Personnellement, je n'estime pas que l'expression "une grand-mère" soit sexiste quand on parle d'une vieille femme. En fait, ce terme est utilisé dans de très nombreuses langues pour désigner une femme âgée et remplace un peu le mot "femme âgée" parce que c'est jugé plus sympathique voire plus poli. De même que le terme "grand-père" sera utilisé pour un vieil homme et le terme "oncle, tante" pour des personnes d'âge mûr que l'on respecte. Les utilisations de ces termes sont surtout utilisées dans les cultures où il existe un vrai rapport de respect dû à l'âge, où on doit se montrer particulièrement respectueux envers une personne âgée ou une personne plus vieille que soi.Qu'est ce que vous pensez d'utiliser le mot "une mamie" (et un papi aussi d'ailleurs) pour parler de personnes âgées inconnues ? Je le rends compte que je le fais beaucoup et je me demande si le fait de les associer directement à des petits-enfants ne participe pas à l'injonction à la maternité faite aux femmes. Après tout je n'appellerais pas des femmes de 40 ans des "mamans" si je ne sais pas si elles ont des enfants ou non, et ça m'énerverait que les gens imaginent automatiquement qu'elle en a.
Donc pour moi, ça n'a rien à voir avec une question de maternité. C'est vraiment un marqueur d'âge sans injonction particulière.
L'idée quelque part c'est que tout membre de la société doit respecter et s'assurer du bien-être des personnes âgées. Donc la vieille femme du bus, c'est comme si c'était ta grand-mère, même si tu ne la connais pas. Tu dois la traiter comme telle, l'aider et la respecter comme telle. Quant à elle, elle a le droit d'attendre de toi la même chose que si tu étais son petit-enfant. Par conséquent, tu l'appelles "grand-mère" et elle t'appelle souvent "petit" ou avec un marqueur d'âge qui montre que tu es plus jeune (en russe par exemple, on n'interpelle pas les inconnus par Madame/Monsieur mais par fillette/garçonnet puis jeune fille/jeune homme puis femme/homme puis grand-mère/grand-père etc.)
En Europe occidentale, on a tendance à se replier complètement sur une notion de famille nucléaire hyper-individualiste. L'enfant qui pleure dans le train, c'est la responsabilité de ses parents, pas la tienne donc tu peux te plaindre de ses cris plutôt que d'être solidaire des parents (et tu n'as pa le droit d'intervenir), la personne handicapée qui galère, c'est le problème de ses proches, pas le tien et donc quand tu daignes l'aider c'est que tu as fait une bonne action, pas que tu estimes que son bien-être te concerne aussi, le vieillard en difficulté, c'est le problème de sa famille ou de l'aide sociale, pas le tien etc. Donc on a moins tendance à trouver acceptable et poli de dire "grand-mère, grand-père" parce que ça personnalise trop les liens, d'autant plus qu'on est à fond dans le jeunisme où signaler que quelqu'un est vieux est malpoli. Mais je pense qu'on a quand même des héritages linguistiques et autres de l'époque où on respectait plus une hiérarchie de classe d'âge et où on se sentait responsable de toute la communauté. Pour moi, dire "la grand-mère là-bas", c'est un peu un héritage de cette période.
Mais il y a aussi le côté jeunisme qui fait qu'on infantilise les vieux, et que dire "le papi, la mamie", c'est une façon de les réduire à des vieillards sans rôle social, de leur donner un côté "faible" sans le respect qui va avec (puisqu'on a pas spécialement de sentiment de respect/rôle social prestigieux associé aux vieux chez nous).
Du coup, je dirais que ça peut parfois avoir une connotation péjorative mais que c'est surtout un marqueur d'âge. Par contre, je ne vois pas de sexisme particulier dedans, c'est plutôt de l'âgisme (sauf peut-être si on classe comme "grand-mère" les femmes plus jeunes que les "grand-pères").