@Arpège_
A la différence que pour ma part, je pense qu'un noir ne peut être raciste envers un autre noir parce que derrière le mot ''racisme'' il y a toujours l'idée d'un rapport de force inégal : oppresseur/opprimé ou inférieur/supérieur, un oppresseur qui va se voir être privilégié grâce à une superstructure raciste, et un opprimé, victime d'un pouvoir structurel arbitraire dont la structure idéologique va être érigée contre son identité.
Le racisme intégré ou auto-stigmatisation est ce qui permet en autre la pérennisation du racisme structurel, pas sa cause profonde, la cause c'est l'idéologie raciste qui crée cette auto-discrimination provenant d'un complexe d'infériorité intériorisé.
Un afro-descendant qui a intégré ce racisme est victime avant tout puisque ce racisme est dirigé contre sa propre personne, celui qui est rongé par ce racisme, par ce complexe d'infériorité est celui qui en pâtit le plus dans l'histoire c'est pas celui qui a réussi à s'en débarrasser et qui est maître de lui même, lui il a des armes pour l'affronter alors que l'autre est démuni.
Dans le cas de la mise en place de certaines hiérarchies sociales basées sur la couleur de peau (''colorisme'') par exemple, les teints plus clairs détiennent un privilège social mais ce privilège est toujours conçu contre leur identité noire qui ne va pas les empêcher de pâtir du racisme structurel, ils ne peuvent pas être oppresseurs puisqu'ils subissent cette idéologie.
Après, est-ce qu'il s'agit de mener un combat contre ceux ceux qui subissent la même oppression ? Je pense qu'il s'agit plutôt de pédagogie parce qu'au fond, celui qui va tenir des propos racistes sur sa ''communauté'' croit juste que ça le protège d'être mis dans le même paquet ou alors il ne va même pas avoir une réflexion critique sur les opinions qui lui ont été transmises en pensant que ce sont celles du grand nombre et que forcément elles sont légitimes. De ce que je peux dire par expérience, la plupart avec qui j'ai discuté perçoivent qu'il y a une certaine injustice là dedans, que les blancs sont privilégié sans pour autant mettre le mot dessus, et qu'ils n'en profitent pas, c'est juste qu'ils n'ont jamais essayé de remettre ça en question. Evidemment, certains sont tellement aliénés qu'ils perçoivent le privilège blanc et le légitimisent, mais ce sont ne sont pas des ennemis, ce sont les principales ''victimes'' ici encore. Je veux éviter toute victimisation parce qu'il faut bien reconnaître que leurs propos et actes sont problématiques mais comment les blâmer alors que finalement, nous sommes tous passé par ce stade, et que c'est un stade important avant une prise de conscience qui n'en est que plus efficace. Personnellement, c'est parce que j'ai connu ce complexe d'infériorité et que j'observe encore des gens qui sont encore empêtré là-dedans, même desservant la cause de l'anti-racisme que je juge qu'il faut se battre, sinon pour qui est-ce qu'on se battrai ? Bon pour quoi, je le sais, une certaine idée de justice et d'égalité mais bon.
*La déclaration je suis noir donc je ne peux être raciste était plutôt dirigé contre les accusations de ''reverse racism'' ou ''racisme anti blanc''.
Merci pour ta réponse qui me donne matière à réfléchir
Je vais essayer de mettre tout ça en ordre.
Tu mets le doigt sur ce qui me questionne le plus. Finalement selon toi c'est le statut de victime (mais j'ai bien compris que tu ne fais pas dans la victimisation) dans l'absolue qui justifie que dans un cas - celui d'un blanc - on jugera un comportement raciste, et dans l'autre - un noir - ce sera très problématique, en gros ?
Ce qui me pose problème, c'est que finalement la cause et l'effet de ces comportements sont exactement les mêmes: dans les deux cas l'individu intègre l'idéologie dominante, perpétue une certaine violence et cause du tord aux dominés. Je comprends qu'on puisse juger ça à l'échelle systémique/institutionnelle pour en "excuser" un, mais je comprends aussi la notion de racisme comme un tout: stéréotypes et préjugés en cours dans une société, intégrés par une majorité dominante, discriminations, invisibilisation (
), violences symboliques et physiques à l'encontre de la minorité opprimée.. Du coup je vois différentes échelles intervenir, qui s’alimentent les unes les autres, dont l'échelle individuelle qui a une part importante dans ce "tout" (la "paresse" intellectuelle et artistique d'un artiste qui va pondre
Exhibit B, par exemple
).
J'ai du mal à me dire qu'à l'échelle individuelle, on ne jugera pas de la même façon un noir et un blanc; le blanc est en position de dominant malgré lui (ses privilèges, pour la plupart, il ne les prend pas, il les a), s'il baigne dans un environnement raciste c'est malgré lui au départ, et je préfère me dire qu'il y a plus d'ignorant que de raciste pur et dur, qui pensent avoir une vraie "opinion". On ne jugera pas une personne raciste, mais on jugera ses actes et ses propos, qui reflètent un système d’oppression dans la société (et c'est la responsabilité de chacun de prendre conscience de la place qui lui est donnée, et de changer ses réflexes), et là.. j'ai du mal à faire une distinction noir/blanc, même si je comprends bien qu'il y a un complexe d'infériorité chez l'un. Finalement on a toujours deux comportements racistes, qui sont les conséquences (plus vicieuse et dramatique dans le cas d'un noir) du racisme à une plus grand échelle..
D’ailleurs tu parles de pédagogie dans le cas d'un noir au comportement/propos problématique, plutôt qu'un combat contre eux (et je suis complètement d'accord), mais c'est pareil pour un blanc, non ? La société devrait travailler à lui faire déconstruire son système de pensée raciste, là non plus je pense pas qu'il dervait y avoir "combat" contre un individu, mais plutôt contre la société (ses institutions, etc.) qui "valide", qui elle est raciste et n'a toujours pas fait ce travail là.
En fait j'ai du mal à comprendre ton poste autrement que comme "c'est raciste, mais", quand il s'agit d'un noir
. Par exemple presque tout ton dernier paragraphe, je pourrais le reprendre pour le cas d'un blanc, et pourtant je vois les nuances que tu apportes et au fond je suis d’accord avec toi (c'est d'autant plus confus).