Je devrais plus souvent opter pour des critères chelous dans le choix de mes lectures. Je m'étais lancé le défi de lire des romans écrits par des autrices ayant le même prénom que moi. J'en ai trouvé plusieurs et après avoir survolé les 4eme de couverture, j'en ai gardé 2. Et ben j'ai eu le nez creux! Les deux, bien que fictionnels, présentent des pans méconnus de l'Histoire, et ça j'adore.
Le premier, lu très vite (une centaine de pages) est
L'ombre d'un homme de Bénédicte Des Mazery. Sans trop en dévoiler, la trame principale est : de nos jours, un vieux proprio décide de louer gratuitement un appartement à une famille pauvre, à la seule condition de pouvoir venir dîner chez eux chaque soir. A vrai dire on voit tout de suite où l'intrigue veut en venir, mais on se laisse porter, c'est joliment écrit et surtout ça met en lumière le sort durant la guerre des demis-juifs (celleux qui n'avaient pas suffisamment d'aieux juifs pour être envoyé.es à Drancy puis aux camps), envoyés en plein coeur de Paris dans des établissements entièrement barricadés (pour que les habitants ne devinent pas ce qui s'y tramait) où leur travail consistait à trier tous les objets récupérés dans les logements vidés de leurs occupants juifs. J'ignorais totalement cet aspect de la spoliation des Juifs.
J'ai vu que l'autrice s'est fait une spécialité d'écrire sur ce genre de "détails" historiques souvent méconnus et je suis certaine de me laisser tenter par d'autres de ses écrits.
Le second, c'est un vrai coup de coeur:
Une héroïne américaine de Bénédicte Jourgeaud
. Deux vies parallèles: celle (inventée), contemporaine, de l'entrée dans le monde du travail d'une étudiante française partie vivre au Canada et celle (réelle) faite de hauts et de bas dans les années 50 aux USA de Brownie Wise, qui finissent par se recouper. Le mélange est savamment dosé, lire le destin de ces deux femmes apporte un plaisir égal, quoique... Honnêtement Brownie Wise aurait mérité de figurer parmi
les Culottées de P. Bagieu
Son nom ne vous dit probablement rien, mais si je vous dis "Tupperware", vous allez tiquer: Tupperware, c'est Earl Tupper, l'inventeur du fameux plastique dont sont fabriqués ses bols, et c'est bien son unique rôle: l'invention. La publicité, la vente, l'émulation de son produit, il la doit tout entière à Brownie Wise, mère célibataire ayant osé demandé le divorce et ayant quitté l'école à 13 ans, qui eut l'idée et le cran de mettre en place les fameuses réunions tupperware, faisant prospérer l'entreprise. Brownie est haute en couleurs, se met en avant, ne se laisse pas faire, a du flair, est féministe: elle ne vend pas de quoi faire faire la popotte aux bonnes femmes, elle leur donne l'opportunité de s'émanciper en travaillant dans la firme. Je m'emballe, mais j'ai vraiment adoré (et pourtant je suis pas dans le bon mood: j'ai une gastro depuis hier....)
Le petit plus c'est qu'à la fin l'autrice fait un point sur ce qui relève de la réalité de la vie de Brownie Wise (quasi tout) et ce qui relève de l'imagination (2 détails, en fait): j'aime cette mise au point, le mélange fiction/réalité sans plus de précision me déstabilisant toujours.