Je suis prof, et pour la première fois depuis le début de la pandémie, j'ai le Covid ainsi que beaucoup de mes élèves, de mes collègues, parce que "mon" ministre a pondu au dernier moment un protocole non viable depuis ses vacances à Ibiza.
On peut retourner le problème dans tous les sens, y'a beaucoup de précisions à ajouter à ma première phrase, mais les faits sont là et j'enrage.
Je vais peut-être faire des redites, mais quitte à être alitée et enrager dans mon coin, autant que ce soit noté quelque part. Que Blanquer n'ait pas voulu fermer les écoles ou repousser la date de rentrée (je pense qu'à ce stade, vu la tournure des événements, la repousser n'aurait en effet rien changé), que le gouvernement choisisse de changer tous les deux jours de stratégie de dépistage des élèves et des personnels, de dire que les FFP2 ne sont pas utiles, finalement d'en donner aux écoles comme on donnerait une petite tape condescendante sur la tête du petit personnel, qu'ils admettent que des erreurs auraient éventuellement pu à un moment être faites, je m'en fiche totalement.
C'est pas le protocole le problème, c'est comment on en est arrivé à être complètement dépassés dans les établissements scolaires. Comment la surcharge des classes, l'épuisement des personnels et leur non-remplacement, comment la structure même de certains établissements fait qu'on ne peut pas ouvrir les fenêtres car elles sont cassées. Et ça, c'est comme ça depuis des années. Des années de grève, des années qu'on alerte, qu'on se fait traiter de branlos par la plupart des médias, des gens qui commentent des publications Facebook. Des années qu'on demande des moyens, de l'humain et au mieux, on ne nous écoute pas. Au pire, on se fout juste de notre gueule (je compte les "on vous entend, on a mis en place une table ronde de discussion sur vos conditions de travail" comme du foutage de gueule). Et aujourd'hui, on nous demande d'éviter le brassage dans des établissements bondés, d'aérer des fenêtres qui ne s'ouvrent pas, et j'en passe ?
Et là, on a Blanquer qui était à Ibiza, à quelques jours d'une rentrée scolaire placée sous le signe d'un variant qui contamine de plus en plus. Ce même Blanquer qui a justifié son protocole comme justification d'une "réalité au plus près du terrain". Ironie. Qui, quand les personnels de l'éducation ont fait part de leurs angoisses, de leur ras le bol et ont lancé un mouvement de grève, a quand même sorti que c'était "dommage qu'[on] vienne perturber le système" et qu'on ne faisait "pas grève contre un virus". De qui se moque-t-on ?
Pour info, Blanquer a rendu 75 millions sur le budget de l'éducation nationale, ce qui, selon
cet article du Café Pédagogique, aurait permis l'embauche d'environ 1500 emplois d'enseignants. Mais tout va bien, la semaine dernière on nous a promis l'embauche de nouveaux contractuels qu'on refusera de CDIser et qu'on ne renouvellera pas volontairement, comme ceux qui attendent actuellement sur des listes complémentaires et qu'on refuse d'appeler. Et ce n'est qu'un exemple parmi tant d'autres.
Je sais pas, peut-être que la symbolique est trop importante pour moi, mais quand j'entends et lis qu'on se focalise sur la mauvaise chose concernant la destination de vacances de Blanquer, qu'on cristallise tous les problèmes sur le mauvais élément, j'ai envie de dire que justement non. Soit notre ministre est assez stupide pour penser qu'aller sur Ibiza est une idée fameuse, avec toute la symbolique derrière alors que tout s'effondre, soit en fait, ça ne montre qu'une fois de plus qu'à force de trop mépriser les gens, on a même plus conscience de ce qui ne se fait pas. La vérité c'est qu'à l'heure actuelle, il aurait pu pondre n'importe quel protocole depuis Pétaouchnok, que ça aurait de toute façon été un bordel sans nom. Mais Ibiza, dans ce contexte, ça montre juste, désolée du terme, qu'il nous chie une nouvelle fois dessus et qu'en plus on devrait le comprendre parce que personne ne lui a appris à utiliser correctement des toilettes.