agapanthe7;4768301 a dit :
Bonsoir,
Petite question aux habituees: vu votre degre d'implication dans le Feminisme, parvenez vous a garder le lien avec vos amis "d'avant" quand bien meme leurs ideaux differeraient?
J’ai choisi mes amis en fonction de ça aussi. C’est pas *pof* tu deviens féministe et tu fais le tri d’un seul coup. C’est un caractère, une vision du monde qui se construit petit à petit, souvent dès l'adolescence. Ce que tu appelles « voir à travers le prisme de », ce serait plutôt « avoir conscience de », mais je vais garder ton expression pour la suite du texte. Cela fait maintenant partie de tes schémas de pensée. Je suis féministe depuis mon adolescence, j’ai grandi avec ces idées, et j’ai choisi mes amis en fonction aussi. Un mec ou une meuf trop sexiste, ce n’est juste pas possible… le « minimum » sexiste, reste déjà trop pour moi. Quand j’ai déménagé de Paris pour le Sud, un tri s’est fait, et de fait les « simples connaissances » +- sexistes sont passées à la trappe.
Par contre la famille, ou les amis de la famille ! C’est autre chose !
Je ne peux pas forcément les dégager donc je les « supporte » quand je ne les aime pas et que je suis obligée d’avoir à écouter des propos limite-limite, voire nauséabonds, même si parfois si je peux je lance une remarque, la possibilité de le faire reste assez limité.
agapanthe7;4768301 a dit :
Je pose la question car irl je connais pas de gens impliques comme ca, et j'avoue que ca m'intrigue.
Ne craignez vous pas de ne plus voir les choses qu'a travers ce prisme?
Craindrais-tu de ne plus voir les choses au travers du prisme des Droits de l’Homme ? Non bien sûr que non ! Pourquoi craindre une avancée humaniste ? Au contraire, je l’embrasse complètement. J’aimerais que cela aille plus vite chez moi et partout dans le monde. Quoi qu’on dise sur les résultats obtenu, ou les freins mis en place, il y a un mouvement général, mondial. Le monde voit de plus en plus féministe, même si cela se fait très doucement, trop doucement. Mais cela reste une avancée globale déterminante.
Quand on applique au niveau sociétal une nouvelle norme d’égalité homme-femme et qu’on l’inscrit dans la loi, cela forge la pensée des gens qui y vivent. Cela donne une légitimité supplémentaire au combat féministe, maintenant. La lutte pour y arriver a commencé il y a longtemps, au 18e siècle en France, par exemple, en même temps que la lutte anti-privilèges du système monarchique et la lutte pour les Droits de l’Homme. La lutte pour le droit des femmes a eu une reconnaissance officielle dans les années 1940’s grâce au droit de vote, et dans les années 70 grâce au divorce, au droit à l’IVG et à la contraception, et elle continue toujours maintenant sur le plan de l’égalité salariale et sur les violences faites aux femmes, sur l’hyper sexualisation du corps féminin, sur l’exploitation du corps des femmes en général, etc
Ce que tu sembles « craindre » c’est le militantisme de tes amis IRL.
Tous les militants sont comme ça. Certaines personnes ont une conscience politique plus aïgue que d’autres et veulent changer leur entourage immédiat plus vite que la musique ou être sûr que le changement va bien dans leur sens. Ces gens-là participent à la dynamique mondiale qui favorisent la lecture par le prisme du féminisme/ principe de l’égalité homme-femmes.
La plupart des gens se contentent de suivre le système en place, sans forcément chercher à le remettre en cause. Ce n’est ni bon ni mauvais. C’est juste que les réactions diffèrent. Que sa société soit anti-femme ou pro-femme, pour certains peu importe, ils sont conformistes et adopteront les normes en place… Certains suivent, certains se soumettent. Certains voit quelques problèmes mais ne savent pas comment lutter contre ou ne préfère pas pour X raisons et préfère suivre le moule en place et y trouver une place malgré tout. Ils peuvent être gênés par certaines choses, mais ils restent fatalistes « c’est comme ça », « on ne peut pas le changer », « ce n’est pas la peine de le combattre »… D’autres, moins nombreux, chercheront à remettre en cause le système et essayeront de se battre contre cela, d’autres trouveront juste un courant quelconque et participeront +- fort à son implantation.
