Je ne veux pas trop participer au débat parce que je pense que ma vision là-dessus n’est pas assez documentée et que je vais prendre parti.
Mais juste pour alimenter un peu, ce que vous dites sur les mères au foyer, ça me fait penser à cet article sur les
« mères courageuses », mères célibataires qui vivent dans des situations super précaires. Et on voit que les gens ne sont pas tendres avec elles, que ce soit dans le travail, avec les enfants, dans leur relation avec le père, et aussi sur le fait qu’elles doivent rester féminines au milieu de tout ça.
Au sujet des pères, moi je me souviens d’une copine qui bossait dans un milieu artistique (la musique), et ce qu’elle me disait c’était que les hommes avaient moins de scrupules à demander à partir plus tôt pour aller chercher les enfants ou à s’absenter pour aller chez le médecin quand ils étaient malades parce que cette boite se voulait « moderne ». Donc les hommes qui s’occupaient des enfants c’était plutôt bien vu. Et ce qu’elles disait aussi c’est que les femmes, pas folles, au contraire se retenaient bien de faire ce genre de demandes parce qu’on les attendait au tournant, parce que ça renforçait le cliché de la femme « qui ne sait pas choisir entre ses enfants et son travail » ou qui n’est pas capable s’assurer les deux tâches.
Sinon au sujet du
privilège masculin, il me semble que Denis Colombi avait écrit un bon article là-dessus. Et qui expliquait que les hommes aussi sont stigmatisés s’ils sortent de leur rôle, mais la différence, c’est que s’ils rentrent dans leur rôle, ils sont en position de dominant : Je crois qu’il donnait l’exemple de la jupe justement : oui les hommes ne peuvent pas mettre de jupe, parce que s’ils sont trop « féminins » ils sont stigmatisés, mais s’ils s’habillent en homme on ne leur dira rien. Une femme qui met des jupes et est féminine va facilement se faire taxer de salope, d’allumeuse, ou bien on va juste moins la considérer parce qu’un décolleté enlève 10 pts de crédibilité (en particulier dans le travail). Mais si elle ne se maquille pas et s’habille en jean/T-shirt, on va lui dire qu’elle ne prend pas soin d’elle, qu’elle a un problème avec sa féminité, qu’elle est probablement lesbienne.
Un père qui s’occupe de ses enfants peut être stigmatisé. Mais s’il choisit de travailler, on ne va rien lui dire. En opposition, une femme, quoi qu’elle fasse, ne peut pas gagner, et c’est ça le mécanisme d’oppression. Une mère au foyer est peut-être dans son rôle mais c’est pénalisant pour elle, elle se retrouve dépendante économiquement (en ce qui concerne la reconnaissance du statut de mère au foyer comme étant un métier, il y a des féministes qui se battent pour leur rémunération justement, mais tu imagines à quel point c’est mal vu « payées à rien foutre ? Elles n’avaient qu’à pas se reproduire comme des poules pondeuses ! »). Mais si elle choisit de travailler elle devra quand même dans 70% des foyers s’occuper des enfants et des tâches ménagères. Elle sera obligée d’accepter un emploi précaire, avec moins de temps de travail, et souvent moins payé, et puis bien-sûr elle devra sacrifier sa carrière et elle ne sera probablement pas prise pour les postes à responsabilité. D’ailleurs pour les hommes, on ne se pose jamais la question du « est-ce qu’il peut tout avoir ? » [les enfants et la carrière NDLR] alors que pour les femmes qui réussissent et ont des enfants on se pose systématiquement la question (comme si elles voulaient tout, comme si elles voulaient avoir un privilège, ou un traitement de faveur).
Pourtant il me semble que tous les grands PDG du Cac40 ont une famille et des enfants. D’ailleurs, même si elle n’a pas d’enfants et qu’elle veut privilégier sa carrière, une femme aura quand même droit aux questions aux entretiens d’embauche « ah mais vous avez plus de 30 ans et pas d’enfants ? vous allez en vouloir bientôt non ? », même si elle n’a pas d’enfants, elle sera probablement payée moins que ses collaborateurs masculins (qui justifient cet écart de salaire par le temps passé avec les enfants, le congé mat, etc. donc là ça ne tient plus), et elle aura quand même plus de chances d’être écartée des postes à responsabilité (il y a pas mal d’études qui montrent ça, dans divers secteurs d’activité, à CV égal).
De plus, les hommes peuvent profiter de l'oppression sur les femmes (pour reprendre l'exemple à CV égal, un homme est majoritairement choisi pour la majorité des jobs) même s'ils ne font rien de spécial, alors que le contraire est rarement vérifié. Une femme sera payée moins et aura moins d'opportunités de carrière, mais sans contrepartie. C'est ça le privilège d'être dominant.
Je ne dis pas ça pour dire que les hommes ne sont pas stigmatisés, mais dire que les hommes « c’est pareil » c’est injuste. Les hommes ont un privilège, ils sont la norme, ils ont moins de prise de risque sur les choix qu’ils font.
Bon en fait j’ai pris part au débat quand même ^^ désolée