, parce qu'on nous poussait à réfléchir et pas à apprendre le bouquin par coeur.
Idem, on avait fait un boulot sur Le Grand Meaulnes que j'avais bof aimé à la base mais on devait choisir un personnage et l'analyser à la maison (4e) et en fait, ça m'avait trop passionnée, et j'avais adoré le roman ensuite.
Parfois les profs nous donnaient aussi une liste de livres d'une période ou d'un genre et on devait en choisir un sur la liste, ce qui était un bon compromis entre "le prof nous impose un mouvement littéraire et une oeuvre qu'il a lu/on choisit ce qu'on préfère".
Mais ça me parait quand même nécessaire d'imposer des genres/mouvements littéraires, moi ça a été vraiment essentiel dans ma réflexion littéraire de bien comprendre les différentes tendances.
Ah et dernier point, le snobisme autour de la lecture me gonfle. Je lisais énormément petite, je n'avais pas de problème avec les lectures imposées, et puis depuis que j'ai quitté la fac je lis un ou deux livres par an. Je suis toujours dégoûtée quand je reçois un livre en cadeau car désormais ça me parait aussi personnel que le choix d'un sous-vêtement, je ne vois pas comment quelqu'un peut savoir ce que j'aurais envie de lire. La plupart des livres me lassent pour toutes sortes de raisons : personnage trop sexiste, personnage agaçant, intrigue qui ne va pas où je veux, ça n'avance pas assez vite, auteur qui s'écoute écrire etc. Je comprends très bien qu'un gamin puisse avoir autre chose à faire que de se plonger dans les histoires d'autres gens. Il faut le laisser découvrir seul ce qui l'intéresse.
Et aussi, pour le rapport aux livres et aux bibliothèques, je travaillais avec des gamins en difficulté scolaire à une époque. La bibliothèque du quartier hyper snob les détestaient quand je les y emmenais (mélange racisme/classisme/jeunisme je pense), ils passaient leur temps à leur dire de se taire (y compris quand c'était MOI qui parlait) alors j'ai changé de bibliothèque. Et dans cette bibli plus populaires, ils étaient absolument enchantés d'avoir les gosses dans leurs murs, ils les ont orienté vers les mangas et les magazines de foot, et je peux vous dire que ça a été une révélation pour ces gosses de savoir qu'ils pouvaient avoir des mangas et des magazines de foot "gratos" et petit à petit, ils ont regardé ailleurs, vers des trucs un peu différent, une fois yen a un qui a carrément emprunté la méthode Assimil sur le bambara parce que c'était la langue "d'un pote" et il voulait apprendre. Bon, je crois qu'il n'a pas vraiment fait plus que la leçon 1 mais pour moi c'était une merveilleuse étape qu'il puisse choisir d'apprendre les choses de son choix et lire les choses de son choix.