SolangeTeParle codes de la féminité, et ça fait débat

[Cagliary]

Moi, cette vidéo m'a fait du bien!
D'habitude, j'attends toujours des "tu es tellement jolie maquillée, pourquoi tu ne te maquille pas?", "tu devrais te laisser pousser les cheveux...", "j'ai un appareil pour s'épiler, tu peux me l'emprunter, tu sais?","mets-toi du vernis, c'est plus joli avec des sandalettes", "tu es grande et mince, les talons sont fait pour toi, pourquoi tu n'en mets pas?, ...

Alors pour une fois qu'on me dit l'inverse, je me sens... Je ne sais pas... Comprise? Je suis soulagée d'avoir entendu ces mots! Parfois, je me dit que j'ai tord, je ne suis pas une "vraie" femme mais ce genre de vidéo me redonne confiance en moi.

Le seul truc qui m'a peut-être déçue c'est le "tu n'es pas obligé d'être désirable". Je suis désirable. A mes yeux et à celui de mon amoureux. Ca me suffit.

 

[Kettricken]

@Wissalovski Ta critique a été beaucoup émise par les filles racisées de ma timeline twitter. J'en conclus qu'il y a là une problématique que moi, en tant que blanche, j'ignorais totalement.
Ca m'interroge toutefois sur ce qu'aurais pu faire Solange/Ina pour éviter ce travers.
Aurait-elle du dire d'"où elle parlait", genre : en tant que femme blanche, européenne, non-pauvre (car la classe social joue aussi un rôle dans la permission à la féminité, il suffit de se rappeler le scandale qu'avait fait un reportage montrant une ancienne starlette de la télévision désormais sdf avec une manucure parfaite) ? Mais du coup, ça aurait fait un peu artificiel, non ?
Aurait-elle du dire à qui elle parlait ? Mais ça aurait été hyper violent d'exclure d'emblée toutes les filles racisées.
Aurait-elle du essayer de parler de ces problématiques ? Mais ne lui aurait-on pas reprocher de parler à la place des concernées

Ce sont des réelles questions, je suis un peu perplexe. J'entends le problème, mais il me parait un peu insoluble tant que la société n'aura pas changer, puisque chacun ne peut réellement parler que de ce qu'il connait. Donc tant que la parole sera majoritairement donnée aux blancs...

Ou alors, je viens d'y penser en l'écrivant, elle aurait peut-être pu dire ce qu'elle a tweeter, à savoir qu'elle s'adressait surtout à elle-même plus jeune. Donc de facto, on sait à qui elle parle.

Bref, tout ça m'interroge

 

[Odinn]

Je suis peut-être un peu fragile mais cette vidéo m'a blessé. J'aime porter des talons, me maquiller, m'epiler parce que je n'aime pas les poils sous mes aisselles et je ne trouve pas ça jolie sur moi. Je me sens aussi à l'aise dans mon jegging et une paire de boots.
J'ai vraiment du mal avec cette injonction détournée, je me suis sentie mal tout le long de la vidéo et le pire ça a été sur les talons et le quai de métro avec ce mot " pitoyable". Je ne me sens pas pitoyable et pourtant ça m'a fait un crève cœur. Je sens plutôt dans cette vidéo une volonté d'inverser les codes en prenant le pied inverse des règles du jeu. Sauf que pour moi on peut avoir les deux non ? Une fille peut être autant féminine avec une petite robe noire et des talons aiguilles qu'une fille aux cheveux courts, roses, portant un smoking d'homme. Donc j'avoue avoir été blessé, je n'aime pas ce mépris que je sens.
Alors oui c'était sûrement pas le message de départ mais je ne suis pas pour la culpabilisation et dans un sens Solange le fait.
Être féminine c'est être ce que l'on veut pour moi. C'est porter ce qui nous fait plaisir et se sentir bien dans son corps, dans sa tête, dans ses fringues. Il n'y a pas de règles précises. On est tou(s)tes fémininesà notre manière et c'est notre définition qui compte sans vouloir l'imposer à un autre.

 

[Farane]

Discours : "Arrête de te soumette à des injonctions qui te font du mal"
Réponses : "Mais si j'ai pas mal ?" "Et si j'aime avoir mal ?" "Tu donnes des injonctions !"

Les injonctions, les vrais, c'est celles qui t'empêchent d'avoir un boulot, celles qui t'empêchent d'avoir un mec parce que "les femmes avec des poils, c'est pas des femmes", c'est ces injonctions là qui nous pourrissent la vie tous les jours, tous-les-jours. Tant mieux si vous êtes bien dans des talons, si vous êtes bien dans votre make-up, ça tombe bien, le monde est fait pour vous (bon, toujours pas autant que les hommes, hein faut pas déconner).

