« Sfar, c'est arabe ? », la peur et le pouvoir du dialogue contre les préjugés, un texte touchant et nécessaire de Joann Sfar

Kettricken

Hate is always foolish. Love is always wise
13 Avril 2011
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Mais... je suis peut-être trop sceptique mais quand même, je suis la seule à me dire que c'est un dialogue imaginaire, ou à tout le moins très très brodé ? Parce que pratiquement parlant, je ne vois même pas comment Sfar pourrait se souvenir d'une conversation complète comme ça. Moi je pensais que c'était une sorte de fable, ou qu'au mieux, il avait échangé trois mots avec son chauffeur de taxi, s'était rendu compte qu'un dialogue était possible et avait brodé le reste.

Sinon, c'est totalement anecdotique et subjectif, mais la manière dont et Sfar et le chauffeur disent "Monsieur" à chaque phrase me fait ressentir une hostilité latente dans ce dialogue qui me déconcerte vu que la morale de l'histoire est celle de l'ouverture au dialogue
 
3 Avril 2008
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Paris
@Clemence Bodoc
Ainsi qu'à d'autres qui seraient dans le même état d'esprit, c'est à dire déçus voir en colère contre l'article que Mona Chollet a retweeté, et dans une mesure plus large, dans l'incompréhension face à ceux qui n'encensent pas le post de Sfar.

Alors, personnellement, je trouve qu'il y a un mépris de classe, et également un certain mépris de la religion.

Pour ce qui est de la religion, Sfar dépeint (mais BIEN SÛR sans employer des termes si radicaux et peut-être sans l'intention de le faire) le religieux pas dérangeant, occidentalisé, qu'on aime bien voir et qui ne nous pose pas de problème "quand mon chauffeur est sympa et souriant et vêtu comme moi, c’est à dire blouson ou veste et barbe pas trop longue, je m’autorise à dire que je suis juif."
Il oppose cet archétype, un autre, celui qu'il qualifie lui même d'avoir "une dégaine vraiment pas commode". Pour quelles raisons ? Parce qu'il porte des signes extérieurs de sa religion "longue barbe, sourcils froncés, calot blanc et stigmates bleus sur le front", passons la remarque à peine cynique "stigmates bleus sur le front" ...
On peut se dire, comme je l'ai lu plus haut : Mais, oui, c'est le début de l'article où il montre ses préjugés, pour justement bien l'opposer à la fin de l'article, ou le chauffeur se révèle finalement ouvert.
Alors, je n'aime pas vraiment qu'on laisse libre cours aux interprétations, au sens implicite du texte, car à la fin, aucun mot de Sfar pour revenir sur sa méprise de l'apparence, pour avertir que ce qui gangrène la France aujourd'hui c'est aussi ce rejet d'une religion (ici musulmane, donc principale victime d'oppressions et de violences actuellement) "trop" affichée.

En ce qui concerne le mépris de classe, même sans l'intention de l'amener, il est bien là.
Un Sfar, dessinateur, scénariste, qui prend souvent le taxi et a des amis connus et reconnus; qui résume des conflits, des idées, qui amène un regard neutre et nuancé à un chauffeur de taxi qui doit certainement passer le plus clair de son temps dans son taxi, à travailler pour tenter de survivre. Une personne qui n'a pas le privilège d'avoir du temps libre pour s'informer, confronter les sources, faire de brillantes rencontres et j'en passe.
Car, non, ce texte ne va pas changer le regard de la société sur les chauffeurs de taxi, les personnes moins aisées que Sfar. Il ne montre pas que le chauffeur a lui-même de la répartie et a creusé le sujet, que Sfar ne détient pas le monopole de la pensée.
Le texte se contente de nous présenter le chauffeur comme remettant (probablement) en question les élucubrations de ses connaissances, et riant. On nous montre : vous voyez, l'Autre n'est pas forcément agressif, et il peut même remettre en question ses idées !
Mais on ne nous dit pas : lui aussi a été capable de m'apporter quelque chose.

Conclusion et passerelle féministe, pour celles et ceux que ça pourrait aiguiller :
Ici, pour moi, et même s'il n'en a pas l'intention, Joann Sfar est la personne aisée et cultivée (donc en position de dominant) qui explique les grandes idées et la nuance à un homme de classe populaire (en position d'oppressé).

