Bon alors mon message aurait pu être posté dans Le cœur lourd,Je ne supporte pas, ou même chez les célibattantes, mais en fait je crois que vu sa trame de fond, c'est ici qu'il a sa place.
Depuis que je lis régulièrement ce forum, j'ai l'impression que j'évolue, que je me déculpabilise d'énormément de choses, et que je reprends le contrôle sur ma vie. C'est un peu fort, mais je crois que c'est vrai.
Il y a 3 ans et des poussières, j'ai rencontré une bande de copains. À l'époque je découvrais un peu le monde étudiant, j'avais longtemps été très solitaire, je n'avais jamais fait partie d'une bande, et je n'avais jamais trouvé de groupe de copains avec lesquels je me sentais en harmonie, connectée. Cette rencontre, ça a été un immense bouleversement dans ma vie : j'ai beaucoup pioché (inconsciemment bien sûr, on n'est pas au supermarché non plus [img=75x38]http://jesuis.madmoizelle.com/media/pybb/smilies/razz.gif[/img])dans ce que j'aimais en eux pour me construire. Une partie de mon humour, de mon rapport au voyage, de mes rapports aux autres, c'est eux qui me l'ont inspirée. Je pense que je n'ai pas été une éponge, je garde une personnalité assez forte et un profond désir de "ne pas me perdre" dans le mimétisme, mais ils ont chamboulé ma vie d'une manière plus explicite que les autres amis que j'ai rencontrés depuis. Ces garçons, je les ai longtemps admirés, j'ai eu des sentiments pour deux d'entre eux, et j'ai aussi énormément souffert de mon rapport à eux.
Mais comme je les admirais, comme j'avais l'impression qu'ils étaient hors norme et que j'étais chanceuse qu'ils m'aient trouvé un intérêt, je n'arrivais pas à relativiser l'amour (amical ou amoureux) parfois presque masochiste que je leur portais.
Depuis 3 ans, à chaque fois que je rencontre un garçon et qu'il s'intéresse à moi, je le compare à eux, ils sont devenus mon référent. C'est aussi pour ça que je fais une fixette, car tout me ramène à la comparaison avec eux tant je les trouve atypiques.
J'ai énormément souffert de ça pendant ces 3 années, parce que j'avais toujours le désir de les voir, d'être avec eux, d'être sollicitée par eux... L'idée qu'ils puissent faire quelque chose sans me prévenir me faisait mal au cœur, bref, je voulais être "dans le coup", et c'en était presque obsessionnel (j'exagère un peu mais pas tant que ça). Du coup, j'ai très souvent fait des soirées avec eux dans lesquelles je ne m'amusais pas vraiment, durant lesquelles je me sentais malheureuse au fond sans pouvoir me l'expliquer. Et paradoxalement, il fallait que je sois là, je n'envisageais pas le contraire. Bref en y repensant je trouve que mon attitude était à la limite du masochisme.
Et je réalise que depuis que je lis madmoizelle, je prends énormément de distance vis-à-vis de cette amitié. Je m'autonomise sentimentalement, et j'ai l'impression que d'ici quelques mois, ils ne seront plus un repère pour moi, plus "un modèle structurel" que je cherche à reproduire, mais juste un très grand souvenir, avec beaucoup de positif, beaucoup de belles choses, mais un souvenir "imparfait" et nuancé, avec ses parts d'ombre.
En vous lisant vous indigner pour des petites situations de la vie quotidienne, des petites situations anodines qui ont un fond profondément dégradant, en vous lisant restaurer votre honneur de femmes, mais, bien au-delà de toute idée de genre, votre honneur d'êtres humains, vous m'avez énormément apporté. Vous avez modifié ma vision des choses, et je me rends compte que vous m'avez beaucoup sensibilisée à des sujets sur lesquels j'avais bien longtemps fait l'autruche.
Pendant toute la période où je les fréquentais, j'ai nourri une sorte d'attirance-répulsion pour ces garçons. Souvent en soirée avec eux, ou en les écoutant, je me sentais mal, comme si je ne cautionnais pas leur façon de parler des autres, et pourtant je n'arrivais pas vraiment à identifier ce qui me dérangeait. Du coup je me disais que si leur humour ne me convenait pas, si j'étais mal à l'aise face à leur façon de parler des filles, c'était sûrement parce que je manquais de confiance en moi ou que j'avais une sorte de frustration. Et hier soir, j'ai fait une soirée avec eux, j'ai observé leur comportement et ça m'a juste éclaté à la face : si leur attitude m'a toujours autant mise mal à l'aise, c'est tout simplement parce qu'ils ont un comportement affreusement machiste. Mais le problème, c'est qu'ils fonctionnent tellement sur le mode de l'humour, qu'ils utilisent tellement le second degré pour faire œuvre de machisme, que j'ai longtemps eu l'impression d'être illégitime si je m'indignais de leur attitude, puisque « c'est de la blague ». Sauf qu'il y a blague et blague, et finalement j'ai l'impression qu'ils se réfugient derrière l'humour pour avoir une attitude irrespectueuse et machiste, et ils le font avec plus ou moins de subtilité.