@Wissalovski du coup tu penses quoi des féministes du mouvement Ebony ? Quand elle disent "arrêtez de vous défriser les cheveux, arrêtez de vous blanchir la peau", c'est des injonctions ? Parce que pour moi c'est le même délire là.

 

[Mainlinh]

Je ne vois pas d'injonction dans cette vidéo personnellement.
J'y vois le message très simple "Aime toi, chouchoute toi de la manière que TOI tu souhaite, tu n'as pas besoin de le faire pour quelqu'un d'autre". Moi aussi je me maquille, m’épile et porte des talons casses-gueules dans des rues pavées. Cette vidéo m'encourage parce que j'entends "tu le fais pour toi et tu kiffe et t'as bien raison".

 

[Ariel rebel]

Pour ma part je suis un peu perdue, entre toutes les injonctions que je reçois (excusez moi par avance pour l'avalanche de guillemets, je les mets pour montrer que je ne suis pas forcément d'accord avec ces expressions):
-Dans ma famille, être "féminine" selon les codes de la société est mal vu, et ce pour plusieurs raisons: la première, le temps passer à se maquiller, à s'habiller, est du temps perdu à ne pas se cultiver, et pour mes parents, une fille maquillée est forcément superficielle (j'ai déjà vu mes parents étonnés que je sois cultivé malgré le fait que je lise des magazine "de filles"). La seconde raison, parce qu'être féminine, porter des jupes, être "sexy" était risqué pour mon intégrité physique (la c'est le côté mère poule de mes parents qui s'exprime). Je ne fais que décrire je ne valide aucunement ces injonctions on est bien d'accord.
-Dans la société, on connait toutes les injonctions d'être féminines, de se maquiller, de porter des jupes/robes, talons, etc. pas la peine de revenir dessus.
-Dans mon travail (je fais un travail "de mec"), pour être acceptée et intégrée, l'immense majorité des femmes qui partage le même travail que moi renoncent toutes aux codes de la féminité imposées par la société. Parce que tu comprends, tu peux pas être "féminine", te faire les ongles, t'habiller "comme une fille" et en, plus être compétente dans un domaine typiquement "masculin" ....

Alors moi dans tout ça je ne sais plus quoi faire...je suis quelles injonctions? Si je suis pas féminine je valide les injonctions de mes parents et du sexisme de mon travail? Si je le suis je valide les injonctions de la société? Il y a de quoi devenir folle...
Perso j'ai décidé de faire ce que je veux (avec mes cheveux) et tant pis si ça plait pas, c'est moi

 

[Kataplasme]

De base j'ai du mal avec l'expression "je suis féminine", je trouve ce mot trop codifié et limité à un seul point de vue que je préfère le bannir de mon vocabulaire.

 

[Pinceau_]

Ah, Solange.. La première fois j'ai détesté. Puis j'ai regardé plusieurs vidéos, je l'ai trouvée cheloue mais intéressante. Puis je l'ai écoutée sans la regarder et j'ai compris que c'était une théâtreuse, qui aime jouer avec les mots, qui aime les mots, qui leur donne vie. Je crois qu'il ne faut vraiment pas oublier la dimension théâtrale de ses vidéos ni son amour de la langue française.

J'ai adoré cette vidéo tant sur la forme que le fond. Pour moi, comme une madz l'a dit plus haut, il s'agit d'un contre-discours qui, pour être entendu et peser un tout petit peu dans la balance, se doit d'être presque extrême. Pour faire une métaphore, c'est comme quand on a par exemple un truc genre une semelle en caoutchouc qui est tordu dans le mauvais sens. Pour lui redonner sa forme normale, droite, on va le tordre à l'extrême dans l'autre sens. Ça ne veut pas dire qu'on veut que la semelle soit tordue dans l'autre sens, au contraire, on veut justement qu'elle retrouve sa forme originelle. Mais si on ne fait que la ramener à sa position "droit", elle retombera toujours dans le mauvais sens.
(Cette métaphore est-elle claire ? Rien n'est moins sûre. )

Bref, on ne peut pas nier les injonctions de la société sur le corps des femmes et la façon dont elles devraient émaner leur féminité. Et pour tenter de contrecarrer ce discours aliénant, qui est tout de même un fort combat féministe, il faut aussi que certaines voix s'élèvent pour peser très fort de l'autre côté.
Autrement dit, pour schématiser, on entend :

- Epile-toi, c'est joli !
- Sans les poils, c'est mieux !
- Imberbe, c'est la beauté !
- Epilation moins chère, plus rapide, moins douloureuse, c'est ici !
- Jambes douces ! Aisselles propres ! C'est beau !
Et tout à coup !
- GARDE TES POILS BORDEL.