Tout comme l'on s'énerverait si un homme, personnage principal d'un tel récit, expliquait tout et aurait amené son avis éclairé et nécessaire à une femme qui semblerait vaguement comprendre.
Peut-être, et même surement, que Sfar (ou l'homme de l'exemple) ne le fait pas par simple volonté d'asseoir sa domination ou d'écraser le chauffeur de taxi (ou la femme de l'exemple).

Mais son message rendu public contribue à faire perdurer cette image, ces constructions sociales intrinsèquement logées dans la tête des gens.
Le dominant (ici par sa classe sociale et ses idées anti-religieuses) garde sa position de force. La personne qui subit l'oppression systémique (liée à sa religion et sa classe sociale, en l'occurence) n'a pas vraiment la parole. Ce n'est pas une bonne chose.
 
13 Mai 2012
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@lafillelabas je ne suis pas juive et je ne sais pas du tout ce que c'est que d'être juif. Je trouve par contre que dire que les musulman-e-s sont antisémites est dangereux, oui. Et je trouve dangereux de faire des généralités sur des millions de personnes à partir d'expériences personnelles. Du reste je ne le reproche pas à Sfar, mais je trouve ça bizarre dans ce texte, dans le contexte actuel aussi. Est-ce que parce qu'on a été victime d'attaques antisémites de la part de musulman-e-s on peut généraliser ? C'est un peu ça ma question en fait. Je ne détiens pas la vérité sur ce sujet.

Et je suis tout à fait désolée de l'antisémitisme que tu as vécu et que tu continues de vivre.

Ce n'est pas dangereux, c'est simplement faux, tous les musulmans ne sont pas antisémites. Mais c'est une question de survie que d'apprendre à se cacher tant qu'on n'est pas sûr de qui on en face. Genre tout le monde n'est pas transphobe, mais une fille trans ne va pas forcément être encline à se outer si elle sent que la personne en face paraît être du genre catho extrémiste.

L'auteur juge au faciès, oui, mais franchement ça ne blesse personne de laisser croire qu'il est arabe, et si lui ou d'autres estiment que c'est ce qu'il y a à faire pour sa propre sécurité, rien ne s'y oppose.

Oui ça ouvre la porte aux dérives. Mais tu peux pas vraiment en vouloir aux Juifs de faire attention. Et on est conscients que ce n'est pas l'idéal. Si tu as une solution qui n'implique ni de passer son temps à se cacher, ni de juger au faciès, ni de se mettre en danger, ça pourrait être utile.
 
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Réactions : Eclise

Clemence Bodoc

Persistante
21 Juillet 2010
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@Clemence Bodoc
Ainsi qu'à d'autres qui seraient dans le même état d'esprit, c'est à dire déçus voir en colère contre l'article que Mona Chollet a retweeté, et dans une mesure plus large, dans l'incompréhension face à ceux qui n'encensent pas le post de Sfar.

Alors, personnellement, je trouve qu'il y a un mépris de classe, et également un certain mépris de la religion.

Pour ce qui est de la religion, Sfar dépeint (mais BIEN SÛR sans employer des termes si radicaux et peut-être sans l'intention de le faire) le religieux pas dérangeant, occidentalisé, qu'on aime bien voir et qui ne nous pose pas de problème "quand mon chauffeur est sympa et souriant et vêtu comme moi, c’est à dire blouson ou veste et barbe pas trop longue, je m’autorise à dire que je suis juif."
Il oppose cet archétype, un autre, celui qu'il qualifie lui même d'avoir "une dégaine vraiment pas commode". Pour quelles raisons ? Parce qu'il porte des signes extérieurs de sa religion "longue barbe, sourcils froncés, calot blanc et stigmates bleus sur le front", passons la remarque à peine cynique "stigmates bleus sur le front" ...
On peut se dire, comme je l'ai lu plus haut : Mais, oui, c'est le début de l'article où il montre ses préjugés, pour justement bien l'opposer à la fin de l'article, ou le chauffeur se révèle finalement ouvert.
Alors, je n'aime pas vraiment qu'on laisse libre cours aux interprétations, au sens implicite du texte, car à la fin, aucun mot de Sfar pour revenir sur sa méprise de l'apparence, pour avertir que ce qui gangrène la France aujourd'hui c'est aussi ce rejet d'une religion (ici musulmane, donc principale victime d'oppressions et de violences actuellement) "trop" affichée.

