Je relance un peu le topic ! Avec un pavé
(je ne pensais pas blablater autant).
Ma conso a repris à la hausse au mois de mai. J'ai pris 3 (grosses) cuites :
- Une, sous un prétexte fallacieux (anniversaire d'un proche), surtout parce que j'étais très anxieuse par rapport au travail et que j'avais besoin de relâcher la pression ;
- Une autre, parce que j'ai été obligée d'aller à une soirée (sous peine de subir une crise diplomatique conjugale) et que je m'y suis sentie terriblement mal à l'aise (donc j'ai picolé dès l'aprém pour me désinhiber et faire passer le temps) ;
- Et la dernière, parce que je me sentais hyper mal à la suite de cette fameuse soirée (qui a évidement tourné en eau de boudin), que j'ai plongé dans un gros coup de déprime donc j'ai profité de la réouverture des terrasses pour noyer mon chagrin et me donner un semblant de légitimité.
L'alcool a pour moi deux fonctions principales :
- Soupape : plus jeune, j'ai commencé à boire car j'étais très déprimée et frustrée par ma vie (je n'avais pas choisi mon domaine d'études, et ma vie familiale était anxiogène, etc). Penser à la cuite du week-end me permettait de tenir le coup. C'était ma façon de dire merde à tout, d'extérioriser mes sentiments et ma souffrance. Je ne pouvais pas m'exprimer, donc j'avais beaucoup de mal à gérer mes émotions. L'alcool me permettait de relâcher tout ça.
De façon générale, dans mon entourage, quand ça n'allait pas, j'entendais l'expression "pff, si c'est comme ça je vais me bourrer la gueule, tiens". Toujours dite pour rire, mais mise en pratique régulièrement.
C'était aussi un moyen de me faire du mal, comme la cigarette. De reprendre un peu le contrôle sur ma souffrance : ok ça va mal, mais c'est parce que je l'ai choisi.
Je me voyais telle une héroïne dramatique, étouffée sous le poids de son propre destin. Je n'avais aucune marge de manoeuvre dans ma vie, et l'alcool m'offrait l'illusion de pouvoir me libérer, au moins le temps d'une cuite.
Aussi, j'aime les excès, les extrêmes, les sensations fortes, l'adrénaline. Je ne sais pas si c'est lié à ça. C'est une composante importante de ma personnalité. J'aime aussi le calme extrême, à l'inverse, la modération totale, la vie saine. Je navigue entre tout ça.
- Remède contre l'anxiété sociale : je crois que je suis assez introvertie, et surtout, je m'ennuie en présence des gens en général. Néanmoins, j'ai tout de même besoin de contacts sociaux. N'ayant pas assez de liens de qualité selon moi, boire me permettait d'avoir cette illusion d'être entourée. Alors que concrètement, je ne partageais pas grand chose d'intéressant avec la majorité de mes potes, et la plupart me semblaient sympathiques après quelques verres uniquement.
Le déclic, c'est quand un de mes proches (vraiment proche) m'a dit "aller au bar sans picoler, je peux pas. Je me ferais tellement chier ! Je préfère encore rester seul chez moi". Bah oui, c'est totalement ça pour moi. Je ne suis pas à l'aise dans ces situations. La plupart des soirées m'ennuient
. J'ai besoin d'activités, d'animation, de discussions passionnées.
Paradoxalement, je suis tellement habituée à être seule, que passer une soirée avec quelqu'un sans boire me semble étrange.
L'alcool est aussi devenu, avec le temps, une composante de ma personnalité : E. la festive, qui aime les soirées, beugler des chansons paillardes, bien apprêtée mais masculine (un vrai bonhomme ! du caractère !). Une façon de m'émanciper de mon rôle de femme, qui est ô combien aliénant dans notre monde sexiste. Picoler, ça me permettait de m'affirmer, qu'on ne vienne pas me faire chier. La tata childfree, punk, un verre à la main, qui ne se prend pas au sérieux, qui crame la vie par les deux bouts, forte.
Au final, en tant que femme, boire te rend encore plus vulnérable.
Ma plus grande peur en arrêtant de boire (ou du moins, en limitant très drastiquement les soirées), c'est de m'isoler. Et de m'ennuyer. J'ai du mal à m'imaginer sans ces moments grand guignolesques, sans ces bêtises de soirée qui ont émaillé mes années. Car j'ai aussi d'excellents souvenirs de soirée, j'y ai rencontré des gens formidables, ça a resserré certains liens à une vitesse folle.
Je ne suis pas sûre de réussir à mieux occuper mon temps. Je n'ai jamais été disciplinée : est-ce que je ne vais pas passer mes week-end à glander seule, et finir par déprimer ? Entrer dans une routine très plate (boulot, courses, ménage, Netflix) ?
Pourtant, mon mode de consommation a bien changé par rapport à il y a quelques années. A l'époque, j'étais incapable de passer un week-end sans cuite, que je sois en couple ou pas. Maintenant, j'apprécie mes moments seule, rien ne me fait plus plaisir qu'une balade seule et sobre le dimanche matin. J'ai déjà réussi cette transition là.
Je m'étais fixé un "cahier des charges" assez clair concernant les soirées, afin d'être sûr de n'aller qu'à celles qui me feront vraiment du bien, et de ne pas me cuiter "pour rien". De n'être entourée que de gens safe & bienveillants, pour fêter quelque chose de vraiment important et qui me tient à coeur (un super concert, le retour d'un proche...), ne rien avoir de prévu le lendemain, être dans un cadre agréable (exit les soirées en appart, que je déteste). Sauf que mon entourage me sollicite souvent pour autre chose, et que j'ai du mal à dire non. Rien que ce week-end, j'ai esquivé 4 apéros. J'ai du me mettre à gueuler face à l'insistance (!). Et c'est vraiment dur de dire non, quand en face de toi on insiste, et qu'une part de toi a envie d'y aller, se dit "allez, ça va être cool", "tu vas louper un truc super", "au pire tout le monde picole, y'a rien de grave".
Bref je sens que mon moral prend une claque dès que je dépasse mes limites. J'ai l'impression de passer à côté de la vie du Français classique quand je refuse une sortie : notre vie faite de terrasses, de bons restaus arrosés de vin, de fêtes constantes, d'apéros entre collègues. Comme si je me privais de quelque chose.