@CCCC "En tous cas ce qui me désespère le plus, c'est que la prochaine échéance c'est dans 5 ans... et que, bon, le GIEC a annoncé qu'en gros on avait 3 ans pour inverser la vapeur... Donc dans 5 ans, quand on retournera voter, on sera dans quel monde ?"
C'est la question qui tourne dans ma tête depuis dimanche...
J'arrive un peu la bataille et donc un peu comme un cheveu sur la soupe dans la conversation actuelle


Ce que le GIEC a dit, c'est que les trajectoires qui ont plus de 50% de chances de limiter le réchauffement à +1.5°C atteignent le pic d'émissions avant 2025 - autrement dit, s'il est atteint après, on aura plus d'une chance sur 2 de dépasser ce chiffre (ce qui ne dit pas si ce sera +1.6°C, +2°C ou +4°C). Chiffre qui est symbolique - il n'y a pas de mécanisme automatique d'apocalypse qui s'enclenche le jour où on atteint +1.5°C, par contre chaque centième de degré supplémentaire fait que les conséquences du réchauffement sont un peu plus graves: Chaque centième de degré, c'est plus de cataclysmes environnementaux, plus de jours de canicule par an, plus de famines, etc.
Bref, on ne sera vraisemblablement pas dans un monde post-apocalyptique lors des élections de 2027 si la trajectoire des émissions de GES ne s'est pas inversée. Par contre, on sera dans un monde où l'espoir de limiter tel ou tel dégât humain lié au réchauffement sera plus faible qu'aujourd'hui - exactement de la même manière que ça aurait été mieux si la société avait radicalement changé vers un modèle durable il y a 5 ans, et que comparativement il vaudra mieux que le sursaut en question ait lieu dans 5 ans plutôt que dans 10 ans ou jamais. Comme le disent d'ailleurs très bien les auteurs eux-mêmes:
"Il n’y a pas un seuil au-delà duquel c’est fini. Si on loupe 1,5°C, il faudra viser 1,51°C, et ainsi de suite car il n’est jamais trop tard pour agir. En revanche, plus on agit vite, plus on évite des conséquences dramatiques", explique Céline Guivarch, l’une des co-autrices du rapport. "Chaque tonne de CO₂ compte, chaque incrément de degré compte. Cette formulation en compte à rebours est maladroite. Nous n’avons pas besoin d'échéances temporelles avec un précipice pour justifier l'urgence climatique et donner l'illusion qu'a +1,4°C tout va bien mais qu’à 1,6°C, c’est la fin du monde" a également réagi sur Twitter le climatologue Christophe Cassou, directeur de recherche au CNRS et co-auteur du 6e rapport du Giec.
A titre personnel, je déplore que ce point du rapport ait été déformé (assez grossièrement) par l'AFP, puis repris massivement un peu partout. Parce que ce discours, s'il marque suffisamment les esprits, croyez bien qu'on va le payer en 2025 quand tout le monde sera en train de dire, au choix, que "c'est trop tard maintenant de toute façon" ou que "depuis le temps qu'ils nous annoncent la fin du monde et qu'on n'en voit pas la couleur, moi je n'y crois plus".