En ce qui concerne le mépris de classe, même sans l'intention de l'amener, il est bien là.
Un Sfar, dessinateur, scénariste, qui prend souvent le taxi et a des amis connus et reconnus; qui résume des conflits, des idées, qui amène un regard neutre et nuancé à un chauffeur de taxi qui doit certainement passer le plus clair de son temps dans son taxi, à travailler pour tenter de survivre. Une personne qui n'a pas le privilège d'avoir du temps libre pour s'informer, confronter les sources, faire de brillantes rencontres et j'en passe.
Car, non, ce texte ne va pas changer le regard de la société sur les chauffeurs de taxi, les personnes moins aisées que Sfar. Il ne montre pas que le chauffeur a lui-même de la répartie et a creusé le sujet, que Sfar ne détient pas le monopole de la pensée.
Le texte se contente de nous présenter le chauffeur comme remettant (probablement) en question les élucubrations de ses connaissances, et riant. On nous montre : vous voyez, l'Autre n'est pas forcément agressif, et il peut même remettre en question ses idées !
Mais on ne nous dit pas : lui aussi a été capable de m'apporter quelque chose.

Conclusion et passerelle féministe, pour celles et ceux que ça pourrait aiguiller :
Ici, pour moi, et même s'il n'en a pas l'intention, Joann Sfar est la personne aisée et cultivée (donc en position de dominant) qui explique les grandes idées et la nuance à un homme de classe populaire (en position d'oppressé).

Tout comme l'on s'énerverait si un homme, personnage principal d'un tel récit, expliquait tout et aurait amené son avis éclairé et nécessaire à une femme qui semblerait vaguement comprendre.
Peut-être, et même surement, que Sfar (ou l'homme de l'exemple) ne le fait pas par simple volonté d'asseoir sa domination ou d'écraser le chauffeur de taxi (ou la femme de l'exemple).

Mais son message rendu public contribue à faire perdurer cette image, ces constructions sociales intrinsèquement logées dans la tête des gens.
Le dominant (ici par sa classe sociale et ses idées anti-religieuses) garde sa position de force. La personne qui subit l'oppression systémique (liée à sa religion et sa classe sociale, en l'occurence) n'a pas vraiment la parole. Ce n'est pas une bonne chose.

En fait, tout ton commentaire part d'un angle d'analyse "dominant-dominé". Mais pourquoi s'enfermer dans ce cadre ? Moi je vois justement une lecture dans ce sens : ça commence par un cadre dominant/dominé ("instruit" vs "pas instruit", pour caricaturer), et ça évolue vers "en fait on est 2 êtres humains, qui dialoguent". Et non, t'as pas changé le monde en sortant du taxi. Mais t'as échangé avec un autre être humain, t'as eu un dialogue dans lequel on n'avait pas "un dominant-donneur-de-leçons" et "un dominé".

Après, je voulais réagir sur un 2ème point (mais ça aurait plutôt sa place sur un autre topic je pense...) Je ne partage pas les critiques envers le mépris de Sfar pour les signes religieux. Moi non plus, je n'aime pas les signes religieux ostentatoires. Et ce n'est pas envers une religion en particulier : je respecte totalement le droit de chacun à croire en ce qu'il veut, pas de souci. Moi, je ne crois pas en Dieu (aucun), et ça me met mal à l'aise d'être confrontée à des gens très religieux. (J'ai ptet + de préjugés vis-à-vis des cathos extrémistes, vu que je préjuge de leur religion à leur look "catho de droite", alors que le port du voile me dérange moins, je sais que c'est pas nécessairement lié à une pratique "extrême" de la religion).

Si j'engage une discussion avec la personne, en général, j'abandonne très vite mes préjugés (sauf si la conversation porte sur la religion, haha!), mais c'est sûr que je vais rarement spontanément vers une personne qui porte des signes religieux ostentatoires. En même temps, C'EST ostentatoire justement, donc difficile pour moi de passer outre à première vue....

Je pense que je ne suis pas claire, j'essaie juste d'expliquer en quoi juger les gens sur leur apparence, c'est mal, mais quand les gens choisissent d'envoyer sciemment un message par leur apparence ("ceci est ma religion"), bah... Je les respecte, évidemment (je garde mes opinions pour moi aussi), mais je vais pas non plus spontanément faire un pas vers eux.

