Vous connaissez le sociologue Farhad Khosrokhavar qui enquête sur la radicalisation? Il est chercheur à l'EHESS donc normalement c'est un type sérieux mais je suis assez surprise par ses propos tels qu'ils sont rapportés dans cet article :
http://www.sudouest.fr/2016/03/10/p...es-par-daesh-que-les-garcons-2296929-6093.php
Il a l'air de tomber des nues sur la violence des filles et de présenter ça comme "nouveau" mais en fait, j'ai presque l'impression qu'il méconnait les études de genres dans la manière dont il parle, ce qui serait très surprenant pour un chercheur de l'EHESS. Les passages suivants m'ont interpelée en particulier :
Nous avons à faire à la première génération de filles qui peuvent être fascinées par la violence, au même titre que les garçons. Auparavant, la violence était un phénomène presque exclusivement masculin. Cette nouvelle génération a changé de perspectives. J'ai parlé à des jeunes filles qui m'ont dit : 'mon idéal, c'est Kouachi' (ndlr, les frères Kouachi auteurs de la tuerie de Charlie Hebdo). Pas être sa femme ou sa petite amie : leur rêve, c'est être Kouachi lui-même. Directement la violence.
J'ai un peu l'impression qu'il passé à côté de quelque chose, déjà en présentant les ados d'aujourd'hui comme "la première génération de filles fascinées par la violence". Je ne sais pas trop si on peut vraiment parler de "phénomène générationnel" de un (genre toute une génération conernée par ça) et de deux, je suis sûre qu'il doit exister pléthores de recherches sur les femmes s'impliquant volontairement dans les conflits, le terrorisme, l'espionnage etc. et que ces recherches démontrent que la violence fait partie des raisons de "l'engagement" de ces femmes.
Ensuite, il a l'air surpris que des filles d'aujourd'hui veuillent être leur "héros" plutôt que sa petite amie. Si ces jeunes filles sont fascinées par Kouachi, trouvent qu'il a bien agi et approuvent son "combat", je ne vois pas pourquoi elles voudraient être sa femme ou sa copine dont personne n'a entendu parler. Pourquoi ce serait une nouveauté qu'une fille aspire à être le centre de l'action plutôt qu'une épouse potiche à côté? Je trouve ça vraiment surprenant qu'un sociologue fasse ce genre de commentaires...
C'est ce que j'appellerais la fatigue face aux jeunes garçons immatures qu'elle fréquentent. Il y a chez ces jeunes filles un culte nouveau de l'héroïsme, de la virilité. Le jeune jihadiste devient un idéal masculin pour ces adolescentes qui pensent pouvoir lui faire confiance. Son sérieux se mesure à sa volonté d'exposer sa vie au danger de mort. C'est un post-féminisme anti-féministe : le culte de la virilité, c'est dire qu'on veut un homme qui a des vertus masculines traditionnelles.
La première phrase ressemble carrément aux genres de commentaires qu'on pourrait trouver dans un magazine pour jeune fille "oh les adolescentes trouvent les garçons de leur âge trop immatures, elles préfèrent les hommes, les vrais" qui au fond relève plus du cliché que d'une réelle conclusion scientifique.
Ensuite encore une fois, je ne vois pas pourquoi il parle du "culte nouveau" de l'héroïsme et de la virilité. Les femmes ne vivent pas dans une boite fermée du reste du monde. L'héroïsme et la virilité sont portées aux nuées dans la société. C'est absolument normal dans ces conditions qu'une femme en vienne à idolâtrer la virilité. Et je ne sais pas d'où ce mec sort puisque oui, de nombreuses femmes n'aspirent pas seulement à "avoir un homme viril" mais à adopter également certaines valeurs viriles pour elles-mêmes puisque c'est ça qu'on leur présente comme le positif. Ce n'est pas un "post-féminisme" puisque malheureusement, le féminisme n'a pas réussi à réellement remettre en cause le fait que la virilité était la valeur suprême. Je suis encore une fois vraiment étonnée de lire que ce serait "une nouveauté".
