Veille permanente Parentalité et Société

[AprilMayJune]

@Mama Sara Pour être honnête, je me suis un peu demandée si tu exagérais le trait ou non, et j'ai eu peur qu'à penser que tu exagérais, j'allais me montrer encore plus insultante si jamais tu ne l'étais pas (ou euh, fermant la discussion surtout) (je considère qu'il est important de discuter de tout ça, quelles que soient les positions de base!) Je suis pas forcément toujours très douée pour comprendre les gens pardon si je t'ai blessée.

Je n'ai pas beaucoup plus de choses à dire par rapport à ta réponse, je trouve tes interrogations plutôt bien, in fine, et je suis un peu beaucoup contre la sélection sur critères sociaux, en fait - et contre aussi parce que c'est 1/ juger que des gens sont inaptes à être parents et 2/ juger qu'il n'y a rien à faire à part leur interdire d'avoir des enfants (on est même pas dans une réflexion qui se dit "donnons-leur des cours de parentalité ou quelque chose comme ça" je trouve qu'il y a comme une réflexion déterministe, comme s'il y avait des gens intrinsèquement capables d'être parents et d'autres incapables) (je trouve que ça en dit beaucoup sur comment on voit la parentalité, aussi, non pas comme quelque chose qui s'apprend ou peut s'apprendre, mais comme quelque chose d'inné en soi, ou de déterminé par des caractéristiques extérieures ou sur lesquelles on n'a pas vraiment de contrôle (ou pour reprendre l'exemple de la manif pour tous, le fait qu'il faut un papa une maman pour bien prendre soin d'un enfant). (Et du coup, on a plein de gens perdus qui savent ni trop comment faire pour être parents ni trop vers où se diriger pour, je trouve ... enfin c'est beaucoup l'impression que j'ai. Madz est par exemple une ressource fantastique pour apprendre des trucs sur comment être parent, grâce au sujet sur la parentalité animé par des mamans; mais ça me semble bien illustrer mon propos: on a un savoir constitué de l'expérience de plein de gens compilé au travers d'anecdotes sur leur vie personnelle et de questions-réponses, pas quelque chose de véritablement trié / organisé / "wikipédiaifié" ou transformé en cours facile pour un apprentissage; on n'a pas vraiment de pistes pour de nouveaux parents (où poser des questions, comment faire, etc) et, quelque part, ce savoir existe, on a des livres, des chercheurses qui travaillent dessus, des gens formés (notamment dans le milieu médical) mais aucune véritable démocratisation / répandage de ce savoir parmi les gens qui en auraient le plus besoin, les parents? Je peux me tromper sur toute la ligne avec ça (et peut-être y a-t-il des ressources qui deviennent disponible quand on tombe enceinte ou enfin quand on est mieux intégré dans la société que moi j'ai super peur qu'on me juge comme "potentielle mère inapte" à cause de cette parenthèse aaah ) mais j'ai beaucoup l'impression qu'on laisse les gens livrés à elleux-mêmes avec la parentalité.)

 

[Mama Sara]

@AprilMayJune
Pas de souci, je ne suis pas du tout blessée et tu m'as aidé à réaliser que je m'étais mal exprimée. Parfois j'oublie que les autres ne sont pas dans ma tête .

Je trouve ta réflexion sur l'apprentissage très intéressante et j'espère que des parents pourront nous donner leur avis à ce sujet.

 

[Weena88]

@AprilMayJune et @Mama Sara
J'ai suivi votre échange avec attention, mais vos réflexions sont tellement étoffées que je ne saurais pas comment y répondre de manière exhaustive ...
Pour la questions des critères "sociaux" concernant l'adoption ou la pma, un couple d'amis de mes parents, infertiles, qui s'était tourné vers l'adoption en première intention. Elle leur a été refusé au rapport que la femme avait un poste à carrière et était trop sportive donc pas assez "maternelle" . Ils sont donc passé par la PMA, à priori sans encombre, et sont maintenant parents d'une adorable fille

