A propos du white feminism je suis tout à fait d'accord avec ta définition
@MorganeGirly mais j'ai l'impression qu'on sort complétement de cette définition parfois, vous en avez déjà parlé, il manque les cas où parler de sujets qui concernent des femmes hors de France comme l'excision (quoique pratiquée aussi sur des petites filles françaises) revient à faire du féminisme blanc.
Tu parles d'excision? Féminisme blanc, d'ailleurs les blanches font des labioplasties (?).
Tu parles d'une poetesse saoudienne féministe qui se bats pour les droits des femmes? Féminisme blanc, occupe toi plutôt de la France et d'ailleurs c'est pire en France (?)
Donc en gros le féminisme blanc c'est quand tu parles et tu t'occupes que de tes problématiques à toi, mais bon c'est aussi quand tu parles des droits des femmes dans le monde.
Comme si l'intersectionnalité empêchait un peu la critique de certains régimes, de certaines traditions, parce qu'il faudrait choisir son camps et ne pas dénoncer des législations hyper sexistes (mahram par exemple) et soutenir des féminsites saoudiennes par exemple, parce qu'il faudrait surtout pas être islamophobe.
Enfin j’interprète ça comme ça
Disons que comme la cancel culture et les réseaux sociaux peuvent un peu crisper et caricaturer les positions, ça peut effectivement tourner comme tu le présentes, mais sur le fond, je trouve justement que les critiques du "white feminism" que tu rapportes font partie des trucs pertinents. J'avais oublié cet aspect mais ça me parait logique de le critiquer.
En fait, le white feminist, ce n'est pas tellement de s'occuper juste des choses qui nous concernent en étant aveugle au reste, c'est surtout voir le féminisme à travers un seul prisme, celui des femmes blanches. Or, en se contentant de ce prisme, il y a quand même un gros risque qu'on soit à côté de la plaque quand on évoque des sujets dont on n'a pas vraiment d'expérience ou qu'on ne voit pas certaines choses dont on a trop l'habitude tout en nous focalisant sur des pratiques tierces.
Le fait de voir des pratiques assimilées comme étrangères comme hautement révoltantes, je trouve que ça vaut le coup de se demander pourquoi, pas forcément dans le sens "si ça se trouve c'est ok d'exciser les femmes, si on voit les deux aspects de la pièce", mais plutôt de se demander si cette chose-là nous indigne et provoque une émotion aussi forte chez nous parce que c'est quelque chose qui nous parait totalement hors de notre monde, "exotique", différent, pas familier ou si les pratiques similaires qui nous sont plus familières nous indignent tout autant.
Parce que c'est vrai que ce qui est étranger peut avoir tendance à provoquer des réactions très fortes chez les gens, et ça vaut le coup de se demander si notre réaction est équilibrée par rapport à nos réactions face à des choses plus quotidiennes et tout aussi choquantes ou si elles ne cachent pas autre chose que juste un désir ardent de combattre le sexisme.
En ça, la grille de lecture "white feminist" me parait pertinente. C'est pour ça aussi que je trouve que ce n'est pas complètement absurde d'interpeler les féministes blanches et bourgeoises qui sont vraiment systématiquement toujours très émues par la condition des femmes des pays arabes ou qui trouvent que le voile est franchement un des pires trucs de la condition des femmes mais qui ne se saisissent pas avec autant de vigueur des histoires d'agressions sexuelles dans la politique française ou le sport français, ou de certains contextes sexistes plus "blancs", parce que nos échelles de valeur autour du sexisme ne sont pas forcément neutres.
Je sais par exemple que pour moi, mon premier voyage à Dubaï quand j'étais beaucoup plus jeune et en tant que fille seule m'a beaucoup bouleversée dans mes convictions. Comme c'est un pays du golfe persique qui applique techniquement la chariah, je pensais que c'était EVIDENT que la condition des femmes y était moins bonne qu'en France. Et je dis pas qu'elle y est meilleure hein, mais disons que ça m'a fait réaliser que mes grilles de lecture du sexisme avaient de gros points aveugles, parce que j'avais grandi en jugeant certains comportements sexistes relativement banals et familiers parce qu'en France on les trouve banals, alors que certains pays qu'on m'avait toujours présenté comme très très méchants pour le droit des femmes ne les trouvaient pas acceptables du tout.
Et bref, pour moi c'était une forme de féminisme blanc à laquelle j'adhérais jusque là : je trouvais certaines pratiques révoltantes chez les autres et je trouvais qu'on devait absolument lutter contre, mais je négligeais ce qui était pourtant juste à côté de moi et me concernait quotidiennement, donc le truc sur lequel j'avais en fait le plus de prise!
Du coup, les phrases que tu rapportes sont effectivement improductives et caricaturales, mais en même temps, je me méfie maintenant de ma façon de voir les choses quand je mets mon nez chez mon voisin, parce qu'il me manque peut-être des bouts d'analyse, et que je n'ai peut-être pas réalisé ce qu'il fallait aussi corriger chez moi. Par exemple, en caricaturant, si ma grande passion militante c'est le féminisme saoudien, mais que je trouve les féministes occidentales moins intéressantes, je trouve quand même nécessaire de me demander pourquoi et si je sais vraiment de quoi je parle.
(A ce sujet, je trouve que la grille d'analyse des droits humains est assez utile pour éviter à la fois le relativisme culturel et les jugements à l'emporte-pièce, étant donné que c'est une approche assez juridique et à laquelle ont adhéré librement et officiellement la plupart des pays du monde. Cette approche permet de mieux discerner ce qui est clairement inacceptable de "ce qui me choque, mais il me manque peut-être des éléments, donc je préfère ne pas en faire mon cheval de bataille" - par exemple, avec cette grille, bah logiquement tu vas pas valider la lapidation pour adultère même si t'as jamais été témoin de ça, mais par contre, tu vas te demander si t'es vraiment la mieux placée pour juger du port du voile si tu n'as pas de gens qui le portent dans ton entourage).
Mais évidemment, tu t'en doutes, ceci n'est pas du tout pour remettre en cause tes propres centres d'intérêt et combats, juste que je trouve que le terme "white féminism" peut avoir son intérêt justement pour le cas des causes féministes "non occidentales".