tessy;4608105 a dit :
Je suis actuellement dans une ville qui vivait auparavant de l'industrie, mais depuis la fin de l'union soviétique, ça marche plus des masses. Le principal business local, et surtout pour les gens parlant plusieurs langues (je fréquente surtout des étudiants/profs de langue ici, la plupart d'entre eux se sont déjà retrouvés à bosser là-dedans) ce sont... les agences matrimoniales. Non, je ne plaisante pas.
Mais pas n'importe quelle agence matrimoniale. Pas des sites de rencontre à la adopteunmec ou autre truc du genre qui chercher à te donner l'illusion qu'il y a rapport d'égalité entre hommes et femmes, ou que ce sont les hommes qui sont le produit vendu par le site (alors que l'inscription est gratuite uniquement pour les filles, et c'est bien connu, "quand c'est gratuit, c'est toi le produit"). Non, la spécialité, c'est de mettre en contact des hommes (de préférence riches) venant d'Europe de l'ouest et des Etats-Unis avec des femmes (de préférence jeunes) ukrainiennes.
Sans qu'ils parlent la même langue, ce qui explique pourquoi ils embauchent un nombre important de traducteurs/interprètes.
Et encore, pas toujours juste traducteurs... Une des étudiantes m'a raconté qu'elle a été embauchée en croyant devoir juste traduire en anglais les lettres de femmes cherchant à se marier; elle s'est retrouvée à se faire passer pour une femme cherchant à se marier, et à écrire à des hommes sous 10 identités différentes pour leur extorquer de l'argent parce qu'il fallait payer avion, hôtel, etc, pour organiser une rencontre. Le but étant de faire croire aux hommes intéressés que ces agences regorgeaient de jeunes femmes de 20 ans parlant anglais, alors que les seules qui s'inscrivaient en cherchant vraiment un mari étaient en majorité divorcées avec enfants. Pas exactement le profil recherché quoi.
Quant aux couples qui se forment vraiment par ces agences, parce certaines sont honnêtes et ne proposent pas des jeunes femmes imaginaires mais des vraies personnes: ma tutrice m'a donné un exemple de couple s'étant marié comme ça; l'homme, français, avait pas loin de la soixantaine, il cherchait une femme de 20 à 25 ans. Quand je lui ai demandé ce qu'un couple avec une telle différence d'âge pouvait bien avoir à se dire, elle m'a répondu "rien, il parlait pas anglais" (évidemment, il ne parlait ni russe ni ukrainien non plus, et sa femme ne parlait pas français) . Ca promet une vie de couple fort épanouie... La plupart des hommes parlent avec quelques femmes sur internet, puis viennent en Ukraine pour en choisir une parmi la pré-sélection, en se basant sur des questions fondamentales du style "vous préférez les chats ou les chiens?". (Je ne dis pas que ce n'est pas un élément important, jamais je n'épouserais un homme qui ne veut pas de chat.

Mais si j'en crois une copine interprète, leur discussion se résume à des trucs comme ça, par personne interposée parce qu'ils parlent pas la même langue, et après ils se marient. Great.)
Bref, une économie florissante basée sur la conviction de nombreux hommes que leur richesse doit se traduire par le kit complet "j'ai-réussi-dans-la-vie": une grande maison, une grosse voiture, une rolex neuve, et une jeune femme. Pas plus de 25 ans. Non parce que si à 50 ans t'es marié à une femme qui a plus de la moitié de ton âge, t'as raté ta vie.
Etrangement, je ressens plutôt peu de compassion pour ceux qui se sont fait baiser en payant pour une rencontre avec une fille qui n'existait pas.
Tu résumes plutôt bien, l'Ukraine (mais aussi la Russie) m'ont laissé la même impression sur ce sujet là.
En Russie, je pose la question (banale) dans mes classes: "pourquoi apprenez-vous le français?"
La réponse de la moitié des filles (je n'exagère pas): "Pour me marier avec un Français".
(remplacer français par italien ou allemand, ça marche aussi).