Ce que cette tribune de Sfar m'inspire, c'est justement de passer outre cette "appréhension" (c'est un peu fort, c'est juste un manque d'intérêt en vrai), pour m'inciter à ouvrir le dialogue.
 
1 Décembre 2015
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Les "stigmates bleus sur le front", ce sont pas des tatouages ?

En même temps, j'ai tapé "stigmates bleus visage" dans Google, et le deuxième lien (le premier étant le récit de Sfar), c'est ça :
https://islamqa.info/fr/6834
On en apprend tous les jours (j'ai jamais vu quelqu'un avec des marques comme ça sur le front, pourtant des musulman-e-s j'en connais.
 
15 Juin 2015
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Je ne partage pas les critiques envers le mépris de Sfar pour les signes religieux. Moi non plus, je n'aime pas les signes religieux ostentatoires. Et ce n'est pas envers une religion en particulier : je respecte totalement le droit de chacun à croire en ce qu'il veut, pas de souci. Moi, je ne crois pas en Dieu (aucun), et ça me met mal à l'aise d'être confrontée à des gens très religieux.
Je pense que ça peut être assez violent de lire ça quand on est croyant-e. D'une part parce que le terme "signe religieux ostentatoire" a une histoire récente, il me semble, avec l'utilisation de la laïcité pour exclure les jeunes femmes voilées des collèges, lycées, et récemment en discussion pour les exclure des universités.

Et d'autre part, parce que la notion d'ostentatoire (" Qui est fait avec ostentation, mis en valeur de façon excessive. ") me semble relever du procès d'intention et de l'arbitraire, plus que d'éléments rationnels, mesurables, quantifiables. Je me souviens très bien avoir entendu mes beaux-parents dire, à propos de l'homosexualité par exemple, "nous on a pas de problème avec les homos, juste on aime pas les voir s'embrasser dans la rue", alors qu'ils n'ont aucun souci à voir des couples hétéros s'embrasser. Dans les collèges et lycée, une khamsa (main de Fatima) en pendentif est un signe ostentatoire, lorsqu'une gourmette ne l'est pas. Une longe jupe noir sur une jeune femme blanche n'est pas un signe ostentatoire, quand la même jupe sur une femme avec un type physique arabe devient un signe ostentatoire.

sarah-jupe-longue-coll%C3%A8ge.jpg


Qui peut par ailleurs prétendre savoir quelle est l'intention derrière un choix de vêtements, de look, de coiffure. Est-ce que mon ami Bobby-Bob porte la barbe longue parce que c'est un hipster ou parce que c'est sa façon d'exprimer sa religion, ou juste parce qu'il trouve que c'est cool comme look ? Est-ce que lorsqu'on porte une jupe c'est pour montrer ses jambes, parce qu'on y est forcé-e, parce qu'il fait chaud ou parce qu'on se trouve joli-e avec ? Est-ce que si je porte une croix autour du coup c'est pour le clamer au monde, parce que j'aime l'esthétique, parce que c'est ma culture ou parce que ça correspond à ma façon de vivre ma religion ? C'est important parce que c'est sur ce seul élément que repose toute la formule "signes religieux ostentatoires" : fait dans l'intention de montrer, de mettre en valeur de façon excessive. Et en ça je trouve ça d'ailleurs contradictoire avec la notion de "toujours prêter de bonnes intentions aux gens".

Au final il me semble qu'il y a un détournement de cette notion d'ostentatoire et un retournement de son sens. Ce qui est ostentatoire n'est plus ce qui est montré avec excès, mais ce que l'observateurice considère comme excessif par rapport à ses propres valeurs. La notion ne recouvre plus "ce qui est présenté, mis en valeur de façon excessive", mais "ce que je vois, ce que je reçois comme excessif par rapport à mes normes". On renverse le sens et on ouvre la voie aux préjugés et aux stéréotypes.

(edit) d'ailleurs je retrouve ce renversement de perception très souvent quand je dis que je suis végane aux gens. J'ai beau ne faire que répondre à leurs questions, ne pas amener le sujet moi-même, on va toujours finir par me reprocher de faire la morale aux autres, de vouloir les convertir, d'afficher de façon trop violente mes choix de vie. Je n'ose même pas imaginer ce qu'est la vie de personnes dont c'est la religion, l'intime, qui est remis en question systématiquement dans les médias, dans la rue, dans la société, à nouveau sans qu'il y ait jamais eu volonté ou intention, de faire la morale, convertir, ou afficher de façon violente.
 