Remplace anti-femme, par n’importe quelle source de discrimination, ça marche aussi.
De même des militant antiféministes, masculinistes, pro-religieux, pro – life, anti ivg, etc… réagisse de la même manière : ils voient que le mouvement mondial tend à plus d’égalité, ils sont contre, ils militent, ils veulent freiner ce mouvement.
Cela marche aussi pour les mouvements économiques, libéral vs communisme, cf la guerre froide ! sur-consommation/décroissance, inaction face à la destruction de ressources dans le cadre libéral/écologie. Les mécanismes sont les mêmes.
Les gens qui se soumettent au système quel qu’il soit, je ne leur jette pas la pierre, car d'une certaine manière je *sais* que c'est plus facile de fermer les yeux que d'essayer de changer les choses. J'ai parfois envie de les secouer comme eux peuvent avoir envie que j'arrete de gesticuler contre le système. Ils me voient peut-être gesticuler vainement, à tort ou avec une pointe d’envie, ou juge que j’ai raison mais ils sont trop fatalistes pour venir changer les choses aussi, ou parce qu’ils ont peur de se faire remarquer, ou parce qu’ils ne se sentent pas concerné, ou simplement par lâcheté ou étroitesse d’esprit. Qu’importe au fond, j’estime que j’ai le droit de me battre contre quelque chose que je trouve injuste. Et quand *autant* de gens le font, ça fait changer les choses.
Pour l’investissement ou la sensibilisation au féminisme, cela se voit beaucoup plus chez les filles que chez les garçons.
De fait, dans mes amis garçons, tous sont d’accord pour améliorer l’égalité homme-femme.
Après y a des sujets de divergence parfois sur certains points, des propos sexistes, des propos putophobes qui leur échappe, des propos de nice guy, des propos de mecs frustrés qui s’envolent dès qu’ils trouvent une meuf -_-, bref des petits recadrages à faire, mais ça je le rencontre aussi chez des copines, mais en moins grande proportion, car ce n’est pas *toutes* les filles qui se déclarent féministes et qui agissent en pratique. Personnellement, toutes mes copines sont un petit peu féministe, aucune de mes amies n’est assez imprégnée du patriarcat pour dire que la femme est inférieure à l’homme. Je peux relativiser ce propos en disant aussi, que je n’aurais certainement pas pu être amie avec quelqu’un qui penserait autrement. (Mais même dans la famille et les amis de la famille, personne ne pensent vraiment cela, au pire ils sont dans le délire « naturaliste/complémentarité ». Ils ne disent pas « elle est inférieure en tout", mais "il y a des choses où elle est inférieure et des choses où elle est supérieure ». Bon j’ai du mal avec ce discours, mais comme je disais, *eux* je suis obligée de les supporter -__-.)
Bref, toutes mes amies sont favorables à l’égalité homme-femme. Toutes considèrent les luttes comme légitime et sont contente de profiter de leurs fruits. Par contre TRES PEU sont militantes au quotidien, à lancer des posts sur les réseaux sociaux, à faire des débats avec les gens dès que possible, techniquement dans mon groupe d’amis, nous sommes cinq à qui si on nous demande « tu es féministe ? », nous répondrions « Oui ! » sans hésiter. Cela se voit également sur le fait qu’on en parle volontiers et notamment sur internet, et je vais vous donner l’exemple de ma liste Facebook.
Nombre de personnes qui ont fait un post ou relayé une info féministe au moins une fois cette année. (Moi, inclus, ça fait une F-liste de 118 personnes)
16 / 73 filles = 22 % des filles de ma F-liste.
6 / 47garçons= 12.7 % des garçons de ma F-liste.
total 22 /118 personnes = 18.6% de ma F-liste.
Ainsi 18.6% des personnes de ma F-liste relaient des infos féministes. *happy* C'est plutôt pas mal ^^
Cela ne veut pas dire que les 81.3 % restant sont antiféministes ou insensibles, cela ne veut pas dire qu’ils ne sont pas féministe non plus, cela veut juste dire qu’ils ne militent en aucune façon sur FB sur le féminisme.
Pour le projet « moi aussi », (je linke @Salvia , le feed-back peut l’intéresser) on était :
-5 à l’avoir mis sur 73 filles soit 31% des filles féministes militantes de ma f-liste, et 6.8% des filles de ma f-liste. (3 l’ont toujours à ce jour dont moi).
