@-boobi- : un truc à ajouter sur ton questionnement de "pourquoi tu n'es pas partie" : il peut s'agir d'un phénomène psychologique appelé "sidération".
Il y a surement des madz qui connaissent mieux le sujet que moi, mais voici une petite définition : "
État de stupeur émotive dans lequel le sujet, figé, inerte, donne l'impression d'une perte de connaissance ou réalise un aspect catatonique par son importante rigidité, voire pseudoparkinsonien du fait des tremblements associés."
Que ce soit ça ou pas, l'idée, c'est que le mec te met dans une situation qui te semble tellement irréelle, tellement incongrue, que tu ne sais plus comment réagir, surtout qu'il est dans une situation où il détient une forme d'autorité et où tu es censée pouvoir avoir confiance en lui. Bref, comme le dit @morganegirly, de la manipulation. Mais sache que tu n'as pas à te dire "j'aurais dû..." ou "pourquoi j'ai pas ... ?", si tu n'as pas réagi, c'est que tu ne pouvais pas, et pas de la naïveté.
Si ton copain tient vraiment à toi (et qu'il est sensibilisé à la notion de victim-blaming, dans l'idéal ?), il ne devrait pas mal réagir. Si jamais il commençait à te demander pourquoi tu as fait ci ou pourquoi tu n'as pas fait ça, n'hésite pas à lui rappeler que ce n'est pas ton comportement qui est à remettre en question, et que le type t'a mise dans des conditions où il savait pertinemment que tu ne pouvais pas réagir. Il y a fort à parier que c'est un coutumier du fait et qu'il a sa procédure bien rodée - c'est comme se retrouver dans une arène face à des gladiateurs surentraînés alors qu'on vient de te balancer là sans te prévenir avec une épée en carton : tu n'avais à peu près aucune chance dès le départ, et tu ne pouvais pas deviner que la porte que tu as poussée débouchait sur une arène - bref, que quelqu'un qui prétendait vouloir t'aider avait en fait des intentions malveillantes.
Si jamais ton copain réagissait mal, n'hésite pas à revenir en parler ici.
EDIT : je précise que tu n'es ABSOLUMENT PAS obligée de lui en parler si tu ne le sens pas. Si tu penses que ça peut être encore plus difficile pour toi, tu peux attendre d'être à un moment où ce sera moins dur pour toi - à toi de sentir si tu préfères laisser sortir ça (et probablement obtenir du soutien de sa part) ou bien gérer ça seule et lui en parler quand la tension sera un peu retombée pour toi. Eventuellement, si tu as besoin de soutien et que tu doutes de sa réaction, tu peux te tourner vers une autre personne de confiance, quelqu'un de ta famille, un prof, un collègue, n'importe qui que tu penses à même de te soutenir. Fais confiance à ton instinct !
Je t'envoie plein de vagues d'amour pour la confrontation - souviens-toi bien que c'est à LUI d'avoir honte, c'est LUI qui a fait quelque chose de dégueulasse, et que tu as fait preuve de beaucoup de courage en allant porter plainte.
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Sinon, rien à voir, mais il y a quelques jours, j'ai laissé un commentaire sur un article de Crêpe Georgette.
Le contexte, c'est qu'un mec vient sur un article qui porte sur les violences sexuelles que subissent les femmes qui sont majoritairement perpétrées par des hommes, et la façon dont les coupables sont toujours effacés de la discussion.
Et donc, un homme vient poster ceci :
"Je ne sais plus quoi faire...
Plus je m'intéresse au féminisme, plus je gratte sur les échelons de domination et tout ce qui en découle, plus je me sens déprimé.
Je voudrais juste un monde simplement égalitaire...
Pas me rouler en boule à chaque fois que je trouve une nouvelle et évidente preuve.
...
Pardon pour mes chouineries."
Donc là, je suis un peu blasée de voir un mec qui se radine dans une discussion sur les violences sexuelles que les hommes font subir aux femmes pour
nous raconter à quelle point ça le déprime,
lui, de s'intéresser au féminisme, et que ça lui donne envie de "se rouler en boule". Je peux comprendre que ce soit déprimant de réaliser tout ça, bien sûr, mais là ça m'a donné envie de soupirer - tu viens dire à DES FEMMES à quel point c'est dur POUR TOI d'entendre parler des violences qu'ELLES subissent ?
Donc, je réponds :
"Suggestion : redresse-toi et participe au changement en luttant contre le sexisme ? Ça t'occupera, crois-moi !
Et dis-toi que les femmes aussi ont envie de se rouler en boule quand elles voient les chiffres, mais pour d'autres raisons, et que dans ce contexte, il y a peut-être un soupçon d'indécence à venir parler de ta souffrance."
Et là, je viens apparemment d'invoquer Satan, parce qu'une femme vient me répondre ça :
"Je réponds à Mamie Caro. Non, mais t'es sérieuse à répondre comme ça aux gens ? C'est dingue ce comportement incroyable que les gens s'autorisent à avoir sur le net. Cette femme, Seven, explique très honnêtement son sentiment d'impuissance en tant que féministe et sa tristesse de voir s'ajouter chaque jour des évidences sur les discriminations liées au sexe, elle le tourne même un peu en dérision en parlant de "chouinerie". Je ne supporte vraiment plus ce ton péremptoire. Pour peu, je t'insulterai. Mais je garde bien tout ça dans ma tête, car je ne te connais pas et je suis sur le web."
Bon, elle avait pas compris que la personne était un homme, ça arrive, malentendu tout ça. Mais quand une autre commentatrice souligne qu'il s'agissait d'un homme, elle persiste :
"Ah oui, donc bien évidemment, suis-je bête, vraiment, il doit juste bien fermer sa boucher. J'oubliais, un homme doit se taire. Je suis une femme, féministe radicale même. Je ne supporte pas qu'on rabroue des gens de cette manière juste parce que soit-disant ce sont des males-tears. Mince, les mecs aussi peuvent avoir de l'empathie, partager du désespoir, non ? J'entends bien qu'ils ne ressentent et ne vivent pas les mêmes choses que nous. Mais cette manière condescendante de répondre me fout vraiment la nausée. On avance pas comme ça, on reste à la surface. Ras-le-bol des agressions permanentes envers toutes celles et ceux qui ont le malheur de venir partager parfois leur sentiment de découragement !"
Est-ce que vous vous rendez compte à quel point il suffit d'évoquer qu'il y a "
peut-être un soupçon d'indécence" pour un privilégié de venir se plaindre de c'est-trop-déprimant-le-féminisme pour s'entendre dire qu'on a "un comportement incroyable", "un ton péremptoire", que je le "rabroue", que je suis "condescendante" et "agressive" ? Et s'entendre dire "pour peu je t'insulterai" ? Et tout ça venant d'une personne qui s'identifie comme féministe radicale ?
Est-ce que vous comprenez que PARFOIS, l'argument "il ne faut pas être trop accusatrice/vindicative/etc avec les hommes qui s'intéressent au féminisme" me fatigue ? Il n'y a pas besoin d'être ni agressive ni véhémente pour s'en prendre plein la tronche en retour. Il suffit
d'évoquer le privilège de quelqu'un pour que ce soit perçu comme une vile agression. Même avec des "peut-être" et des "soupçons", c'est trop trop cruel. Alors pardonnez-moi si des fois, ce genre de conversation me rend folle.