Pourquoi le métier de prof inspire-t-il de moins en moins de monde ?

[katell lb]

J’enseigne en Seine Saint Denis depuis 4 ans . J’ai passé un concours spécial pour l’academie de Créteil .
J’adore mon travail, mes élèves . Ce qui est difficile c’est qu’une fois dans cette académie , être mutée reste difficile . Je viens de Province et la région parisienne n’est pas l’endroit où je me vois vivre encore longtemps .
Après la première année était très dure . La charge de travail , la gestion des parents, des élèves et de tout l’administratif dont on ne parle pas à l’ESPE.
Après beaucoup de collègues stagiaires démissionnent car parfois la réalité du terrain est dure . Nos élèves vivent des choses socialement , scolairement qui sont difficiles.
On se forme seuls , j’ai eu pendant deux ans une classe ulis ( élèves avec un handicap ) , j’ai postulé pour la formation et je ne les ai jamais eues.
C’est un métier humain , enrichissant , les élèves apportent énormément.
Mais je pense qu’il faut être conscient des réalités du métier . Le salaire ne sera jamais mirobolant , c’est un travail humain donc c’est déstabilisant . Et je me demande si je pourrais le faire toute ma vie .

 

[katell lb]

Et aussi le concours semble plus facile à passer à Paris . Et bien non , il y a juste plus de postes . Après le boulot sur le terrain est difficile et il faut tenir . Donc non on ne nous emploie pas à 5 de moyenne. Mais oui ils vont plus loin sur les listes complémentaires car peu d’enseignants veulent venir et on peine à remplacer , avoir de nouveaux enseignants.

 

[Izaping]

Vus de l'extérieur:
Ma "demi-soeur" est professeur des écoles. Elle à galéré pour le concour. On lui demandait de tous savoir dans toutes les matières. Vus les bouquins je me demande encore comment elle a fait.
Après elle a été un moment en attente de titularisation en région Parisienne. Deux ans je crois. Depuis elle est titulaire dans Paris. Mais elle le dit elle même. Avec son salaire jamais elle ne pourrait vivre aussi confortablement qu'aujourd'hui. Son homme ayant un appartement de fonction assez attrayant.
Elle fait se métier part vocation! Et même si on ne s'aime pas avec un grand A. Je respect cela.
Je suis juste triste de voir certain parents/élèves complètement irrespectueux. (Des enfants de 7/8 ans! )
Je suis triste qu'elle ne soit pas aussi bien payé qu'on pourrais l'espérer pour un métier aussi fondamental que professeur des écoles.
D'autre part j'ai passé plusieurs soirées avec des professeurs d'Université. Et eux aussi faisaient ça pour le kiff. Pour l'envie de transmettre leur "Savoir". Mais la plus part sont des professionnel du métier/matière qu'ils enseignent. Ils ne sont pas issus des concours.
Donc franchement de loin: le métier de prof' (quand on repense à notre expérience comme élève et maintenant avec des yeux d'adulte) c'est vraiment un métier de vocation. Une vrais envie.

 

[Sievari]

@ClematisLe rôle de l'école est d'instruire et d'apporter des savoirs pour pouvoir avoir le choix plus tard dans les formations et le travail.

Le rôle de base de l'école c'est de former des citoyens, pas des travailleurs (normalement). Et apprendre le vivre ensemble fait (à mes yeux du moins) partie des "devoirs" du citoyen. Qu'est-ce qui est mieux: vivre avec des gens tolérants, polis et solidaires ou vivre avec des connards en costume trois pièces ? Le problème c'est qu'aujourd'hui le rôle de l'école est dévoyé et on associe école avec travail. Alors certes ça ne peut pas être totalement déconnecté (c'est indispensable pour sortir des cercles de reproduction familiaux, par exemple), mais l'école reste le premier endroit de socialisation donc elle a un rôle dans le vivre ensemble. Ce qui serait bien c'est que ce soit reconnu, notamment en redonnant de l'autorité aux enseignants vis-à-vis des parents.

 

[Carlawn]

J'ai enseigné un peu par le passé, et j'ai passé plusieurs fois le concours pour devenir prof des écoles. Mais ce qui m'a toujours dérangé, c'est le poids de l'institution sur les profs et les établissements. En master PE, ça me pesait déjà, on sentait qu'on cherchait à nous formater pour rentrer dans les cases de ce que voulait le gouvernement. Je l'ai d'autant plus remarqué que j'ai eu la malchance de tomber entre deux réformes (changement de gouvernement de Sarkozy à Hollande).
Les profs qui nous formaient faisaient de leur mieux, mais du fait qu'il y avait des problèmes de communication avec les inspecteurs, les recteurs d'académie et le ministère, et des guéguerres hiérarchiques bah c'était compliqué. Et puis, on demande aux profs de faire toujours plus (inclusion pour les élèves en situation de handicap, aide individualisée, formation au numérique, aux langues étrangères etc.) avec toujours moins (le salaire en début de carrière à Bac plus 5, c'est juste une blague).

