Je n'ai pas lu tous les commentaires, mais en survolant j'ai vu d'autres avis qui ressemblaient au mien. Donc je viens ajouter ma pierre à l'édifice. Je suis enseignante et je le confirme : ce spot terni vraiment l'image de l'enseignant. Elle écrit mal au tableau et si le public visé est un public de 7-11ans, son enseignant.e a la fameuse "écriture de maitresse". Il y a un bazar assez hallucinant dans la classe, elle ne se retourne jamais, ne fais pas attention à ses élèves, ne leur parle jamais, pointe avec sa règle, bref, ça ressemble à un sacré n'importe quoi.
Je suis en grande section, donc ce ne sont pas les 7 - 11 ans (ils ont 5 ans), mais le harcèlement commence à s'infiltrer gentiment (les enfants qui rigolent, qui montrent du doigt, qui disent que untel est un bébé) les humiliations existent déjà. Mais eh, évidemment, on s'en occupe. En tous cas, on fait ce qu'on peut.
@Clemence Bodoc tu passes ton temps à parler des victimes dans ton article et à fustiger le corps enseignant pour sa réaction, mais dis moi, où vois-tu les victimes dans ce spot ? Très honnêtement, j'ai plutôt l'impression qu'on met en exergue le fait que les adultes ne s'occupent pas des harcelés plutôt que le réel problème. Le problème est que, oui, le harcèlement est quelque chose d'insidieux qui prend des proportions qu'on n'imagine même pas et que, eh bien oui, ça peut arriver sans que l'enseignant s'en rende compte. Les situations de harcèlement dans les classes se font quand l'enseignant à le dos tourné (on a plein de compétences, mais les yeux derrières la tête, non.)
Quand l'enseignant le voit, il agit et parfois il n'agit pas, pas parce qu'il ne veut pas, mais parce qu'il ne se rend pas forcément compte de l'ampleur du harcèlement. C'est ce que vous, qui n'êtes pas enseignant, n'avez pas l'air de saisir. Un bon enseignant ne prendra aucun plaisir à avoir un élève mal dans sa classe. D'ailleurs, la majorité des conversations que j'ai avec mes collègues ressemblent à "X passe son temps à embêter Y, je suis sûre qu'il a besoin d'attention mais je ne vois pas comment faire + que ce que je fais aujourd'hui parce que j'ai quasiment 30 élèves dont je dois m'occuper" ou "Je vois bien que Z est malheureux et que quelque chose ne va pas mais il refuse de m'en parler, je n'arrive pas à savoir si c'est à l'école ou à la maison". Nous n'avons que très rarement des conversations qui sont à propos d'autre chose que nos élèves.
J'ai été harceleuse et je suis aujourd'hui enseignante. Peut être que j'apporte + d'attention au problème car je connais les mécanismes mais quoiqu'il arrive, il m'est arrivé de ne pas forcément réagir comme j'aurais dû le faire quand S. a embêté G. parce que je ne me rendais pas compte de l'ampleur de la chose. Je m'en suis rendue compte et j'agis en conséquence quand je suis là et quand je le vois... Ce qui n'est pas
tout le temps le cas. Et aussi, il faut aussi faire le tri entre le harcèlement, la violence ou les maladresses. Je suis sûre qu'on va me tomber dessus pour ça, mais je suis prête à l'expliquer cent fois. Les enfants viennent voir la maitresse pour tout un tas de choses parce qu'ils commencent à découvrir et à apprendre le fonctionnement de la vie en collectivité. Il faut parfois leur faire comprendre que quand X a donné une claque, il n'a pas fait exprès, c'est juste qu'il s'est étiré et qu'il n'a pas vu qu'il y avait son camarade derrière. Les miens, en tous cas, viennent me dire qu'ils ont été frappé alors que ce n'est pas fait exprès. Pour un enfant de 5 ans, en tous cas, il faut vraiment tout traduire (j'ai eu un problème avec une maman parce que son fils lui a dit que je lui avais dit "ferme ta bouche" alors que j'ai dit "et quand la maitresse parle, la bouche est fermée à clé". Les propos sont facilement déformés, les actes sont aussi transformés quand ils nous les racontent.)
Mais il faut aussi expliquer pourquoi il ne faut pas embêter ses camarades, pourquoi on ne se moque pas, pourquoi on ne rigole pas quand M. pleure quand son papa part le matin, pourquoi on ne pointe pas du doigt C. qui n'arrive pas à écrire en cursive la lettre a quand tout le monde y arrive ou quand O. n'arrive pas à terminer sa phrase et qu'il bégaie. ll faut expliquer aux harceleurs pourquoi il ne faut pas harceler et c'est aussi une tâche très compliquée, il y a un back ground qu'on ne peut pas négliger : comment est l'enfant à la maison ? Est-ce qu'il est dans un climat violent ? Pourquoi est il du côté des harceleurs ? Les parents ne sont pas toujours prêts à aider l'enseignant sur ce point là. Comment expliquer à S. qu'il ne faut pas harceler, frapper, se moquer quand, à la maison, son grand frère se moque d'elle et que sa maman ne dit rien ?
Dans ce spot, le seul moment où on montre vraiment la victime c'est à la fin, quand la petite fille va dire au petit gars "tu peux m'en parler il faut que ça s'arrête" eh bah oui, enfin on parle de la victime !! Moi, je ne vois pas la victime, je vois simplement une classe en plein chaos avec une enseignante débordée qui ne sait pas écrire. J'ai du mal à saisir à quel moment vous pouvez, vous, le prendre au sérieux.
Le spot est bien trop brouillon pour être compris correctement. En tous cas, le message qu'il essaye de faire passer ne me parle absolument pas. Si le but c'est de montrer qu'il y a d'autres alternatives que les adultes, alors pourquoi montrer automatiquement des adultes qui s'en fichent ? Si le but est de montrer la réalité du harcèlement, pourquoi montrer la situation de harcèlement en pleine salle de classe ? Pourquoi personne ne montre qu'il ne faut pas harceler ? C'est ça que j'ai du mal à comprendre, on en arrive à vouloir régler le problème sans jamais aller le prendre à la racine.