Dernière édition :
21 Janvier 2013
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En fait, tout ton commentaire part d'un angle d'analyse "dominant-dominé". Mais pourquoi s'enfermer dans ce cadre ? Moi je vois justement une lecture dans ce sens : ça commence par un cadre dominant/dominé ("instruit" vs "pas instruit", pour caricaturer), et ça évolue vers "en fait on est 2 êtres humains, qui dialoguent". Et non, t'as pas changé le monde en sortant du taxi. Mais t'as échangé avec un autre être humain, t'as eu un dialogue dans lequel on n'avait pas "un dominant-donneur-de-leçons" et "un dominé".

Après, je voulais réagir sur un 2ème point (mais ça aurait plutôt sa place sur un autre topic je pense...) Je ne partage pas les critiques envers le mépris de Sfar pour les signes religieux. Moi non plus, je n'aime pas les signes religieux ostentatoires. Et ce n'est pas envers une religion en particulier : je respecte totalement le droit de chacun à croire en ce qu'il veut, pas de souci. Moi, je ne crois pas en Dieu (aucun), et ça me met mal à l'aise d'être confrontée à des gens très religieux. (J'ai ptet + de préjugés vis-à-vis des cathos extrémistes, vu que je préjuge de leur religion à leur look "catho de droite", alors que le port du voile me dérange moins, je sais que c'est pas nécessairement lié à une pratique "extrême" de la religion).

Si j'engage une discussion avec la personne, en général, j'abandonne très vite mes préjugés (sauf si la conversation porte sur la religion, haha!), mais c'est sûr que je vais rarement spontanément vers une personne qui porte des signes religieux ostentatoires. En même temps, C'EST ostentatoire justement, donc difficile pour moi de passer outre à première vue....

Je pense que je ne suis pas claire, j'essaie juste d'expliquer en quoi juger les gens sur leur apparence, c'est mal, mais quand les gens choisissent d'envoyer sciemment un message par leur apparence ("ceci est ma religion"), bah... Je les respecte, évidemment (je garde mes opinions pour moi aussi), mais je vais pas non plus spontanément faire un pas vers eux.

Ce que cette tribune de Sfar m'inspire, c'est justement de passer outre cette "appréhension" (c'est un peu fort, c'est juste un manque d'intérêt en vrai), pour m'inciter à ouvrir le dialogue.
Mais en fait le fait de le voir sous le prisme du dominant / dominé ça vient du fait que c'est, à la base, juste un statut (et je pense que son réalisme laisse à désirer), posté par quelqu'un de lambda sur un réseau social horizontal (à priori), mais tout ce contexte d'horizontalité il est modifié par le fait que ce statut est choisi par des rédacteurs, publié avec un rappel sur qui est Sfar, quelle est sa position dans la société, sélectionné parce qu'il est censé être pertinent, parlant, qu'il est censé véhiculer un certain message.
Et d'un coup, on passe d'un dialogue entre deux couillons dans un taxi à un dialogue entre Sfar (connu pour ses oeuvres, connu pour sa position de Juif qui a fait le Chat du Rabbin, qui montre qu'il a bon coeur) qui nous explique que si ce texte est important c'est parce que pour une fois, il a décidé de parler plutôt que de se soumettre aux préjugés. Et ce que dit Sfar (parce qu'en fait, on ne s'intéresse qu'à ce qu'il dit lui, ici, pas vraiment à ce que dit l'autre homme dont on ne connait rien, sauf qu'il ressemble à un musulman) est pris comme si ça devait avoir une certaine autorité sur notre façon de penser. Ca donne une légitimité à sa parole, ça implique que quelque part, c'est un peu comme ça qu'on devrait penser.

La question c'est de savoir si vous recevriez le texte de la même manière si on enlevait le contexte (le nom de Sfar, ce qu'on sait de lui, sa position sociale) et qu'on enlevait la partie du texte qui nous explique que d'habitude, il se tait, mais que là, il parle. Peut-être qu'en occultant tout ça, vous verriez les choses différemment. Nous, "lectrices", ce qu'on reçoit, c'est non seulement ce contexte, mais auquel on ajoute le contexte de la "légitimation" de la parole de Sfar par le fait qu'il est relayé par les médias (contexte qui vous concerne vous en premier lieu, donc c'est normal que nous, qui sommes extérieur à ça, ayons une vision différente).

