Je voulais apporter ma pierre à l'édifice. La Belgique est un petit pays, on a tous ici une cousine, une tante, un frère ou un ami de Bruxelles, autant dire que la journée n'a pas été facile.
J'étais en cours quand j'ai appris la nouvelle, d'abord incrédule je ne réalisais pas vraiment ce qui ce passait. J'ai été choquée de voir que mon prof de néerlandais a donné son cours sans même aborder le sujet une seule fois, comme si ce les attentats, pourtant à 1heure de nous, appartenaient à un autre monde. Ensuite on réalise, on réfléchit et on pense à toutes ces personnes présentent à Bruxelles, toutes ces personnes qu'on aime. S'en suivent de longues minutes où les sms de bonnes nouvelles tombent. Soulagée pendant un temps. On réfléchit, on pense à ces dizaines de familles endeuillées. On se souvient de Charlie, de Paris, des "plus jamais ça", de tous ces chants, ces messages, ces mots, ces dessins d'espoir et de paix, et nous voilà quelques mois plus tard. Je parle à mes amis Bruxellois, ils me racontent l’atmosphère pesante et angoissante de la ville. J'ai un frisson, je suis liégeoise et il y a 5 ans un homme a tiré sur la foule juste devant mon arrêt de bus, tuant au hasard des adolescents, des parents, des grand-parents et des enfants. Les jours qui ont suivi ne ressemblaient tellement pas à la ville que j'aime tant, toujours bruyante, toujours animée, toujours si belge! Il ne régnait que silence et que tristesse. Et je sais aujourd'hui que Bruxelles est dans le même état, alors que Paris n'a pas encore pansé ses plaies.
Je suis heureuse de n'avoir perdu aucun proche, mais je suis profondément triste pour tous les autres, j'ai mal à mon pays, j'ai mal à mon Europe et en même temps je me trouve tellement égoïste. Il y a quelques jours c'était Istanbul qui pleurait ses morts et je n'ai eu qu'une brève pensée pour eux en me disant quel enfer ça devait être, loin d'imaginer ce qu'il allait se passer aujourd'hui. J'ai peur dans un sens, je me dis que ce n'est que le commencement et qu'on réalise peu à peu ce que vivent d'autres nations quotidiennement, tous ces morts, tous ces attentats, sur lesquels on ne lève même plus les yeux lorsque ça passe au JT.
Je voulais apporter tout mon courage aux Bruxellois ce soir, j'imagine comme demain sera difficile, vous lever dans votre ville meurtrie, devoir continuer à déambuler dans les rues, à prendre le métro, mais toute la Belgique est debout derrière vous, en tout cas j'aurai une pensée profonde pour vous tous. Alors battez-vous, allez au delà de votre peur! On continuera à aller boire des bières au cimetière d'Ixelles, à se plaindre de la SNCB toujours en retard, à se moquer gentiment des français qui ne savent toujours pas prononcer Molenbeek correctement, à s'amuser de voir les visages déçus des touristes devant la taille du Manneken-Pis, on continuera à rire et à vivre avec cette âme belge que nous aimons tant!
Dans un autre genre, je suis déçue aujourd'hui de tout ce rattrapage médiatique de la part de la France. Ce week-end j'entendais un politique français dire cette phrase si choquante "les 130 morts de Paris, on les doit aux Belges", et ce genre d’amalgame n'a pas cessé depuis. Je vois des articles de presse accusant la "négligence" des autorités belges, profitant des attentats de ce matin pour ajouter de l'eau à leurs moulins et ça me donne envie de vomir! La Belgique n'a pas été plus négligente qu'une autre nation. Je n'aime pas la tournure que prennent les choses, actuellement nous avons surtout besoin de soutient, et d'agir ensemble, dans une "invincible unité" comme le dit la brabançonne. Se renvoyer la faute de pays en pays ne fait pas du tout avancer le schmilblick, ça ne fait qu'attiser la haine et c'est bien triste...
Pour terminer ce message déjà trop long, je voulais encore vous envoyer à tous tout mon courage, à vous les belges, à vous les français, et à vous tous venu d'ailleurs! De la part d'une Belge fière de son pays, je vous aime nom d'une frite!