De bien tristes nouvelles de Russie : apparemment, le parlement vient de voter la dépénalisation des violences conjugales et domestiques. Ça peut paraître naïf mais je suis choquée. Pour les enfants, ça ne m'étonne malheureusement pas, mais pour les femmes je suis sincèrement surprise.
Alors l'article est suuuuper pas clair et confond même des trucs.
En Juillet 2016, Vladimir Poutine avait déjà dépénalisé les violences domestiques lorsqu'aucune blessure corporelle n'est constatée. Ou la légalisation de la logique "pas vu, pas pris."
Ils n'ont pas compris du tout en fait... Avant juillet 2016, il n'y avait AUCUNE loi contre la violence domestique en Russie! En Juillet 2016, Poutine a
signé la première loi russe contre les violences domestiques! La loi introduisait la notion de coups contre des proches dans le code pénal. Donc cette loi permettait de punir jusqu'à deux ans de prison quelqu'un qui bat ses proches même sans conséquence pour leur santé. La violence domestique devenait punissable au même niveau que le hooliganisme et les crimes haineux.
MAIS le groupe conservateur avait déjà lancé une grosse campagne contre la loi et ils avaient réussi à convaincre Poutine de retirer certains articles qui auraient pu permettre de véritables poursuites.
Des arguments qui ont fait mouche puisque, sous son impulsion, 368 parlementaires sur 370 ont validé, en première lecture, la suppression des charges de violences domestiques du code pénal russe.
Oui l'idée c'est bien de retirer
certaines violences domestiques du
code pénal mais l'article ne précise pas que le groupe conservateur est toujours ok pour en faire une infraction relevant du tribunal administratif, donc passible d'amende et de service communautaire. Un non-juriste pourrait comprendre en lisant l'article du Huffington Post que les violences conjugales redeviendraient légales et c'est quand même pas le cas. Par ailleurs, la violence conjugale relèverait du tribunal administratif UNIQUEMENT s'il n'y a aucune blessure physique et que c'est le premier signalement. A sa seconde fois, le perpétrateur pourrait relever du tribunal pénal et être condamné à de la prison.
Et je trouve aussi dommage que l'article ne mentionne pas que la tête de campagne anti-criminalisation des violences conjugales dirige l'organisation qui a fait inscrire la notion de propagande homosexuelle dans la loi russe, en fait la "député ultra-conservatrice" dont ils parlent c'est pas nécessairement plus une représentante de la scène politique russe que notre Manif Pour Tous... Elle est très influente mais ça ne veut pas dire que les députés russes sont tous conservateurs comme ça.
Bref, cet amendement est certes problématique mais on parle d'un amendement à la toute première loi russe ciblant les violences conjugales qui date d'il y à peine 6 mois! Donc la loi n'est sûrement même pas encore appliquée, la police n'est certainement pas formée à prendre les plaintes etc., et la notion de violence conjugale n'est pas non plus entièrement rejetée. Je trouve que les journaux le présentent vraiment mal en mode "quel recul dans la Russie de Poutine alors qu'avant c'était pas comme!". Alors qu'en on est plutôt comme à l'époque du PACS en France où les députés sont pas allés jusqu'à permettre aux homosexuels de se marier mais ils voulaient bien quand même accepter la possibilité qu'ils puissent être officiellement en couple. On peut pas parler de "recul". C'est plutôt que la loi ne va pas assez loin ou que les députés sont ok sur le principe mais n'ont pas le courage de tout assumer et font un truc un peu entre deux.
Donc oui, féministement c'est un problème mais c'est pas tellement un signe de la dégradation sociale récente de la Russie (parce qu'avec des préoccupations légitimes comme le rôle des Russes dans la guerre en Syrie et l'élection Trump, j'ai l'impression que les médias se retrouvent à traiter le pays de manière un peu manichéenne...)