higreq;4732864 a dit :
Les stéréotypes féminins ne sont pas en soi dévalorisants, ils accordent à la femme une place nécessaire au bon fonctionnement du monde.
Oui et non. Ils ne sont pas dévalorisants en soi, mais ils ont été dévalorisés.
On peut tout à fait partir du principe (et certaines sociétés le font) que le rôle de la femme est de s'occuper de son foyer et celui de l'homme, de travailler, mais que les deux sont d'une importance égale et donc d'une dignité égale. C'est réducteur pour ceux qui ne se reconnaissent dans les stéréotypes de leur genre, mais c'est à peu près égalitaire.
(je dis à peu près parce la femme se retrouve quand même dans une position de dépendance, donc dans les faits, non ce n'est pas égalitaire, mais dans les représentations que l'on s'en fait, ça peut l'être).
Sauf que notre société ne considère pas du tout ces deux rôles comme égaux. D'une façon générale, tout ce qui est féminin est dévalorisé.
(note: je parle évidemment dans ce qui va suivre des valeurs attribuées à chaque genre et pas d'une quelconque vérité universelle)
Les garçons se tournent davantage vers les filières scientifiques, les filles vers les filières littéraires. Le bac S est le plus valorisé, le bac L, le plus souvent méprisé parce que ça sert à rien et qu'on va toutes finir chômeurs (oui, le masculin générique fait qu'on parle souvent au masculin quand on s'adresse à des filles). D'où une mauvaise orientation des lycéens qui sont guidés par les stéréotypes plus que par leurs goûts et les réalités du marché du travail.
(mon bac L et moi, on a eu plus d'offres d'emploi qu'on ne peut en accepter, merci pour nous).
Tout ce qui est de l'ordre de la productivité et de la croissance économique est masculin (c'est les hommes qui travaillent), tout ce qui est de l'ordre de prendre soin des autres et des générations futures est féminin (c'est les femmes qui s'occupent des enfants). J'ai comme l'impression qu'on ne foncerait pas tout droit à la catastrophe écologique (déjà bien commencée) si les dirigeants portaient des valeurs un peu plus féminines au lieu de mépriser tout ce qui ne permet pas de faire du profit... (et ce, indépendamment du genre de nos dirigeants, soit dit en passant).
Etre sexuellement actif, c'est un truc de mecs, la femme est censée ne consentir au sexe que par amour pour son conjoint parce que elle, c'est les sentiments qui l'intéressent. Un homme qui va donc être entreprenant et multiplier les conquêtes sera bien vu, il est dans son rôle; un homme plus timide, et/ou qui ne conçoit pas le sexe sans sentiments (donc perçu comme féminin) sera moqué par les autres hommes; "puceau", "tapette", sont des insultes courantes. Une femme sexuellement active se fera traiter de salope parce qu'elle n'est pas dans son rôle de femme, une femme qui attend le grand amour pour coucher se fera moquer parce que pour une femme non plus, se conduire de façon féminine, c'est pas bien vu.
La raison est masculine, l'intuition est féminine. Se fier à son intuition pour prendre une décision importante est très mal vu, la raison est partout célébrée comme LA valeur absolue. Et pourtant je peux t'affirmer que j'ai fait un tas de très mauvais choix en cédant à la pression sociale de penser ra-tion-nel-le-ment; par contre quand j'ai enfin accepté de prendre des décisions irréfléchies juste parce que je le "sentais" bien, ça s'est plutôt bien fini pour moi. Je dis pas que c'est un modèle qui vaut pour tout le monde, mais c'est comme ça que je fonctionne.