C'est tout.
D'un côté des milliers d'injonctions directes ou indirectes pour faire aimer aux femmes tout un tas de trucs potentiellement douloureux ou handicapants, très très souvent complexants.
De l'autre UNE VOIX qui essaie de le dire très fort pour peser.

En cela, je ne pense pas qu'on doive lui reprocher la forme de sa vidéo, car si elle était consensuelle, si elle disait "mais si tu aimes, alors c'est pas grave", son idée aurait beaucoup moins de force et d'impact.

Beaucoup ont dit qu'il n'est pas intéressant de nier le conditionnement dont nous sommes tous victimes (@Lunafey ).

J'ajouterais qu'il ne faut pas non plus se mettre un voile devant les yeux concernant la consommation induite par ces conditionnements. Pourquoi la beauté au naturel est-elle tant rejetée ? Pourquoi, pour répondre à ces injonctions, pour "se sentir bien dans sa peau et belle et tout et tout" doit-on acheter sans cesse ? ...

 

[Biscottine]

Ah les talons, entre objet de désir et objet de torture pour ma part... Je pense que le mot "pitoyable" est mal choisi, je parlerais plutôt de "fragilité", je me sens belle en talon, mais tellement fragile d'être perchée comme ça, le mal au pied, les ampoules etc... Je n'en met pas très souvent, parce que déjà quand j'en porte j'ai l'impression que les prédateurs me "repère" avec le bruit, des fois je m'interroge de pourquoi on trouve ça beau, et quand j'imagine la forme d'un corps avec le talon, la forme de mes pieds, je trouve grotesque.
Je ne me maquille plus trop, plus de vernis, presque plus d'épilation, car je me dit que je perd mon temps et que si c'est la simple pression de me dire "je dois renvoyer cette image aux autres" et rien d'autre, au temps ne pas le faire. J'ai réalisé que c'était une démarche oppressive de se dire de telles choses, mais quand l'envie m'en prend, de prendre le temps de me maquiller, de m'épiler, je ne vais pas me priver et c'est d'autant plus agréable.

 

[Multicolorielle]

Au lieu de rejeter les codes de la féminité, moi j’aimerais les élargir. Après tout, je peux sans souci porter des t-shirts « pour hommes », mettre des costards et n’adopter aucun cotillon lié à mon genre : j’aimerais que les mecs aussi adoptent tous les codes qui leur plaisent ! Je préfère qu’on dise aux hommes « tu peux mettre de l’eye-liner, c’est pas réservé aux filles » plutôt qu’on dise aux meufs « si tu veux être libre, ne mets pas d’eye-liner : c’est réservé aux filles ».
Solange évoque Patti Smith, Virginie Despentes ; mais réduire la féminité « acceptable » à une seule forme, celle du rejet des codes, ça ne fait pas plus avancer le schmilblick que de la réduire à un tube de rouge à lèvres. Je n’ai pas envie d’être dure, rockeuse, de frapper du talon sur les pavés, de hurler ma rage, car ce n’est pas moi. Et tout mon féminisme a un but : que personne ne pense savoir mieux que moi qui je suis.

ah mais carrément, merci de mettre des mots justes sur ce que je pensais

je trouve ca complètement dommage de s´obliger à NE PAS être qqchose, s´obliger à toujours prendre le contrepied d´injonctions imposées, c´est continuer à leur donner le poids et l´importance qu´elles ne méritent pas justement.
Soyons juste comme on veut être, sans que ca se définisse par rapport à l´échelle de normes ! et oui peut être que parfois, on y correspondra et parfois non … mais c´est pas l´important, l´important c´est d´arrêter de se définir par rapport à ca, que ce soit en pour ou en contre.

