heste;4605580 a dit :
@maelyra j'ai beaucoup de mal avec son texte, déjà je n'ai pas compris le principe de la "camaraderie entre femme", je ne sais pas, il est rare que j'envisage une personne par le prisme de son sexe, je ne me sens pas plus liée aux femmes parce que je suis féministe. Enfin ça me questionne beaucoup ce terme. Je veux une camaraderie entre tous les êtres humains, homme ou femme ou neutre ou n'importe quelle autre genre.
En fait je trouve sa prise de parole très intéressante pour tout ce qu'elle dénonce sur la transphobie, la lesbophobie qui existe même dans le féminisme.
Mais je ne suis pas d'accord avec ce paragraphe:
" C’est plutôt qu’en toute logique, sortir de l’hétérosexualité chacune de son côté, paraîtrait être la première étape vers l’autonomie des femmes et la possibilité pour chacune de vivre sa vie seulement pour elle-même, le premier pas nécessaire vers le bazardement de l’hétérosexualité en tant que système politique, et du patriarcat."
Je ne crois pas que le désir d'être en couple soi seulement un truc d'hétéro ou de femmes d'ailleurs. Comme on peut trouver des femmes hétéros qui conçoivent très bien vivre sans être en couple.
Alors pour la camaraderie entre femmes, je suis abbbbbsolument d'accord avec elle. (Qu'est-ce que vous croyez que je viens faire sur le forum madmoiZelle, à part rechercher votre délicieuse compagnie ?
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Venir profiter d'un lieu de camaraderie féminine. Ben oui.) Dans le cadre du boulot, par exemple, quand je suis arrivée dans mon service actuel en étant la seule femme (et pas encore pleinement féministe), ça n'a pas été évident tout les jours, et mes collègues femmes qui sont arrivées par la suite ont été d'immenses bols d'air pour moi (même si elles-mêmes ne sont pas féministes - je ne mets pas la barre bien haut, hein !)
Mais simplement, il y a quelque chose qui passe avec les femmes - le fait d'avoir vécu des situations de sexisme, le fait de savoir - vraiment - ce que ça fait d'avoir grandi en subissant les contraintes liées à notre genre, le fait de comprendre les questionnements et contradictions liées à nos pratiques de la féminité, etc etc... Plein de questionnements et de ressentis que bien, bien peu de mecs n'ont jamais eus. Et mine de rien, oui, ça crée quelque chose d'indéniable. Même quand on n'est pas féministe, et pas pleinement conscientes de notre statut de victime d'oppression, on sent qu'il y a quelque chose qui nous rapproche. Sauf... sauf bien sûr quand on a internalisé le sexisme au point d'accepter l'idée que les femmes doivent être rivales, se méfier les unes des autres, et autres conneries du même acabit. Bref, oui, on PASSE notre temps à aborder les gens sur le critère de leur genre (on s'imagine que non, mais quand on commence à se poser la question, en fait, SI, TOUT-LE-TEMPS), et dans le cadre de l'oppression sexiste, la camaraderie entre femmes est très, très importante.
Ensuite, sur la remise en question de son hétérosexualité, un seul bout de phrase m'a fait vaguement froncer les sourcils : "
oui, les féministes hétérosexuelles doivent se remettre en cause individuellement, doivent se questionner sérieusement sur le fait d’être hétérosexuelle, d’avoir choisi de le rester et surtout de continuer à relationner avec des hommes (en particulier cis)." Le mot "choisi" m'a fait tiquer... on ne choisit pas son orientation sexuelle. Eventuellement, on peut remettre en question son orientation sexuelle en se demandant si on n'a pas essayé de refouler des attractions homosexuelles, mais le terme "choisi" me semble bizarre dans ce contexte.
