J'avais raté ce topic et j'ai pas lu toutes les réactions mais yen a beaucoup qui m'ont choquée par leur condescendance.
La seule chose négative que j'ai à dire c'est que moi aussi je trouve que les blocages sont une très mauvaise solution parce qu'elle prive les autres élèves de faire un choix et que c'est souvent symptomatique de la gestion du mouvement.
J'étais à la fac pendant les longs blocages du CPE et c'est vrai que les meneurs croyaient tellement en leur cause qu'ils avaient oublié qu'il n'y a pas qu'une seule opinion valable sur terre, que donc le blocage était la chose la plus légitime à faire à leurs yeux, que re-voter les décisions des AG encore et encore jusqu'à ce que les opposants se lassent et que la "bonne" décision soit choisie à l'unanimité était une nécessité et que tous ceux qui voulaient aller en cours étaient des vendus égoïstes.
Je rappelle donc aux militants passionnés que leurs choix et opinions ne sont qu'une option parmi d'autres et que le respect est la base d'un mouvement durable. C'est un des trucs sur lesquels il faut vraiment travailler, surtout quand on veut défendre la solidarité et la tolérance : il faut accepter que certains ne soient pas d'accord et qu'on n'a rien à leur imposer.
Par contre, en dehors de ça, je comprends pourquoi les lycéens se tournent vers les blocages.
Quand ils font des manifs, on leur sort le même argument "ils veulent sécher les cours, c'est pour faire la fête, ils ne captent rien, ils sont trop jeunes pour comprendre, ils sont déconnectés des réalités" etc. et on ignore leurs revendications d'un revers de la main.
Le modèle militant français est très inspiré des actions ouvrières du début du XXe siècle, c'est un peu considéré comme le modèle idéal.
Les lycéens n'ont pas encore eu le temps de se forger une immense culture des moyens de lutte (déjà que la plupart des adultes n'ont aucune idée de ce qu'ils pourraient bien faire pour changer les choses) et tout ce qu'ils voient, c'est les exemples les plus courants qu'ils ont sous les yeux : grève et manifestations. Or la grève d'un lycéen, ça fait aussi rire les gens et ça parait encore plus flemmard, d'où la montée en gamme avec le blocage.
Le blocage est un des rares moyens qu'ils connaissent pour se faire entendre des gens "sérieux", ne serait-ce que parce que ça va faire chier tout le monde et que du coup, forcément ceux qui se moquent d'eux vont un peu moins se moquer et un peu plus les regarder, même si c'est pour s'en plaindre.
Il y a cependant d'autres moyens qui existent et ce serait une bonne chose que les lycéens en entendent parler :
- La méthode "pétition" : faites signer un texte qui résume les propos à tous les gens que vous pouvez et envoyez-la à Manuel Valls. Si chaque lycée indigné fait ça, c'est déjà des milliers et des milliers de signatures qui vont arriver dans son bureau; vous pouvez aussi faire la méthode un peu plus reloue en écrivant chacun une lettre ou une carte postale avec votre revendication et l'envoyer à 1) François Hollande/Jean-Marc Ayrault, 2) Manuel Valls, 3) Les députés de votre circonscription même s'ils ne sont pas PS car c'est leur job de représenter leurs électeurs, 4) Le maire; vous pouvez aussi envoyer des fax et passer des coups de fil au secrétariat du politicien en question en demandant s'il a reçu votre lettre/s'il compte faire quelque chose.
Pour que cette pétition ait plus de force, il faut aussi signaler combien vous envoyez de signatures/de lettres et tenir un registre que vous ferez tout pour publiciser.
Les hommes politiques dépendent du peuple, on l'oublie trop souvent.
- La méthode numérique : Les ados sont doués pour la viralité sur Internet et ils ont souvent des centaines d'amis Facebook et Twitter, c'est un super moyen pour faire passer le mot à des milliers de personnes et attirer l'attention des médias qui veulent leur plaire.
Créer des blogs pour le mouvement en rassemblant des tas de commentaires de soutien par exemple.
- La campagne de rue : demandez l'autorisation à la mairie pour investir la place publique et interpellez les passants sur votre cause en les encourageant à agir ou en créant des événements interactifs.
Etc.
Je souligne que des tas de campagne ont été efficaces avec ces procédés, à commencer au niveau européen par le retrait de la loi sur le piratage informatique qui a été menée activement en ligne.
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Bref, à part ça, je trouve qu'ils ont absolument raison de réagir sur cette cause et je suis ravie qu'ils expriment le fait que les jeunes français aspirent à la solidarité et à l'interculturalité.
Ils réagissent à une dangereuse tendance à taper sur les étrangers comme s'ils étaient responsables de nos plus gros problèmes alors que c'est souvent une excuse.
Alors on leur dit "c'est pas important, vous êtes naïfs" blablabla, je suis désolée mais pour moi, c'est parce qu'ils ne sont pas encore la cible de ceux qui leur balancent des fausses excuses.
Ils échappent à certaines manipulations politique parce que ce n'est pas encore eux qu'on veut manipuler et que les arguments ne sont pas façonnés pour eux.
Bien sûr que certains lycéens n'ont rien captés à la cause, mais ceux qui se plaignent des infos sur les blocages devant leurs télés, ils s'y connaissent mieux peut-être? Ils s'investissent dans quelles idées à part la râlerie contre ceux qui essayent d'agir pour ce qui les émeut?
Il n'y a rien de plus sain qu'une jeunesse qui se révolte quand elle a l'impression de voir des injustices. La jeunesse est souvent un indicateur de la santé démocratique du pays parce qu'elle a moins peur des risques, qu'elle est énergique, qu'elle n'a pas vraiment de privilèges à perdre, qu'elle n'est pas encore fatiguée par les déconvenues.
Alors au lieu de leur rire au nez, on ferait mieux de discuter avec eux si on n'est pas d'accord pour essayer de comprendre ce qui déclenche leurs passions. Organisons des débats, écrivons des articles de blogs, invitons-les à rencontrer les gens qui prennent ce genre de décisions etc.