Je vous explique grosso modo la situation : dans la "ville" (comptez 5 minutes pour en faire le tour) où se situe mon école, une élève de 14 ans a été renversée par un bus et en est décédée. L'élève appartenait à mon école (C.) et l'accident s'est produit devant l'Institut St-Albert, une autre école.
De par le fait que c'est une très petite ville, qu'on connaît tous les endroits, qu'on visualise où ça c'est passé, quand on m'a annoncé la nouvelle, ça m'a rendue triste, oui. J'ai dit "Putain" quand je l'ai appris, parce que même si je ne connaissais pas la fille, elle venait quand même de mourir de façon assez brutale et que peu importe de qui il s'agit, ce n'est jamais drôle. De plus, elle venait de mon école, ce qui rend l'accident plus proche, et on est souvent plus touché par ce qui est proche.
Sauf que là, y'a une espèce de vente aux enchères, style "c'est moi la plus triste suite à la mort d'Eloïse", "repose en paix petite étoile, même si je ne te connaissais pas", "je veux aller au funerarium et à son enterrement, sincères condoléances à la famille" et autres trucs du même style. Sauf que bon, à partir d'un moment, quand tu ne connaissais pas la personne, faut arrêter. "Sincères condoléances" est un mensonge, tu ne connaissais ni la famille ni la fille, tu ne sais pas prendre part à une douleur que tu ne peux ressentir ; "Repose en paix petite étoile", faut arrêter aussi, c'est pas en postant 960 messages sur un groupe Facebook qu'elle va avoir la paix, et à nouveau, taxer quelqu'un de petite étoile quand on ne la connaît pas, c'est hypocrite.
Je suis exaspérée parce qu'on dirait que les gens se jettent sur cet évènement comme pour promouvoir leur côté sensible, ils s'approprient une tristesse qui n'est pas la leur, détériorent l'idée même de la tristesse et du deuil. Ca m'exaspère, oui. La maman de la jeune fille a dit clairement qu'elle voulait quelque chose d'intime comme enterrement, et que personne d'éloigné de sa fille n'était convié à l'enterrement proprement dit, mais que si on voulait, on pouvait faire une espèce de haie d'honneur dans la rue du funérarium. Et pourtant ils persistent, restent là, mettent des petits mots dans un livre de condoléances, ne pigent pas que la maman ne souhaite pas une haie d'honneur mais le suggère et le permet si on veut exprimer quelque chose.
Je vais peut-être paraître sans coeur alors que je suis quelqu'un d'assez sensible, mais je crois pouvoir dire que je sais ce que c'est que de perdre un proche, de façon brutale ou non. Et ça, toute cette fausse tristesse, ça m'écoeure, vraiment, c'est quasiment irrespectueux je trouve.
Personnellement j'ai réfléchi à la question, j'avais jamais vu la fille, ça me touche oui, mais je n'ai pas mis de petit mot dans le livre de condoléances, je ne vais pas aller faire le piquet près du funérarium, je ne vais pas dire de petit mot lors de la minute de silence organisée à l'école. Mais je vais me taire pendant la minute de silence, je ne vais pas plaisanter sur le sujet, je ne vais pas aller emmerder ceux qui sont vraiment touchés par l'évènement avec mes considérations à la con.
Parce que sincèrement, pleurer, être triste, on le fait quand ça nous arrange. Là on en fait tout un foin, et quand on lit qu'il y a eu des morts dans la rubrique Faits divers du journal, ça ne nous fait rien. Il faut être modéré quoi qu'on fasse. Les extrêmes présentées ici, c'est pas top.
(Je ne parle pas pour les gens qui étaient présents au moment de l'accident, ou qui étaient dans la classe de la jeune fille ou qui étaient dans le bus, ou qui tout ce qu'on veut.)