En me baladant avec une amie dans un parc en Ukraine, je me souviens qu'on a vu 3 Américains débarqués, genre 40-50 ans. Et directement au moins 8-9 filles sont allés leur parler (et les coller).
En transit dans l'aéroport de Minsk (capitale de la très riante dictature du Bélarus), j'ai trouvé la composition de la salle d'attente pour Prague à pleurer: que des femmes biélorusses (à en juger par leur accent) accompagnées par des hommes français ou allemands.
Le truc en plus avec les étudiantes que j'ai rencontré en Russie, c'est qu'elles idéalisent complètement leur futur mari et leur vie en France, des fois on était dans l'hallu totale.
Beaucoup pensent vraiment (!) qu'elles vont vivre avec un mari riche, à Paris, qu'elles seront en Chanel à boire leur thé en bas de la Tour Eiffel... leur vision de la France est assez hallucinante tellement elle est irréelle, il n'y a pas de pauvres, pas de problèmes, etc. C'était un peu bizarre du coup pour elle de me parler, car je ne correspondais pas du tout à ce qu'elle voyait comme un Française.
En gros, elles ont une vie pourrie qu'elle voit comme pourrie et comme but une vie rêvée, et rien, même pas la réalité, ne peut les en détourner.
Je les comprends (en voyant leurs perspectives d'avenir en Russie, additionnées au fait que dans pas mal d'endroit y'a un homme pour 2, 3, 4 voire 7 femmes niveau démographie) mais beaucoup ne s'imaginent pas qu'en réalité, la vie en France peut-être pire que la vie chez elles (au niveau individuel).
C'est bien sûr très bien de rêver à une vie meilleure, mais à ne pas vouloir y insérer un tout petit peu de réalisme, on peut tomber, par aveuglement, dans des situations vraiment glauques qui n'ont rien en commun avec ce qui est désiré.
Du coup j'essayais de faire un portrait honnête de la France, de ne pas les dégoûter mais de ne pas non plus les encourager dans leur délire de "la France c'est une carte postale et c'est pas autrement", si je peux éviter quelques désillusions futures...
C'est d'ailleurs là où je ne suis pas trop d'accord avec toi @tessy car franchement, pour l'avoir vu en France, pas à propos d'Ukrainiennes mais plutôt pour de Camerounaises et Ivoiriennes, le mari français est loiiiiiin d'être riche avec rolex et grosse maison. J'ai surtout vu des types de 50 ans habiter au fin fond de la campagne (qui vote FN a plus de 50%), pas très aisé voir au RMI, sans atout ni physique ni "intellectuel", avec des femmes étrangères.
Après, c'est horrible à dire, mais du coup ils ne sont pas avec les plus jeunes et les plus belles (mais tout de même plus qu'eux), vu que y'a concurrence sur le marché.
Globalement, le truc que je trouve triste, c'est que c'est comme un partenariat "gagnant-gagnant" pour les deux: il a une femme dans la cuisine et dans son lit, elle divorce au bout de 5 ans et a les papiers. Et le gars peut en trouve run autre après.
Car il ne faut pas se leurrer, je pense que la majorité, maris comme femmes, savent très bien le nombre d'années que dure ce type de mariage...
Et du coup je n'ai aucune espèce de compassion pour les types naïfs (ou débiles, selon le point de vue) qui pleurent à la tv parce que "oh là là je me suis marié avec une Biélorusse, elle m'a quitté dès qu'elle a eu les papiers avec notre gamin sous le bras", quand le dit-mec t'explique après qu'il a trouvé sa femme sur internet, qu'aucun des deux ne parlait anglais ni la langue de l'autre, et qu'il est allé l'épouser au bout de 3 mois de correspondance par mail.
Je sais, c'est moche, mais quand on a été aussi naïf pour croire à de l'amour désintéressé à coup de "leur culture est différente elles ne jugent pas le physique, elle ont une vision pure de l'amour", faut pas se plaindre de ricanements quand on témoigne...
Voilà voilà pour mon témoignage (d'ailleurs je crois que j'avais écris déjà un truc du genre y'a quelques temps mais je me souviens plus si c'était sur Madz, si oui désolé pour la redite!

)