Même le concours, j'ai eu le sentiment qu'on s'en fichait complètement de ma motivation et de ma personnalité (c'est un comble parce que c'est ce qui est déterminant dans ce genre de métier social), qu'on m'interrogeait seulement sur mes connaissances et la façon dont je voulais les transmettre. Que ce soit les écrits et les oraux.

Quand je faisais des remplacements, je me sentais pas du tout soutenue par l'institution, on te jette dans le moule et tu te débrouilles. Là je suis contente de ne plus enseigner, c'est trop de stress et j'apprécie d'avoir vraiment fini ma journée une fois que je suis rentrée chez moi. Après, ça reste un métier passionnant, et si tu as de la chance, tu peux tomber sur un super établissement où l'équipe est soudée et des classes vraiment supers. Mais n'empêche qu'il serait grand temps que le gouvernement fasse quelque chose pour régler les inégalités scolaires, parce qu'au rythme où vont les choses, on va droit dans le mur.

 

[primeval]

Bonjour,
Je suis professeure de français depuis le mois de janvier. Je suis Belge donc il y a des différences par rapport à la France mais je voulais malgré tout apporter ma pierre à l'édifice.

J'ai eu la chance de pouvoir effectué un remplacement jusqu'à la fin de l'année dans une bonne école c'est-à-dire une bonne ambiance dans la salle des professeurs, de l'entraide et un soutien de la direction. J'ai eu beaucoup de chance de pouvoir débuter ma carrière dans ce type d'établissement.
Malheureusement, je n'ai toujours pas eu de propositions d'emploi. Je sais que je vais devoir faire face à une instabilité durant les premières années et je peux comprendre que cette insécurité démotive les futur.e.s candidat.e.s.

Dans ma très courte expérience, j'ai dû faire face à
- des élèves pénibles et qui cherchaient à me "tester" '(chambard ...),
- des parents qui minimisent le comportement de leur enfant ("oui, mais il est jeune c'est pour ça qu'il est turbulent. Ça lui passera"),
- des collègues qui me prenaient pour une élève ("Les élèves ne peuvent pas quitter la cour" Remarque prononcée devant des élèves ou comment saper mon autorité )
Mais aussi à
- de l'entraide: partage de séquences, conseils, assistance dans une classe plus difficile (Une collègue a passé du temps avec moi dans une classe pour m'aider )
du soutien: la direction prête à me soutenir dans mes sanctions, l'équipe éducative qui passait voir si tout allait bien ...
- des moments de joie avec les élèves et de partage
- des moments de satisfaction en les voyant réussir

Bref, être professeure est ma passion et je sais que je passerai par des moments pénibles, que mon travail ne sera pas toujours reconnu ("Vous n'avez que ça à faire" "Vous êtes toujours en vacances" "C'est de votre faute si mon enfant rate" ...) mais je ne baisserai pas les bras et continuerai ma vocation.

 

[meloboe]

J'ai été professeur en collège 1 an, dans un collège rural, l'année de ma titularisation (j'avais eu le concours en Master 1) donc : inspection, mémoire, master et les cours.
La pire année de ma vie...
zéro emprises sur les élèves perturbateurs (dont les parents se vantent...) sous cause de "bienveillance". Par ailleurs, des classes chargées.
Le système scolaire est complètement caduc, la plupart des problèmes que j'ai eu viennent des fameux 2-3 "perturbateurs" capables de pourrir une classe, et je les comprends, ces élèves n'aimaient pas ce qu'ils faisaient, et en effet ils n'avaient rien à faire dans ce système, quand ils savent qu'ils veulent faire un métier manuel. Le collège pour tous, est une ineptie.
Résultat, je quitte l'éducation nationale, et j'en suis fort heureuse!
Bon courage à ceux qui ont la vocation...

 

[Efimeri]

Pour moi l'école doit instruire (donc transmettre le savoir et les connaissances) et pour le faire convenablement doit avoir un rôle d'éducateur (de guide notamment au niveau des valeurs, des convenances sociales,...) parce qu'on instruit pas les personnes unes par unes, on les instruit en groupe.
Le problème c'est que ce rôle d'instructeur est généralement sapé par les parents d'élèves (qui estiment que le professeur exagère quant au comportement de l'enfant) mais aussi par la hiérarchie qui peut ne pas suivre et valider les sanction d'un professeur, sapant ainsi son autorité et sa légitimité.
Il y a des professeurs complètement immondes mais en règle générale ce ne sont pas des tyrans donc quand ils punissent c'est qu'il y a une raison. Je pense que les parents se plaisent à croire que les enseignants sont de sombres incapables ne pouvant pas faire face à leurs adorables-chérubins-tellement-mignons-et-gentils-qui-se-tiennent-bien-parce-que-ce-sont-leurs-enfants-et-qu'ils-les-ont-tellement-bien-éduqué-ces-chers-petits-anges et qui donc se vengent en leur pourrissant la vie. Certains sont vraiment aveugles au comportement de leurs enfants.
Je pense que l'ingérence de ces parents ne devrait pas être permise. L'école est une institution, elle doit être indépendante de la cellule familiale justement parce que les professeurs ont un rôle différent à jouer que celui des parents.