-1 garçon sur 47, 20% des garçons féministe militant, et 2 % des garçons de la F-liste.
Au total, 6/ 21 = 28.5 % des personnes féministes militantes, et 6/118 = 5 % de la f-liste ont adopté le badge "Moi Aussi".
Le projet a donc pas mal pris chez les militants FB, quasiment 30% ! Le bouche à oreille a bien marché je trouve.
Evidemment quand on regarde que cela ne représente que 5 % de la f-liste, ça fait peu. Mais c'est raccord avec le % de représentation de n'importe quel revendications. Aucun non-militant habituel n’a changé son avatar pour ce projet particulier, ni ne s’est découvert une vocation militante sur internet. Mais des non-militant ont liké les posts que j’ai faits à ce sujet, c’est que ça les a touché quand même.
Chaque jour son combat
agapanthe7;4768301 a dit :
Regrettez vous le manque de "conscience" de certains acolytes du reel?
TOTALEMENT. J’ai envie de les secouer comme un prunier par moment!
Je les plains parce qu’ielles se briment et se laissent brimer et briment autrui.
Ces gens me gène également sur le plan humain car ils font preuve d'un manque d'empathie assez déroutant, voire effrayant.... et chose "moins grave" d'un manque de vision globale assez effarant, qui parfois est dû un manque de connaissance, ce qui n'est pas grave, il suffit d'apprendre. Mais parfois même en leur apprenant les choses, je note la préférence du chez-soi confortable, la volonté de garder ses œillères et sa non-culture afin de continuer à faire souffrir les autres sans "mauvaise conscience", en dépit des souffrances causé à autrui. C'est souvent le signe d'un égoïsme profond. Et oui forcément j'ai carrément du mal, humainement, avec ce genre d'individu.
Ainsi le "manque de conscience" peut être très volontaire de la part des personnes...
Cela dit ces personnes restent rares, je regrette plus souvent le manque de militantisme chez ceux qui partagent mes idées, je me dis qu’on serait tellement plus impressionnantes en nombre si toutes nous élevions nos voix en même temps. Mais bon, tant pis, cela se fera sans ielles et cela se fera petit à petit, et au final , ielles seront bien content que ça leur profite aussi.
agapanthe7;4768301 a dit :
En tant que femmes, vous etes plus en colere, plus craintives,ou les deux, a mesure que vous vous ouvrez au Feminisme(au sens large. Je n'ignore pasle fait qu'il y ai moult courants)?
Moins craintive, pour toute la vie.
Plus en colère, de temps en temps.
Plus réfléchie et plus attentive quand je regarde les divers courants.
Moins Craintive pour toute la vie :
Oui totalement, le féminisme, ou la vision féministe plutôt m’apporte une force incroyable. Elle donne une légitimité chacun de mes actes, quand la société ou les individus m’enlèvent des droits. De même que la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen ! Mais le féminisme donne une place aux femmes dans cette Déclaration des Droits.
J’ai raison de dire ça, j’ai raison de vouloir me faire entendre, j’ai raison d’essayer de me battre contre tel ou telle chose. Je n’ai pas tort d’exister et de le faire savoir. J'ai tort de m'en vouloir alors que j'ai raison! La culpabilité que je ressens n'est que l'expression de tel chose ou telle autre qu'on m'impose à dessein.
Les sciences vues par le prisme féministe m’ont offert des clés de compréhension à un malaise que je ressentais sans en comprendre l’origine.
Et c’est un trait de caractère peut-être personnel… quand je suis malade, je stresse plus de ne pas savoir ce qui m’arrive que de savoir ce que j’ai. Quand je sais enfin ce que j’ai, c’est bon, je peux gérer. Ne pas savoir *pourquoi* est une source de malaise intense.
Mais c’est une question récurente à l’humain, quand il nous arrive quelque chose de mal, on se demande toujours pourquoi ça arrive? Pourquoi nous ?
