Je ne vais pas aborder le côté écologique du questionnement, qui est intéressant et qui mérite d'être débattu, comme il l'a pu l'être dans des commentaires précédents. Même si je me range plutôt du côté "attaquons le capitalisme et les grosses firmes avant de shamer à l'échelle individuelle". C'est plus facile de manger non-industriel, bio et local et de ne pas avoir de voiture (etc, etc) quand tu vis en plein centre ville et que tu ne galères pas à boucler les fins de mois. Quand tu es smicarde à 40h/semaine en pleine campagne, tu n'as pas trop le choix...Mépris de classe, anyone ?
Mais ce qui m'a le plus gêné, à la lecture de la question de Barbara, donc, c'est la posture de jugement sur les choix de vie (en l'occurrence, de reproduction) de certaines personnes.
J'en comprends l'origine, je crois qu'on partage tous/tes une éco-anxiété grandissante. Mais de quel droit, en fait, peut-on juger le choix d'une personne d'avoir ou non des enfants ? C'est tellement personnel, comme décision ! Mais au nom de quoi une personne peut-elle se poser en juge de cela ? Poser l'écologie comme une idéologie radicale à laquelle il faudrait tout sacrifier, ben comme toutes les idéologies, je trouve que c'est dangereux.
Il y a un vieux relent de mépris de classe et de racisme qui me hérisse, aussi. Historiquement, les populations qu'on a voulu empêcher d'avoir des enfants, contre leur volonté ou non, c'est, surprise surprise, les populations colonisées et les pauvres. A ce sujet, voir "La cause des femmes", par Gisèle Halimi : dans les années 50, par exemple, l'Etat français faisait de la propagande pour la contraception dans les DOM-TOM en même temps qu'il en restreignait l'accès en métropole. Traduction : des bons Français bien blancs on en veut bien, les autres non. Joie, hein ?
C'est pour la même raison que les scénarios à la Idiocratie me font gerber. Parce qu'on considère que les idiots ont l'audace de trop se reproduire (les classes populaires, hein, donc), que leurs gamins seront forcément idiots (ben oui ils sont pauvres), et que ça va nous mener à la catastrophe.
C'est facile, pour les classes dominantes, de jouer à se faire peur avec des scénarii pareils.
C'est considérer le déterminisme social comme un déterminisme intellectuel, c'est non seulement malhonnête, c'est méprisant et méprisable.
Et puis, avec des arguments comme "on est trop nombreux sur cette terre, il faut réguler la population", on n'est jamais bien loin de l'eugénisme, comme cela a déjà été dit. Devinez quelles populations on va vouloir "limiter" en premier ? Les mêmes qu'encore aujourd'hui, on stérilise de force, peut-être ?
Il faut changer nos sociétés en profondeur (à mort le capitalisme !), pas se jeter sur les théories malthusiennes.
Bref, tant que le fait d'avoir un (ou des) enfants est un choix, je ne vois pas en quoi ça regarde qui que ce soit, et de quel droit quiconque pourrait juger ça. Un énorme oui à l'accès universel à la contraception et à l'avortement, évidemment. Mais à partir du moment où c'est mon choix (et pour celleux concerné-es, celui de mon-ma partenaire), je ne vois pas qui ca regarde. On pourrait pas avoir un peu d'adelphité et d'indulgence, plutôt ?
Au passage, je ne veux pas d'enfants, pour tout un tas de raisons. Mais je refuse de juger qui que ce soit qui déciderait d'en avoir. Se draper dans ses convictions pour mieux culpabiliser les autres et se sentir soi-même inattaquable, je trouve ça répugnant.
Venez, on arrête, et on va tout cramer pour rebâtir sur des bases saines.