@Tératogène
Pour te donner un exemple personnel, histoire de ne pas parler pour les autres.
Il y a allez, cinq ans, j'ai fait mes premiers pas dans le féminisme. Je sortais d'épisodes très compliqués (agression sexuelle, dépression...), autant dire que j'étais nourrie par une colère très forte et
légitime. Un truc que je faisais souvent, c'est que je pétais un câble sur internet. Les trolls me faisaient me sentir très mal, très très mal, et la plupart des cas, c'étaient des enflures, des connards qui ne cherchaient qu'à faire mal, bref, des trolls.
Mais il y a peu, j'ai aussi retrouvé d'autres conversations que j'avais eues sur twitter ou google plus avec des hommes qui n'étaient pas dans la volonté de faire du mal mais bien de débattre, avec des arguments qui pouvaient être pertinents. Sincèrement, j'ai eu un peu honte de ce que je leur ai répondu. Je n'étais que dans ce bashing "tu m'as blessée et tu ne sais même pas t'excuser", alors que vraiment, les gars n'avaient rien dit de grave contre moi, contre le féminisme, et leurs propos étaient même intéressants.
Je ne sais pas où tu traînes sur internet, mais ce que j'ai fait n'est pas isolé du tout. Cette parole de concernée intouchable est
parfois discutable (et je précise comme toutes au-dessus que ce n'est pas ce que je dis du débat juste avant, j'ai dit que je n'avais pas tout lu). Elle est un guide très intéressant, et bien sûr personnellement, que si on me dit que j'ai blessé quelqu'un, je vais essayer de réfléchir à ce que j'ai fait et m'excuser. Ce n'est pas pour autant que dans l'absolu, ça sera toujours parce que quelqu'un a été blessé que l'autre a dit quelque chose de -phobe. De toute façon, ce n'est pas logique, il y a forcément des cas où l'on peut-être biaisé par nos émotions, et ce n'est pas grave, nous sommes humains, les émotions c'est inévitable et important. Moi j'ai été biaisée par mes émotions. Et j'ai envie de me faire un énorme câlin quand je pense à la moi de l'époque : je ne diabolise surtout pas les émotions, c'est normal dans avoir quand on a vécu des épisodes violents. Je chérirais d'ailleurs toujours ces émotions. C'est juste qu'elles ne me donnaient pas toujours raison, c'est tout.
Je trouve dommage que tu fasses le rapprochement entre cette argumentation et ce que peuvent dire des masculinistes et que tu présumes en plus que toutes les personnes qui pensent ça ne sont jamais concernées par rien : par exemple j'ai un regard critique sur ça à propos de sujets qui me concernent, et a fortiori, ici, beaucoup de personnes ici sont concernées par le féminisme, vu qu'elles sont des femmes. J'ai déjà été traitée de grossophobe alors que je suis obèse, aussi. Je n'étais pas une privilégiée, dans ce cas là.
Je trouve aussi que certains de tes propos exagèrent ce qui a été dit : personne ne dit que c'est le pire truc de sa vie de se faire traiter de -phobe, personne ne dit qu'il s'est senti jugé au plus profond de son être (même si, je dois dire, quand j'ai été traitée de grossophobe, ça m'a fait très mal, c'est normal, c'est pas simple dans tous les cas). Ça tourne les paroles en ridicule, alors que je crois qu'il y a quand même des propos nuancés.
Pour résumé mon avis, la parole de concerné est importante, primordiale, à mettre en avant, à écouter. Pour autant, elle n'est pas dans l'absolu à 100% celle qui peut décider de ce qui est -phobe ou non,
à voir au cas par cas, débat par débat, argumentation par argumentation.
Quelques édits pour bien formuler ma pensée, pardon.