Et je ne crois pas que ce soit une manière de refuser le débat... Au contraire, réagir comme nous le faisons, en s'interrogeant face à un discours qu'on nous montre comme "plus légitime" qu'un autre (puisqu'on choisi d'en parler), finalement, ça nous met bien plus dans une démarche de débat que ne l'est Sfar dans son presque-monologue. Mais c'est pas grave, en soit, qu'on ne soit pas enthousiaste, je pense...
 
Dernière édition :
11 Janvier 2016
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Tu es juive? Parce que si oui, tu as soit eu le privilège de ne jamais quitter les beaux quartiers, soit tu as un excellent passing. Perso là où j'ai grandi les enfants qui n'allaient pas en école juive se prenaient des remarques mauvaises et une des seules fois où, petite, j'ai laissé échapper à l'aire de jeux que j'étais juive, je me suis faite insulter et lancer du sable. À part chez ma nounou (qui a du démissionner quand j'avais dix ans parce que son mari ne voulait plus qu'elle travaille pour des Juifs) j'ai toujours senti une hostilité de la part des Arabes musulmans que j'ai rencontrés. Désolés si après ça certains deviennent méfiants, mais si tu n'as pas vécu ça c'est un peu mal venu de le leur reprocher, et si tu l'as vécu bah bravo pour ton manque de préjugés.

J'ai deux remarques à propos de ce commentaire. Désolée si je parais sèche, ça n'est pas mon intention.
Je ne vois pas en quoi c'est pertinent de demander à une personne si elle est juive, comme pour lui donner le droit de s'exprimer sur le sujet. Aurait-elle été juive, son point de vue serait-il moins pertinent ?
Après, dire que tu sens de l'hostilité de la part des "Arabes musulmans" et que c'est une justification pour devenir méfiant... Non, je ne suis pas d'accord. Et je sais de quoi je parle, le racisme je le vis depuis toujours pour tout et n'importe quoi, de remarques pseudo-banales voire valorisantes aux idéologies les plus extrêmes. Et pourtant. Et pourtant je refuse de devenir méfiante envers une seule catégorie de personnes que je vais à mon tour stigmatiser. J'espère que tu réussiras à voir que les Arabes musulmans ou autres ne sont pas hostiles de facto, mais que nous vivons tous dans un maillage de constructions plus ou moins racistes, et que c'est dommage d'y ajouter le nôtre... A la méfiance, je préfère l'éducation. Victime du racisme, je ne tiens pas à en devenir le bourreau...
 
13 Mai 2012
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@Dorri Eclise avait l'air de s'étonner, d'une part, qu'un juif puisse préférer se faire passer pour un musulman devant quelqu'un qu'il pense être musulman, et, d'autre part, que le même juif parte du principe que le musulman pourrait être antisémite/antisionniste et préfère donc garder profil bas. Au mieux elle était non juive et j'aurais mis ça sur le compte de l'ignorance, au pire elle était juive et sous couvert qu'elle n'avait jamais vécu l'antisémitisme ou fermait les yeux dessus elle se permettait de critiquer ce genre de "techniques de survie" avec une absence totale d'empathie. C'est cool que ça ne soit pas le cas.

Est-ce que l'avis d'un juif sur la légitimité de ce genre d'esquive est plus pertinent que celui qui sait qu'il n'aura jamais rien à craindre de ce côté là? C'est un autre débat.

Quand on dit qu'être méfiant c'est pas bien, de quel degré de méfiance on parle et dans quel contexte? En ce qui me concerne, je sais que tous les hommes ne sont pas des violeurs, mais ça ne m'empêche pas de changer de trottoir la nuit si le mec derrière moi m'a l'air un peu trop balèze ou louche. J'ai pas l'impression de devenir un "bourreau" pour ce type.

Et oui, merci, je me doute bien que tous les non-juifs (on parlait des musulmans mais dans mon cas c'est de tous les non juifs que j'ai tendance à me méfier) ne sont pas antisémites/antisionnismes. Mais par sécurité, mieux vaut partir du principe qu'on a un antisémite/antisionniste devant nous que de se prendre une diatribe dans la face, au mieux.