Pour le côté "parents perdus" et "apprentissage de la parentalité", je dirais que le problème est plus profond: il y a -à priori- toujours eu des gens qui avait des enfants sans vraiment vouloir s'en occuper, soit par défaut de contraception, soit par méconnaissance.
Actuellement, il y a en plus un problème de rôle dans la société, d'isolement parentale (que ce soit du couple en lui même ou après éclatement du noyau familial) et d'injonctions contradictoires ... il faut être tellement sur tous les fronts, toujours au top, offrir les meilleurs à ses enfants sans s'oublier soit même ... l'adage "il faut tout un village pour élever un enfant" n'a jamais été aussi véridique , ni aussi cruellement nécessaire ...
AprilMayJune, un des problèmes de la parentalité, c'est que tu pourra lire tous les livres, les études et les guides qui existent, tu es unique, ton(tes) enfant(s) est(sont) unique(s), y'a pas de méthodes universelles, toutes la parentalité est une immense improvisation pour trouver ce qui va convenir dans le couple parents/enfant, et ce qui marchera pour le premier sera un fiasco avec le suivant

 

[Mama Sara]

@Weena88
ça doit être terrible de voir sa vie scrutée et jugée ainsi. Je suis vraiment ambivalente à ce sujet et je n'arrive pas à avoir une opinion tranchée. D'un côté je comprend bien qu'on puisse se soucier de confier un enfant à une famille "saine", et je sais bien qu'il y a moins d'enfants adoptables que de prétendants parents et que la sélection est inévitable, mais tout de même, ça me met très mal à l'aise.

Je ne sais pas si ça a quelque-chose à voir avec notre discussion, mais je viens de me souvenir de cette pièce de théâtre qui aborde le thème de la lutte des classes autour de l'accueil d'un enfant: Baby. Malheureusement elle ne se joue pour l'instant qu'à Paris.

Concernant l'apprentissage: vous pensez quoi de cet exercice que l'on voit dans les séries américaines et qui consiste à s'occuper d'un faux bébé pendant une durée déterminée? Je me demande si c'est utile et si ça a une quelconque influence sur le nombre de grossesses non désirées...

 

[Weena88]

@Mama Sara franchement, le côté faux bébé "réaliste" avec un rythme pourri, je ne sais pas si ça aide ... déjà parce qu'il n'y a pas de bébé type, donc ça te permet juste d'expérimenter le côté déficit de sommeil dû à la gestion d'un nouveau né les premiers mois ... je ne pense pas qu'il y ai une option pleurs de décharge, pleurs inexpliqués, bébé glue, bébé à bras, bébé pasdodo et toutes les subtilités de chaque bébé ...
Qui plus ai, on se découvre parfois des ressources insoupçonnées pour sa propre descendance (qui doivent aussi pouvoir se manifester lors d'une adoption).

Pour les critères de sélection, je ne sais pas lesquels existent au USA, mais j'ai été horrifiée d'apprendre que les couples adoptants pouvaient "remettre en jeu" des enfants adoptés "qui ne leur convenait pas" , qui plus ai dans des circuits parallèles absolument pas réglementé eux

 

[Pinceau_]

@Mama Sara Je pense que le truc du faux-bébé c'est du bullshit complet La difficulté d'un bébé c'est qu'il est réel et vivant H24 et 7 jours sur 7. Le faux-bébé, bah, forcément il ne prend qu'une infime partie de l'attention, on sait qu'il n'est pas vivant, ça change tout ! On peut s'amuser à lui changer la couche quand on y pense, ça n'a rien à voir avec le fait de changer la couche quand LUI il en a besoin (surtout à 2h du matin, 2 fois de suite ). Et pareil, les pleurs, le besoin d'être porté, etc., ça ne pas être mimé par une poupée. A mon avis, si c'est présenté comme un "vrai entraînement", ça donne un très mauvaise idée de ce que représente un bébé !

