Je crois que ce qui me dérange dans les deux cas, c'est:
1. La culpabilisation d'une classe, qui passerait pas une "fausse" responsabilisation. Par exemple, sur la "société de consommation", la soit-disant grande coupable. Les gens qui se ruent sur le nutella et compagnie sont vus comme des purs consommateurs, dont la seule envie serait (comme j'ai pu le lire) de se bourrer d'huile de palme sans vraiment réfléchir. Sauf que, à l'inverse, pourquoi les dominantes (on peut y inclure la classe bourgeoise), n'entrerait pas dans cette catégorie ? Ca voudrait dire que les classes dominées, plus modestes, consommeraient à tort et à travers, tandis que les classes supérieures, "achèteraient" ? C'est la première chose qui me dérange. Je ne crois pas que la majorité des gens aient voulu des gros hypermarchés à une certaine période. Ca se remarque notamment dans d'autres pays, anciennement sous le régime communiste. En ex-RDA, lorsque le régime soviétique s'est effondré, les nombreuses mesures capitalistes mises en place sous le joug de la "consommation nouvelle" ont largement été imposées. Les produits n'étaient pas exigés par la population. D'ailleurs, la plupart des gens étaient en recherche constante des anciens produits typiques. On en revient à la question de l'offre et de la demande. A mon sens, dans la logique capitaliste, c'est l'offre qui fait exister la demande, et l'inverse. Le livre d'Annie Ernaux, Regarde les lumières mon amour, montre bien ça. Ce n'est pas une analyse sociologique, mais ce court essai-roman d'observation insiste sur le fait que aller faire ses courses dans un grand centre commercial lorsque l'on vient d'un milieu modeste, voire, prolétaire, est directement relié à une logique offre > demande.
2. D'un autre côté (et c'est un peu paradoxal), enlever la responsabilité individuelle, ça peut être dangereux. Je ne parle pas de celleux qui se voient obligé.e.s de consommer tel ou tel produit. Par exemple, si quelqu'un habite à la campagne, c'est normal qu'iel fasse des stocks (en temps normal). Donc pas de quoi rager. En revanche, si la personne habite dans une zone urbaine et est habituée à faire des petites courses de temps en temps, ça m'énerverait qu'elle fasse des stocks pas possibles pour ne rien laisser aux autres (ce que l'on a pu voir au début du confinement). Mais encore une fois, pas de quoi blâmer !
Là où l'on pourrait dénouer le paradoxe, c'est en revenant à la première idée: arrêter de blâmer un groupe en faisant appel à ce que je trouve vraiment dégradant "la société de consommation", "les consommateurs" / et tenter de se poser la question de la responsabilité. Existe-t-elle vraiment à l'échelle individuelle, lorsque que l'on sait que personne n'est à égalité dans ce domaine ? Il y a plus de dominés que de dominants. Donc même si les dominés "achètent" moins, il n'en reste pas moins que, à tort, on accusera les pauvres de "plus" consommer (parce qu'iels sont plus nombreux.ses). En fait, ça serait comme dire "tu n'as que ce que tu as voulu, c'est ta classe, c'est tout".
Concernant ZARA, je ne connais pas assez la marque et surtout, les prix. J'ai été assez énervée en voyant les images, comme pour celles montrées de Paris (Canal et Saint-Martin). Mais dans les deux cas, j'ai été encore plus énervée face aux généralisations liées à une classe ou à un âge ("bouh les jeunes ne respectent rien", "bouh les consommateurs"). Bien sûr que j'ai envie de rager quand je sais que Amazon a fait un bénéfice de malade pendant le confinement. Mais à quoi bon accuser bêtement les gens qui courent dans les rayons à chercher les promotions ?
Pour éviter les généralisations sur ZARA, et ça a été fait dans des posts, il faudrait poser la question de l'achat type, c'est-à-dire, les vêtements et la fast-fashion (qui n'est pas la responsabilité première des acheteurs, mais bien celles des producteurs, donc des dominants). Mais il ne faut aussi pas oublier les rapports de classes et les relations individuelles qu'entretiennent ce personnes avec leur milieu puis, avec leurs envies/besoins, etc. Ex: "s'affranchir" de ce type de "consommation", c'est aussi pouvoir avoir l'accès à un privilège. Les vêtements en frips coûtent moins cher. Mais l'accès à ce savoir ne concerne pas tout le monde.