@Clemence Bodoc
Ainsi qu'à d'autres qui seraient dans le même état d'esprit, c'est à dire déçus voir en colère contre l'article que Mona Chollet a retweeté, et dans une mesure plus large, dans l'incompréhension face à ceux qui n'encensent pas le post de Sfar.
Alors, personnellement, je trouve qu'il y a un mépris de classe, et également un certain mépris de la religion.
Pour ce qui est de la religion, Sfar dépeint (mais BIEN SÛR sans employer des termes si radicaux et peut-être sans l'intention de le faire) le religieux pas dérangeant, occidentalisé, qu'on aime bien voir et qui ne nous pose pas de problème "quand mon chauffeur est sympa et souriant et vêtu comme moi, c’est à dire blouson ou veste et barbe pas trop longue, je m’autorise à dire que je suis juif."
Il oppose cet archétype, un autre, celui qu'il qualifie lui même d'avoir "une dégaine vraiment pas commode". Pour quelles raisons ? Parce qu'il porte des signes extérieurs de sa religion "longue barbe, sourcils froncés, calot blanc et stigmates bleus sur le front", passons la remarque à peine cynique "stigmates bleus sur le front" ...
On peut se dire, comme je l'ai lu plus haut : Mais, oui, c'est le début de l'article où il montre ses préjugés, pour justement bien l'opposer à la fin de l'article, ou le chauffeur se révèle finalement ouvert.
Alors, je n'aime pas vraiment qu'on laisse libre cours aux interprétations, au sens implicite du texte, car à la fin, aucun mot de Sfar pour revenir sur sa méprise de l'apparence, pour avertir que ce qui gangrène la France aujourd'hui c'est aussi ce rejet d'une religion (ici musulmane, donc principale victime d'oppressions et de violences actuellement) "trop" affichée.
En ce qui concerne le mépris de classe, même sans l'intention de l'amener, il est bien là.
Un Sfar, dessinateur, scénariste, qui prend souvent le taxi et a des amis connus et reconnus; qui résume des conflits, des idées, qui amène un regard neutre et nuancé à un chauffeur de taxi qui doit certainement passer le plus clair de son temps dans son taxi, à travailler pour tenter de survivre. Une personne qui n'a pas le privilège d'avoir du temps libre pour s'informer, confronter les sources, faire de brillantes rencontres et j'en passe.
Car, non, ce texte ne va pas changer le regard de la société sur les chauffeurs de taxi, les personnes moins aisées que Sfar. Il ne montre pas que le chauffeur a lui-même de la répartie et a creusé le sujet, que Sfar ne détient pas le monopole de la pensée.
Le texte se contente de nous présenter le chauffeur comme remettant (probablement) en question les élucubrations de ses connaissances, et riant. On nous montre : vous voyez, l'Autre n'est pas forcément agressif, et il peut même remettre en question ses idées !
Mais on ne nous dit pas : lui aussi a été capable de m'apporter quelque chose.
Conclusion et passerelle féministe, pour celles et ceux que ça pourrait aiguiller :
Ici, pour moi, et même s'il n'en a pas l'intention, Joann Sfar est la personne aisée et cultivée (donc en position de dominant) qui explique les grandes idées et la nuance à un homme de classe populaire (en position d'oppressé).
Tout comme l'on s'énerverait si un homme, personnage principal d'un tel récit, expliquait tout et aurait amené son avis éclairé et nécessaire à une femme qui semblerait vaguement comprendre.
Peut-être, et même surement, que Sfar (ou l'homme de l'exemple) ne le fait pas par simple volonté d'asseoir sa domination ou d'écraser le chauffeur de taxi (ou la femme de l'exemple).
Mais son message rendu public contribue à faire perdurer cette image, ces constructions sociales intrinsèquement logées dans la tête des gens.
Le dominant (ici par sa classe sociale et ses idées anti-religieuses) garde sa position de force. La personne qui subit l'oppression systémique (liée à sa religion et sa classe sociale, en l'occurence) n'a pas vraiment la parole. Ce n'est pas une bonne chose.