 

[Adopteunefolle.com]

J'ai été professeur en collège 1 an, dans un collège rural, l'année de ma titularisation (j'avais eu le concours en Master 1) donc : inspection, mémoire, master et les cours.
La pire année de ma vie...
zéro emprises sur les élèves perturbateurs (dont les parents se vantent...) sous cause de "bienveillance". Par ailleurs, des classes chargées.
Le système scolaire est complètement caduc, la plupart des problèmes que j'ai eu viennent des fameux 2-3 "perturbateurs" capables de pourrir une classe, et je les comprends, ces élèves n'aimaient pas ce qu'ils faisaient, et en effet ils n'avaient rien à faire dans ce système, quand ils savent qu'ils veulent faire un métier manuel. Le collège pour tous, est une ineptie.
Résultat, je quitte l'éducation nationale, et j'en suis fort heureuse!
Bon courage à ceux qui ont la vocation...

Il n'y a pas les SEGPA pour ceux qui veulent commencer à se professionnaliser petit à petit ?

 

[LovelyLexy]

Il n'y a pas les SEGPA pour ceux qui veulent commencer à se professionnaliser petit à petit ?

Pas vraiment, non. Déjà les SEGPA c'est souvent plus une sorte de pansement sur une jambe de bois ( on mélange toute sorte de profils juste parce qu'on ne sait pas quoi en faire et on laisse les profs gérer), et en plus on demande quand même une part académique...

 

[skippy01]

Je pense que l'ingérence de ces parents ne devrait pas être permise.

Le problème, c'est comment faire ? On ne sait toujours pas comment empêcher un parent de faire de la merde avec ses gosses, sauf dans de rares cas où l'assistance publique peut agir, mais on ne peut quand même pas demander à cette dernière de fliquer tous les parents, ce serait techniquement impossible.

 

[Hipcherry]

Je souscris aux propos des collègues.

Je ne considère pas du tout avoir la "vocation" (et plus j'avance dans le métier, moins je suis sûre de savoir ce que c'est) ; en revanche, je pense faire preuve de beaucoup d'abnégation face aux réformes (j'ai commencé l'année qui précédait la réforme du collège, je vais maintenant découvrir la réforme du lycée, eh oui, les choses vont vite dans l'EN) et face aux propos qui sont souvent tenus à notre égard, que je ne ressasserai pas parce qu'on est encore en vacances. Je considère qu'on ne peut rien faire sur le long terme, tant l'école est à la disposition des lubies politiques et pédagogiques des uns et des autres. J'en ris sinon je passerais ma vie à pleurer : après avoir "interdit" le téléphone à l'école, Blanquer promeut le AVEC, Amenez Votre Equipement personnel de Communication. La rentrée est la semaine prochaine, on ne sait TOUJOURS pas quand les élèves passeront les tests de positionnement pour l'accompagnement personnalisé en français et en maths. Ne parlons même pas d'obtenir les résultats et de ce qui se passe si, comme souvent, un élève avec de grandes lacunes en français en a aussi en maths. Il ne faut pas être pressé et angoissé dans l'EN ! Et c'est comme ça tout le temps (pensée aux collègues qui ont vu l'épreuve du DNB changer en pleine année scolaire).

Ce sont les élèves qui rendent le quotidien vivable : je crois que j'arrive à les prendre là où ils sont, bien que souvent ils n'en sont pas du tout là où ils devraient être, à les prendre tels qu'ils sont, etc. Heureusement que certain-e-s verbalisent beaucoup et c'est toujours un plaisir d'entendre le "ahhhhhhh" qui veut dire "j'ai enfin compris" ou de constater que les personnages suscitent des réactions (même si c'est du dégoût ou un profond rejet). Je crois qu'on me le rend bien puisque je ne suis visiblement pas la professeure la plus détestée du lycée et que mes élèves viennent souvent taper la discussion. Après je suis dans un lycée assez tranquille, nos résultats au bac sont déplorables (on est presque les plus mauvais du département) mais les élèves sont dans l'ensemble très sympas et il y a peu de cas vraiment difficiles (en 2de, sur environ 200 élèves, on a eu deux conseils de discipline et une exclusion définitive), la proviseure gère plutôt bien le lycée. Si tou-te-s les chef-fes d'établissement se montraient fermes et ne mettaient pas en doute la parole de leurs professeurs, ça irait probablement un peu mieux dans certains bahuts.

Si c'était à refaire, je pense que je le referais (parce que j'ai la chance d'avoir un bon contact avec la majorité de mes élèves et d'être dans un lycée vraiment tranquille où l'on peut travailler, j'aurais probablement un discours différent ailleurs et je suis lettres modernes, pas classiques, je morfle largement moins). À niveau d'étude égal et à années d'expérience égales, mon mec gagne mieux sa vie que moi mais il ramène lui aussi du boulot à la maison le soir et on l'a appelé pendant les vacances... Pour 700€ de moins, je garde ma tranquillité pendant les vacances.