T'as un tas de pseudo-pédopsychiatres pour affirmer que le lien mère-enfant, indispensable à la survie du bébé (même s'il peut tout à fait être remplacé par un lien père-enfant quand le père accepte d'endosser un rôle traditionnellement féminin), en fait c'est mal. Aimer ton enfant, c'est l'étouffer, c'est être une mère abusive, et l'allaitement, c'est de la maltraitance, et prendre ton enfant dans tes bras quand il pleure le rendra capricieux. Un bébé qui pleure pour que sa mère le prenne dans ses bras ne fait pas un caprice, il exprime un besoin, ne pas y répondre ne va surement pas l'aider à se développer. (évidemment, je sais qu'un bébé c'est contraignant et qu'il va pas en mourir si tu le laisses pleurer trente secondes parce que tu es occupée; mais le laisser pleurer juste pour le laisser pleurer alors que tu es disponible pour t'occuper de lui, quel intérêt? Depuis quand pleurer c'est un truc épanouissant qui aide à grandir?). Donc, si tu prends un congé parental pour être présente dans les premières années de la vie de ton enfant, que tu allaites et que tu le prends dans tes bras quand il exprime un besoin de sécurité, tu es une mère abusive; mais si tu le fais pas, tu es une mauvaise mère. Et si t'as pas d'enfants, tu n'es pas dans ton rôle de femme, c'est mal. Par contre, un homme qui prend un congé parental sera peut-être moqué par certains, mais aussi admiré par d'autres; et personne ne trouvera rien à redire à un homme qui n'est présent dans l'éducation de son enfant que 30 minutes par jour (généralement pas celles où il faut changer la couche, apprendre à faire sa douche tout seul, ou préparer son cartable pour l'école). Pour beaucoup de gens, se consacrer à l'éducation de ses enfants est quelque chose qui a perdu toute sa dignité (oui on m'a déjà sorti cash qu'il n'y avait aucune dignité à être mère au foyer. Plusieurs fois)
Prendre soin de son apparence, de sa garde-robe et de son corps, c'est un truc de fille. Un homme qui le fait sera moqué par certains parce qu'il est pas viril, mais pas forcément par tous (tant qu'il ne s'éloigne pas
trop de l'idéal de virilité, qu'il ne porte pas de jupes ou du rose par exemple, il a le droit de s'intéresser quand même à la mode et d'aller chez le coiffeur, voire de soigner son alimentation). Un homme qui ne prend pas du tout soin de lui, tant qu'il n'est pas obèse et qu'il ne pue pas, personne ne trouve rien à lui redire. Une femme qui ne prend pas spécialement soin d'elle, par contre, aura droit à tout un tas de conseils condescendants; combien de fois ai-je entendu que je pourrais être tellement jolie en me maquillant et en portant des vêtements plus féminins... Si par contre elle passe beaucoup de temps à faire du shopping pour être élégante, on se moque d'elle parce qu'elle est superficielle. Parce qu'elle est trop femme en fait...
Et si une femme ou petite fille s'habille et se comporte comme un homme, certaines personnes vont s'en plaindre parce qu'elle n'est pas dans son rôle, mais beaucoup vont la trouver sympa et naturelle. Plus que cette petite pouf toute en rose n'est-ce pas? Par contre un homme ou un garçon qui se comporte et s'habille comme une femme à tous points de vue (pas juste en lui piquant certaines valeurs féminines citées ci-dessus qui restent encore pas trop mal vues, et donnera l'impression de le faire mieux que les femmes et en retirera plus de mérite) sera condamné de façon quasiment unanime. Parce que être un garçon, c'est bien cool, mais être une fille, c'est dégradant.
Pour résumer: les valeurs féminines sont dévalorisées partout et de manière systématique dans notre société comme niaises, superficielles, dépourvues de la sacro-sainte (et masculine) rationalité (sauf parfois, de temps à temps, certaines d'autres elles parmi les plus admirables peuvent être bien vues... quand ce sont des hommes qui se les approprient). Les valeurs masculines sont célébrées unanimement, mais faut pas trop non plus que les femmes y touchent, c'est réservé. Sauf de temps en temps si c'est pour se comporter comme un bonhomme afin de ne pas nous faire chier avec sa féminité, mais va pas pour autant t'imaginer que tu recevras les privilèges qui vont avec juste parce que t'aimes boire de la bière devant le foot et faire des blagues graveleuses. Ta présence parmi nous n'est que tolérée pour ce genre d'activités parce que t'es sympa, mais pas non plus légitime.
Les conséquences de la misogynie sont donc que d'une, les femmes sont oppressées, méprisées, maintenues dans la précarité économique, écartées des cercles de pouvoir, agressées impunément; et de deux, nous vivons dans une société qui glorifie à l'excès la compétition, la violence et le productivisme aux dépens du bien-être, voire de la survie.
Les conséquences de la misandrie, c'est que des fois, y'a des hommes qui vont se sentir blessés parce que certaines femmes ne les aiment pas.