Sinon, sur le reste du texte, je pense que le questionnement est pertinent. Une phrase-clé, je trouve, est celle-ci : "
Alors oui, évidemment ces pratiques sont en elles-mêmes des constructions sociales issues d’un système, mais du coup quel est le plan sur lequel on peut s’y attaquer si ce n’est celui de nos interactions quotidiennes, hein ?" La question, pour les femmes hétéros, est de s'interroger sur notre pratique de l'hétérosexualité, sur notre vision du couple, des relations amoureuses et sexuelles, car celles-ci sont inévitablement empreintes de rapports de domination. Oui, j'ai dit inévitablement. Je considère qu'il ne doit pas être évident de trouver de mecs beaucoup moins sexistes que mon copain, et pourtant je passe mon temps à questionner notre relation, la façon dont un rapport de pouvoir persiste (même s'il n'est évidemment pas basé que sur nos genres), la façon dont notre sexualité est biaisée par le sexisme, etc. Et encore, là je parle de mon copain et moi, donc un couple établi ! La femme qui a écrit le texte en question parle aussi et surtout du questionnement sur le simple fait de se mettre en couple, de reproduire le schéma patriarcal, de se sentir obligée de mettre un peu ses convictions au placard pour avoir une relation, etc etc. Et je suis complètement d'accord avec elle sur le fait qu'on ne peut pas s'épargner cette réflexion personnelle juste parce qu'il s'agit d'amour ou de sexe. C'est une réflexion qui n'est pas facile, pas agréable, mais qui me semble nécessaire si on veut une relation saine, voire si on préfère ne pas avoir de relation plutôt que d'en avoir une malsaine.
Quand elle parle carrément de "sortir de l'hétérosexualité" et que ça nous fait réagir, ça prouve à quel point on a du mal à
envisager une vie sans être en couple hétérosexuel. Pas dans le sens où on ne pense pas qu'on puisse être célibataire et heureuse, ou dans une relation homosexuelle et heureuse, mais dans le fait que la vie en couple hétéro nous a toujours été vendu comme
une évidence absolue. Vivre seule, c'est la loose, vieillir seule, c'est la misère, vivre avec une femme, ça n'existe pas - voilà ce que nous vend notre société en permanence. Du coup, simplement se poser la question : "
est-ce que j'ai besoin d'avoir un homme dans ma vie pour être un être humain complet ?" est une question qui ne nous vient même pas à l'esprit tellement elle paraît, non pas simplement saugrenue, mais complètement abstraite. On nous a appris que, en tant que femme, la clé du bonheur, c'est une relation de couple hétérosexuel réussi (avec enfants bien sûr). Et bien sûr, le bonheur peut passer par une relation de couple hétérosexuel réussi. Mais
commencer par se poser la question est une option qui ne nous est pas offerte - en tout cas, bien peu.
Bon, j'ai écrit ça un peu au fur et à mesure que je réfléchissais, donc c'est pas super structuré, mais je pense qu'elle touche une question intéressante.
@astipalaya : je vois difficilement comment la non-mixité totale à l'école pourrait améliorer quoi que ce soit - surtout du coté des garçons, en fait. J'avais lu un truc sur les maternelles suédoises qui luttaient contre les stéréotypes de genre, où un moment de la journée était non-mixte, et les enseignant-e-s (je ne me souviens plus de leur genre, je crois que c'était des femmes ?) disaient que les filles avaient tendance à être davantage en retrait quand elles étaient dans des groupes mixtes, et avaient moins de difficulté à se mettre en avant dans des groupes exclusivement féminins, ce que j'avais trouvé très intéressant. (En y réfléchissant, j'ai effectivement tendance à bien davantage m'exprimer et à ne pas avoir peur de m'affirmer au sein d'un groupe de filles qu'au sein d'un groupe mixte...) Je ne me souviens plus en revanche de ce que faisaient les garçons pendant ce moment-là. En tout cas, l'expérience semblait intéressante et bénéfique, mais uniquement en mode
temporaire. Je pense que séparer filles et garçons drastiquement aurait plutôt tendance à renforcer l'adhérence à une division entre les genres : "nous les garçons, elles les filles" et vice versa - moins de contacts avec l'autre genre évitant d'avoir à confronter la réalité avec les stéréotypes, et ayant tendance à renforcer l'idée qu'on ne peut s'entendre et s'apprécier qu'entre personnes du même genre puisqu'on n'a moins l'occasion de se lier avec l'autre genre...
EDIT : @ladystardust : elle ne dit pas que les féministes doivent
devenir lesbiennes (elle serait bien mal placée vu qu'elle est hétéro !!) mais "doivent se remettre en cause individuellement, doivent se questionner sérieusement sur le fait d’être hétérosexuelle". Se remettre en cause et se poser des questions ne veut pas dire forcément aboutir à la conclusion qu'il faut sortir de cette hétérosexualité - simplement qu'il est pertinent et nécessaire de se poser la question, et de ne plus envisager l'hétérosexualité comme allant de soi, ou ne méritant pas d'être examinée au niveau personnel.