Cet article m'a vraiment fait réagir, notamment parce que j'ai eu une formation ultra classique, et donc un parcours au sein duquel les erreurs d'orthographe ne sont absolument pas tolérées : hypokhâgne, khâgne, khûbe, master de recherche puis agrégation de lettres.
En hypokhâgne, c'était tolérance zéro vis à vis des fautes d'orthographe et / ou de syntaxe, six fautes dans une copie signifiaient un point de moins, douze fautes deux points etc... Pour des copies qui peuvent atteindre quinze pages, douze fautes, ça arrive vraiment très vite, ça ne représente même pas une faute par page ! J'ai déjà vu ma prof de français enlever sept points à quelqu'un (sept points !), sachant que la moyenne des copies en CPGE tourne généralement autour de sept et demi, je peux vous garantir qu'un seul point en moins fait toute la différence.
Honnêtement, avant la classe prépa, je n'avais pas l'impression de faire des fautes, je n'avais jamais eu de points en moins pour l'orthographe, j'ai toujours été excellente en dictée et je donnais déjà des cours particuliers à des enfants de collège / primaire. Je peux vous assurer que la classe prépa fait radicalement changer de perspective, j'ai eu l'impression d'être devenue dyslexique ou dysorthographique d'un seul coup... Les vrais grammar nazis, ce sont les profs de CPGE ! Rien n'est toléré, il vous faut ingurgiter toutes les règles de grammaire et d'orthographe françaises que le commun des mortels ignore : subjonctif derrière "après que" ? Tu te crois où, un point de moins ! "C'est à vous de" ? Quelle horreur, tout le monde sait qu'on dit "c'est à vous à" ! "Elle a l'air contente" ? Désolé, l'accord syntaxique est le seul toléré en khâgne, tu veux passer pour un ignorant ou quoi !
Il existait même une punition particulièrement humiliante : le cours de rattrapage. Deux heures par semaine à "revoir les bases" de la langue française, au cours desquelles on nous martelait des évidences que nous savions déjà (le verbe porte l'accord du sujet...) uniquement pour nous punir d'avoir fait ces fameuses douze fautes et nous priver de deux heures de travail qui auraient été bien mieux employées. Après avoir passé deux heures là-bas, j'ai tout fait pour ne plus jamais atteindre ce pallier de douze fautes...
En fait, tout le monde fait des fautes, à tous les niveaux, à moins de subir ce traitement infernal... Je passais mon temps à relire tout ce que j'écrivais, je connaissais le Bescherelle par cœur et la GMF était devenue mon livre de chevet... Bref, je ne fais (pratiquement) plus aucune faute, mais maintenant je passe mon temps à être indisposée quand quelqu'un fait une erreur, parce que je ne vois plus que ça... On m'a trop martelé qu'il était inacceptable de faire des fautes : s'il y a plus d'une faute par page, je suis incapable de lire un texte, parce que ça me déconcentre trop, je ne peux pas me focaliser sur le fond, c'est comme si une personne déguisée en clown et particulièrement bruyante récitait un poème.
A titre personnel, j'essaye de toujours être bienveillante quand je corrige quelqu'un, parce que maintenant je sais ce que c'est que d'être repris.e en permanence et traité.e comme un.e feignant.e qui n'est même pas capable de maîtriser sa langue maternelle à 100% après x années (comme si quelqu'un pouvait se vanter de ne jamais faire aucune faute).
Alors si vous faites des fautes, c'est normal, rassurez-vous, et surtout ça se corrige : les fautes d'inattention sont bien naturelles, on ne devrait pas vous les reprocher, les fautes de conjugaison peuvent être très facilement résolues avec un Bescherelle et pour les fautes d'orthographe, prenez le temps d'ouvrir le dictionnaire à chaque fois, car plus on passe de temps à la recherche d'un mot, moins on a de chance d'oublier son orthographe ! Et pour la grammaire, n'oubliez pas qu'elle évolue et que si une erreur est répandue pendant suffisamment de temps parmi suffisamment de personne... elle finit par devenir la règle !