Ainsi qu'à d'autres qui seraient dans le même état d'esprit, c'est à dire déçus voir en colère contre l'article que Mona Chollet a retweeté, et dans une mesure plus large, dans l'incompréhension face à ceux qui n'encensent pas le post de Sfar.
Alors, personnellement, je trouve qu'il y a un mépris de classe, et également un certain mépris de la religion.
Pour ce qui est de la religion, Sfar dépeint (mais BIEN SÛR sans employer des termes si radicaux et peut-être sans l'intention de le faire) le religieux pas dérangeant, occidentalisé, qu'on aime bien voir et qui ne nous pose pas de problème "quand mon chauffeur est sympa et souriant et vêtu comme moi, c’est à dire blouson ou veste et barbe pas trop longue, je m’autorise à dire que je suis juif."
Il oppose cet archétype, un autre, celui qu'il qualifie lui même d'avoir "une dégaine vraiment pas commode". Pour quelles raisons ? Parce qu'il porte des signes extérieurs de sa religion "longue barbe, sourcils froncés, calot blanc et stigmates bleus sur le front", passons la remarque à peine cynique "stigmates bleus sur le front" ...
On peut se dire, comme je l'ai lu plus haut : Mais, oui, c'est le début de l'article où il montre ses préjugés, pour justement bien l'opposer à la fin de l'article, ou le chauffeur se révèle finalement ouvert.
Alors, je n'aime pas vraiment qu'on laisse libre cours aux interprétations, au sens implicite du texte, car à la fin, aucun mot de Sfar pour revenir sur sa méprise de l'apparence, pour avertir que ce qui gangrène la France aujourd'hui c'est aussi ce rejet d'une religion (ici musulmane, donc principale victime d'oppressions et de violences actuellement) "trop" affichée.
En ce qui concerne le mépris de classe, même sans l'intention de l'amener, il est bien là.
Un Sfar, dessinateur, scénariste, qui prend souvent le taxi et a des amis connus et reconnus; qui résume des conflits, des idées, qui amène un regard neutre et nuancé à un chauffeur de taxi qui doit certainement passer le plus clair de son temps dans son taxi, à travailler pour tenter de survivre. Une personne qui n'a pas le privilège d'avoir du temps libre pour s'informer, confronter les sources, faire de brillantes rencontres et j'en passe.
Car, non, ce texte ne va pas changer le regard de la société sur les chauffeurs de taxi, les personnes moins aisées que Sfar. Il ne montre pas que le chauffeur a lui-même de la répartie et a creusé le sujet, que Sfar ne détient pas le monopole de la pensée.
Le texte se contente de nous présenter le chauffeur comme remettant (probablement) en question les élucubrations de ses connaissances, et riant. On nous montre : vous voyez, l'Autre n'est pas forcément agressif, et il peut même remettre en question ses idées !
Mais on ne nous dit pas : lui aussi a été capable de m'apporter quelque chose.
Conclusion et passerelle féministe, pour celles et ceux que ça pourrait aiguiller :
Ici, pour moi, et même s'il n'en a pas l'intention, Joann Sfar est la personne aisée et cultivée (donc en position de dominant) qui explique les grandes idées et la nuance à un homme de classe populaire (en position d'oppressé).
Tout comme l'on s'énerverait si un homme, personnage principal d'un tel récit, expliquait tout et aurait amené son avis éclairé et nécessaire à une femme qui semblerait vaguement comprendre.
Peut-être, et même surement, que Sfar (ou l'homme de l'exemple) ne le fait pas par simple volonté d'asseoir sa domination ou d'écraser le chauffeur de taxi (ou la femme de l'exemple).
Mais son message rendu public contribue à faire perdurer cette image, ces constructions sociales intrinsèquement logées dans la tête des gens.
Le dominant (ici par sa classe sociale et ses idées anti-religieuses) garde sa position de force. La personne qui subit l'oppression systémique (liée à sa religion et sa classe sociale, en l'occurence) n'a pas vraiment la parole. Ce n'est pas une bonne chose.