 

[Pink Fluffy Unicorn]

Je reviens sur l'argument "c'est pas naturel" à propos des talons et autres épilations, qu'on est "naturellement" pas fait.e.s pour ça. En fait, cet argument, et c'est tout à fait personnel, il ne me convainc pas du tout. On vit dans une société, dans un groupe social construit avec des normes également construites, on porte des vêtements, on habite dans des maisons ou appartements, on utilise des ordinateurs ou des téléphones. Je ne vous apprends rien, mais l'infinité majorité des choses que nous faisons et utilisons ne se trouvent pas dans la nature.
Du coup, je ne comprends pas pourquoi est-ce qu'il faudrait être naturel.le uniquement quant à l'esthétique (ne pas s'épiler, ne pas porter de talons, ne pas se maquiller parce que c'est une forme d'invention sociale) ; et pas quant au reste. Ou est-ce qu'il faut rejeter les injonctions qui nous "détournent" de l'état naturel, sachant qu'à l'état naturel la violence par exemple est un moyen acceptable ?

Enfin j'aime d'autant moins l'argument de la "nature" qu'il sert de fondement à tout un tas de conneries : laFâme accouche, donc elle est naturellement plus fragile que l'Hôme, donc elle doit rester à la maison. La nature, elle sert à justifier tout et n'importe quoi. Par exemple, je peux dire que naturellement, on cherche la reproduction pour perpétuer l'espèce. Et que du coup, on va se maquiller, bien s'apprêter, histoire d'avoir plus de chances de se démarquer des autres pour pratiquer le coït et perpétuer l'espèce - un peu comme des paons. Clairement, c'est n'importe quoi cette idée ; mais elle est fondée sur la "nature". Sur un même fondement, on arrive à des résultats tout à fait opposés ; c'est pour ça que l'idée qu'on ne devrait pas faire ceci ou cela parce que "ce n'est pas naturel" ne me convainc pas vraiment.

Je ne sais pas si je suis très claire.

 

[Sadala]

Je reviens sur l'argument "c'est pas naturel" à propos des talons et autres épilations, qu'on est "naturellement" pas fait.e.s pour ça. En fait, cet argument, et c'est tout à fait personnel, il ne me convainc pas du tout. On vit dans une société, dans un groupe social construit avec des normes également construites, on porte des vêtements, on habite dans des maisons ou appartements, on utilise des ordinateurs ou des téléphones. Je ne vous apprends rien, mais l'infinité majorité des choses que nous faisons et utilisons ne se trouvent pas dans la nature.
Du coup, je ne comprends pas pourquoi est-ce qu'il faudrait être naturel.le uniquement quant à l'esthétique (ne pas s'épiler, ne pas porter de talons, ne pas se maquiller parce que c'est une forme d'invention sociale).

Ton argument est valable pour l'épilation, le maquillage, les coiffures, les modes vestimentaires. Ce sont des normes sociales qui en soit ne sont pas problématiques, sauf quand elles deviennent une obligation. Perso j'aime m'occuper de mes cheveux, me maquiller un peu. Mais ce n'est pas un esclavage, j'ai appris à ne plus m'y sentir obligée ( "appris" dans le sens où j'ai dû me déconditionner). Mais quoi qu'il en soit, quand tu te maquilles, te coiffe, est coquette, met des bijoux...tu conserves ton intégrité physique, même si tu suis les normes esthétiques qui sont des pures constructions sociales.
Mais pour les talons...quand on dit que ce n'est pas naturel, ce n'est pas juste que c'est une construction sociale ( comme les autres). On peut bien sûr aimer les belles chaussures, finement réalisées et tout ce que tu voudras...mais cela n'empêche pas que leur fonction première reste la marche. Or, les talons t'empêchent d'avoir une marche efficace, ce qui est pathétique. Donc quand on dit "c'est pas naturel" c'est que dans ce cas là, cette norme sociale est au dépens de toute logique pratique et corporelle ( cf tout les problèmes de dos, de hanche, de pied...)
Regardons une chaussure à talons...regardons un pied humain...toute l'absurdité du truc devrait sauter aux yeux... QUI A PU AVOIR L' IDEE D INVENTER CE TRUC... indice : pas celles qui le portent !
Tu citais l'exemple des vêtements comme construction sociale. C'est un peu comme s'il y avait une mode vestimentaire pour la femme de la camisole de force, qui t'attachait les bras, qui t'obligerait à des mouvement et utilisation ( ici des bras ) totalement aberrante ( biologiquement parlant). Imagine qu'un matraquage médiatique en fasse le summum de la beauté, de la grâce féminine.
Ce serait ridicule, n'est ce pas ? Pourtant, c'est ce qui se passe avec les talons.

Comment un tel instrument de torture à t'il pu intégrer les normes esthétiques de la féminité ? Il s'agit bien d'une volonté de "remodelage" du corps de la femme qui bride sa volonté de mouvement. Moi ça me fait penser aux corsets du 18 ème ( eux aussi dangereux pour la santé).