Quand tu es minote et que tu fais face à des trucs injustes, voire crades, tu es HEUREUSE de voir que l’injustice que tu as ressentie est *partagée* par d’autres, que d’autres avant toi l’ont compris, crié, écrit, chanté dans des manifestations, des livres, dans des Cours de Justice des séances parlementaires, dans la loi…
C’est infiniment salvateur de se sentir soutenue dans son combat contre les injustices que tu subis personnellement, dans celle que tu vois commettre sous tes yeux… Parfois quand tu comprends dans quel sens toi-même tu as pu participer au cycle d’enfermement dans lequel tu te débats si maladroitement, tu as le moyen d’arrêter un cercle vicieux ! C’est un atout formidable.
Tu prends conscience de toi en tant qu’être, et non plus en tant qu’objet. La société/le patriarcat a, depuis des millénaires, nié ton être et en te réduisant à ton corps-objet.
Le féminisme est aussi la lutte pour renouer ces deux entités.
Nous étions vues de manière incomplète, et nous nous sommes vues longtemps de cette manière. Nous nous battons pour le redevenir à nouveau complète et être vue comme telle.
Le féminisme me conseille, me dit, m’ordonne de devenir un être humain à part entière.
J’approuve ce message!
Plus en colère, de temps en temps :
Et oui je redeviens colère quand je vois que la société me refuse d’être un être humain à part entière, quand la société ou des individus me ramènent encore à mon corps-objet. Je ne suis pas qu’un corps. Prends conscience de ça mec/meuf.
Je suis un être douée de volonté, de conscience, je ne suis à disposition et corvéable à merci, mon corps ne t’appartient pas, tu n’as aucun droit de me réduire à cela, tu n’as aucun droit de me malmener, de m’insulter physiquement ou intellectuellement, tu n’as pas le droit de te servir sur moi.
Si je n’ai pas forcément pu avoir la force physique d’empêcher un mec de m’agresser, je sais au moins qu’il n’avait pas le droit de le faire, et que ma colère est JUSTE.
Je *me* donne les armes, le courage d’empêcher que cela se reproduise. Je ne veux plus souffrir de leurs mains.
Plus réfléchie et plus attentive quand je regarde les divers courants :
Cela c’est plus à niveau intellectuel que cela se présente. On est toujours dans le « avoir conscience de » mais à un niveau plus élargi. On dépasse la simple portée personnelle. On essaie de comprendre l’autre. Celui qu’on ne connaît pas par définition. C’est un mélange de philosophie et d’empathie, d’éthique, de respect et peut-être de tolérance, au sens strict « accepter ce que l’on ne peut comprendre ».
Je suis un être capable de raisonner et d’avoir de l’empathie. Ce que les hommes ont dénié aux femmes pendant des siècles, je le réfute et je le prouve chaque jour, dans une société qui, au moins maintenant l’accepte en partie, et c’est notre chance par rapport à nos aïeules, nous sommes dans un terreau de plus en plus favorable à l’expansion de ces idées, même si ça freine encore.
Par exemple, je suis bi, mais je ne suis pas transsexuelle ni asexuelle, je ne comprendrais jamais ce que veut dire *être transsexuelle ou asexuelle*. Pour autant, je suis capable d’éprouver de l’empathie, je peux *essayer* de comprendre, je peux ne pas faire la sourde oreille et être une alliée quand j’entends leurs souffrance ou leurs revendications.
Et c’est la même chose pour les « autres » que je ne serai jamais. Si cela consiste à me ramener mon corps-objet…. JAMAIS je ne l’accepterais.
Comme un homme cis-genre. Je ne comprendrais jamais vraiment ce qu’est *être un homme cis-genre*, je suis tout à fait prête à entendre leur souffrance et leurs revendications.
La souffrance, on est juste dans l’empathie, je pourrais l’écouter quoi qu’il dise, c’est plus au niveau des revendications que se pose le problème.
Si ces revendications sont légitimes, mais oui, bien sûr je peux les entendre et me battre avec lui, et il sera peut-être étonné de voir que je me battais pour avant même qu’il m’en parle…. Parce que la culture féministe invite aussi à réfléchir sur le genre et la virilité !
Mais si ses revendications consiste à me nier mon humanité, à continuer ou à revenir à un état antérieur de corps-objet, et bien je l’enverrais se faire foutre copieusement ! Je ne l’accepterai pas. Je le renverrai à ses contradictions et je l’accuserai de rétrograde (puisque c’est effectivement nous ramener à un état antérieur) et je le conchierai pour son manque d’empathie.
Il demande qu’on se mette à sa place ? Ben mets-toi à la mienne, et on en reparle.