Aujourd'hui, j'ai de nouveaux amis, j'ai reconstruit pas mal de réseaux parallèles et j'ai des grappes amicales assez dispersées, mais jusqu'à hier, j'avais l'impression que tout de même, tout aussi géniaux que soient mes nouveaux amis masculins, je gardais la nostalgie de l'autre bande, son originalité et son piquant.
Et puis là j'y pense, et je réalise qu'en fait, depuis que j'ai pris mes distances vis-à-vis de la bande dont je parle ici (c'est à dire depuis la rentrée scolaire, depuis que je suis activement le forum quoi, drôle de hasard hein
), j'ai énormément regagné en confiance en moi. J'ai l'impression que les gens m'aiment et me respectent, je me sens marrante, jolie, pas trop conne...
Et si on va plus loin, c'est aussi parce que maintenant, je fréquente des mecs qui me respectent et me considèrent en tant qu'individu, en tant qu'égale, en tant que personne. Mes nouvelles fréquentations masculines sont peut-être moins « déviantes» que les garçons dont j'ai parlés, mais putain qu'est-ce que c'est des mecs bien. Je réalise la chance que j'ai d'avoir maintenant au quotidien des amis qui ne font pas du sexe une différence structurante et fondamentale.
Je reviens juste vite fait sur la bande de garçons dont j'ai parlé. J'espère que mon post ne passera pas pour un pavé impudique (bon ça je crois que c'est inévitable vu comme j'ai raconté ma vie
) ou une déclaration de haine, ce n'est pas ça du tout. C'est surtout que depuis ce matin je retourne ça dans ma tête, et qu'il faut à tout prix que j'exerce mon regard critique sur eux.
Je trouve leur machisme vraiment subtile et surprenant, parce qu'ils sont très intelligents, très ouverts d'esprit, très curieux intellectuellement, très cultivés... Et je trouve d'autant plus fou de voir à quel point ils peuvent être machistes derrière tout ça. En fait, pour aller encore plus loin dans ma petite analyse de comptoir, je pense que ce machisme est une sorte de code relationnel qu'ils ont instauré et qui fait tenir leur groupe. Faire des blagues vaseuses, mal parler des filles sur le mode de l'humour, se charrier sur leurs activités sexuelles respectives et leurs conquêtes... C'est tout un tas de rituels qui organisent et fédèrent leur groupe. Pris individuellement, certains d'entre eux sont des mecs éminemment tolérants et complètement humanistes. Mais dès qu'ils sont dans le contexte du groupe, ils cherchent à ré affirmer cette espèce d'amitié virile, et ça passe par une attitude vraiment rétrograde envers les filles.
Toujours est-il que ce matin j'étais à la limite de l'aversion quand je les écoutais. Tout leur petit humour sexiste m'a vraiment écœurée, et je crois que c'est vraiment grâce à madmoizelle que j'arrive à me dire que non, je n'ai pas « tort » de ne pas les cautionner. Là je crois vraiment que le problème ne réside pas (que) dans moi et mon rapport miroir aux autres, mais qu'il y a vraiment quelque chose de glauque dans leur attitude.
Un jour, juste comme ça, j'aimerais avoir le courage de leur renvoyer leur machisme à la gueule sans mâcher mes mots ou sans faire d'humour. J'aimerais m'opposer sérieusement à eux et leur expliquer qu'à force de rire de tout et de façon aussi ambiguë, les frontières entre la blague et la réalité peuvent s'effacer dans les yeux des autres...
Enfin dans tous les cas, je suis très heureuse de ce constat. Je les trouve maintenant tellement bourrés de bassesses que je les ai définitivement descendus du piédestal symbolique sur lequel ils trônaient. Je crois que je vais réussir à prendre du recul une bonne fois pour toute, à passer à autre chose. Je crois aussi surtout que je vais apprendre à apprécier et à reconnaître les garçons respectueux, parce qu'il y en a trop, partout, et qu'on (je) n'y prête pas assez attention.
Bien sûr, ne pas citer svp ! Je suis beaucoup beaucoup trop reconnaissable, et j'éditerai ! Navrée pour cet énormissime message mais il fallait vraiment que j'en parle quelque part, ça m'a trop pesé, et trop longtemps !