C'est bien d'être arrivée à faire abstraction des dangers que tu peux courir à assumer ton identité en milieux hostile. J'espère que tu arriveras à éduquer les gens pour les rendre meilleurs. Mais ne t'y sens pas obligée, c'est pas à toi de faire tout ça.
 
5 Juillet 2011
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Paris
J'suis d'accord que le présupposé de départ c'est "moi, homme cultivé, qui a tout compris et qui sait en plus me remettre en question", mais justement, il évolue de cette position, quand il arrête en fait de mépriser l'autre en fonction de ses propres préjugés.
Je vois pas trop l’évolution à vrai dire. Sfar dans le dialogue reste celui qui fait des phrases longues. complètes, qui développe et défend ses idées. Le taxi ne finit pas ses phrases, sa grammaire est simplifiée et il reste au niveau d'anecdotes personnelles. Il n'apprend rien à Sfar, il le rassure juste parce qu'il aime pas les méchants (syndrome petit journal), mais surtout parce qu'il se met à rire (?), et que c'est un miracle (?). C'est évident que le dialogue est romancé et reconstruit, et pour moi, même si je ne doute ni de la sincérité de Sfar ni des vertus du dialogue, cette reconstruction est un peu problématique et donne à Sfar le rôle de celui qui éclaire et instruit l'autre. J'y ressens (un peu) de mépris, ou plutôt de suffisance, qui sans doute relève simplement de la maladresse. Mais encore une fois, c'est pour moi un simple ressenti et tant mieux si le texte touche les gens et les encourage à parler avec leurs chauffeurs de taxis!
 
1 Décembre 2015
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antisémites/antisionnismes
Je trouve ça quelque peu étrange (litote !) de mettre sur le même plan l'antisémitisme, qui est le racisme dirigé contre les Juifs/Juives, et l'antisionisme, qui est une position politique s'opposant à une autre position politique.

Ce serait un peu comme mettre sur le même plan la haine des Français et l'opposition au Front National quoi...


(Et me voilà donc entrée malgré moi dans le clan des antisémites !)

Et quid des Juifs/ves antisionistes alors ? Dédoublement de personnalité ? Haine de soi ? Ou simple réflexion politique ?
 
  • Big up !
Réactions : Ez Kurdim
13 Mai 2012
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@Suze Araignée déjà il faut savoir que bien souvent les antisémites se disent antisionnistes, car l'un est réprimé par la loi et l'autre non. C'est d'ailleurs assez marrant lorsqu'ils font le lapsus entre juifs et sionistes parfois sans s'en rendre compte.

L'antisionnisme, c'est la conviction que les Juifs devraient rester à l'état d'exilés perpétuels. L'état d'Israël est un fait établi mais certains se raccrochent à l'espoir malsain que les arabes se liguent contre nous, ou que l'ONU nous foute dehors, et j'en passe.

Congratulations! On te prépare une petite soirée d'intronisation à l'antisémitisme?

Pour ce qui est des juifs antisionnistes: soit ce sont des juifs de gauche, entourés par (ou voulant s'intégrer à) des gens pour qui l'antisionnisme et la cause pro-palestinnienne vont quasiment de soi et qui ne veulent pas se faire mal voir (surtout que leurs amis Gentils les ont en général à l'oeil au cas où ils ne se desolidariseraient pas d'Israël toutes les 20 minutes à peu près) (je grossis volontairement le trait mais ça saute souvent aux yeux ce genre de syndrome de Stockholm);

Soit on va chercher du côté des Netourei Karta: on va du côté du débat religieux et je trouverais ça malhonnête de t'accabler d'arguments dans un domaine que tu as peu de chances des connaître; disons en très bref que leurs raisons ont été réfutées par de plus grands qu'eux, et que leurs méthodes sont à même de faire douter de leur amour pour leurs frères juifs. Je pense qu'ils sont un peu masos sur les bords aussi mais ça c'est une conviction personnelle.

Après, si des juifs reprouvent les méthodes de Tsahal, les décisions de Bibi, ou le taux de sucre dans le kougel yeroushalmi j'appelle pas ça être antisionniste, tant que c'est fait pour faire avancer le débat et trouver des solutions ensemble, et pas pour casser du sucre sur le dos de son peuple (yen a déjà bien assez comme ça dans le kougel >_> )
 
  • Big up !
Réactions : Eclise et Lamina

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