Je n'ai pas lu toute la discussion en cours (j'ai pas le temps j'ai un enfant ) mais mon avis superficiel sur le sujet c'est qu'on ne peut pas savoir à l'avance si on sera un bon parent ou non. Devenir parent est un tel chamboulement qu'il me semble que décider de critères pour "donner le droit" d'avoir un enfant, c'est + casse-gueule qu'autre chose et surtout que ça ouvre la porte à énormément de discriminations. Quand on voit le nombre d'abus qu'il peut y avoir dans des familles socialement élevées (que l'on parle d'un "simple" harcèlement moral pouvant par exemple mener à des TCA, voire des cas d'incestes pas si rares que ça), et le nombre de personnes issues de milieux "pauvres" qui ont beaucoup d'admiration pour leurs parents car ceux-ci ont toujours fait le maximum et donné beaucoup d'amour...)

 

[Mama Sara]

Cet article contient la vidéo du "test de la poupée blanche et de la poupée noire" qui montre l'influence du racisme systémique sur la perception qu'ont les enfants d'eux-même. Il interview également la créatrice de poupées noires et métisses.

 

[Pinceau_]

@Mama Sara Ouah comment la vidéo m'a mis les larmes aux yeux

 

[Mama Sara]

@Pinceau_
Moi aussi

 

[schizophrenia]

J'ai bien aimé cet article de Slate qui explique que l'allaitement naturel est aussi très couteux pour les femmes et a des impacts négatifs en terme de vie professionnelle et de vie sociale.
La femme est obligée de se lever la nuit, peut difficilement tirer son lait au travail dans de bonnes conditions etc...

 

[Gabelote]

Gros coup de blues en lisant ces échanges sur un groupe pro sur fb

Spoiler: grandes images

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Donc le temps partiel de droit pour les enfants, c'est plus ou moins ok, mais la charge de travail elle, reste à 100%

 

[Weena88]

Dans le cadre d'un défi lecture sur le féminisme, j'ai eu l'occasion de lire "du coté des petites filles" de Elena Gianini Belotti : c'est une analyse, fondée sur de très nombreuses observations de la vie de l’enfant selon qu’il est un garçon ou une fille, l’étude des fondements d’une éducation qui se transmet à l’identique, de manière presque inconsciente, automatique. L’auteure montre comment cette dernière est le résultat de toute une série de conditionnements passant par les jeux, les jouets, la littérature enfantine et critique les méthodes pédagogiques, le manque presque total de préparation des enseignants, les rapports toujours faussés de ces derniers avec les enfants.

Alors l'étude date un peu (beaucoup, 1973, ça concernait donc la génération de nos parents enfants), mais c'est flippant de constater le travail qu'il reste encore à accomplir ... je ne sais pas si c'est parce que je suis maman de deux garçons, mais j'ai d'ailleurs presque l'impression qu'il y a encore plus de chose à faire bouger pour eux.
D'après l'auteure, les filles sont brimées dans un carcan de bienséance (les petites filles sont délicates, douces, peu remuantes, ect.), or j'ai l'impression que heureusement, c'est de moins en moins le cas, en tout cas dans le milieu dans lequel j'évolue : j'ai pu faire de l'escrime, me couper les cheveux à la garçonne, faire des camps d'archéologie, rêvasser dans des bouquins d'aventures et me salir les mains en toute tranquillité.
Il y a un passage qui étudie l'affection "innée" des enfants pour les jouets dédiés à leur sexe qui est très marquant car il démontre que les petites filles bercent leur poupons car nous, adultes, leur avons inconsciemment montrer comment faire, alors que nous refourguons un poupon "sans notice" aux garçons ... et je me suis rendue compte que encore plus loin, si de nos jours il est toléré d'offrir des jouets "de garçons" à une fille, c'est complètement occulté dans l'autre sens !!
Il y a aussi tout un réquisitoire contre la littérature enfantine/ dessines animés qui enfermaient les petites filles dans un rôle passif ... est-ce que, de nos jours, on peut considérer qu'on leur offre des héroïnes fortes avec Rebelle ou Vaïana? Mais du temps de nos parents, il y avait Fantomas et Alice détective, non?

Bref, je pars un peu dans tous les sens, mais même si le livre date un peu et mériterai presque un nouvel état des lieux, il apporte vraiment une prise de conscience sur les mécanismes inconscient de normalisation sociétale auquel nous nous soumettons parfois à notre "cerveau" défendant ...