La révolte adolescente et post-adolescente sous cette forme là était avant réservée aux garçons. Maintenant, les filles se révoltent aussi comme ça : elles partent, prennent un billet d'avion pour la Turquie. Elles savent que la société déteste le jihadisme, c'est le meilleur moyen de se placer en rupture avec la société.
J'avoue que la première phrase n'est vraiment pas claire dans l'article, on ne sait pas de quoi il parle précisément quand il dit "cette forme-là". Du coup, je me demande si c'est le sociologue qui a un souci ou l'article qui ne retranscrit pas bein ses propos.
Mais si c'est le sociologue qui n'est pas clair, à quoi il se réfère? Au fait de rejoindre un faction violente? Au fait de fuguer? Au fait de se tourner vers une version extrême de la religion? Au fait d'abandonner leur famille pour adopter un mode de vie jugé inacceptable? Au fait de vouloir participer à des combats? Je ne vois vraiment pas quelle forme de "révolte adolescente" était autrefois réservée aux garçons, à part peut-être que dans certains pays il a pu être très compliqué de rejoindre l'armée pour "se révolter" quand on est une fille mais je pense que tout le reste, y compris rejoindre des sectes, des combattants rebelles ou des organisations terroristes, a toujours été accessibles aux femmes qui le souhaitaient.
Enfin du coup, je ne sais pas si c'est l'article qui est mal écrit mais s'il s'agit d'un interview, je trouve très bizarre qu'un sociologue chargé d'étudier la radicalisaiton des adolescents semble se baser sur des préjugés de genres sur le le lien entre femmes et violence pour ses analyses.
Que des adolescentes soient plus nombreuses à s'engager auprès de Daesh que dans d'autres groupes violents parce que leur accueil massif fait partie de la stratégie de Daesh, je veux bien. Mais que des adolescentes aient un désir plus profond de pratiquer la violence qu'autrefois, j'ai du mal à être convaincue...
http://www.sudouest.fr/2016/03/10/p...es-par-daesh-que-les-garcons-2296929-6093.php
Il a l'air de tomber des nues sur la violence des filles et de présenter ça comme "nouveau" mais en fait, j'ai presque l'impression qu'il méconnait les études de genres dans la manière dont il parle, ce qui serait très surprenant pour un chercheur de l'EHESS. Les passages suivants m'ont interpelée en particulier :
Nous avons à faire à la première génération de filles qui peuvent être fascinées par la violence, au même titre que les garçons. Auparavant, la violence était un phénomène presque exclusivement masculin. Cette nouvelle génération a changé de perspectives. J'ai parlé à des jeunes filles qui m'ont dit : 'mon idéal, c'est Kouachi' (ndlr, les frères Kouachi auteurs de la tuerie de Charlie Hebdo). Pas être sa femme ou sa petite amie : leur rêve, c'est être Kouachi lui-même. Directement la violence.
J'ai un peu l'impression qu'il passé à côté de quelque chose, déjà en présentant les ados d'aujourd'hui comme "la première génération de filles fascinées par la violence". Je ne sais pas trop si on peut vraiment parler de "phénomène générationnel" de un (genre toute une génération conernée par ça) et de deux, je suis sûre qu'il doit exister pléthores de recherches sur les femmes s'impliquant volontairement dans les conflits, le terrorisme, l'espionnage etc. et que ces recherches démontrent que la violence fait partie des raisons de "l'engagement" de ces femmes.
Ensuite, il a l'air surpris que des filles d'aujourd'hui veuillent être leur "héros" plutôt que sa petite amie. Si ces jeunes filles sont fascinées par Kouachi, trouvent qu'il a bien agi et approuvent son "combat", je ne vois pas pourquoi elles voudraient être sa femme ou sa copine dont personne n'a entendu parler. Pourquoi ce serait une nouveauté qu'une fille aspire à être le centre de l'action plutôt qu'une épouse potiche à côté? Je trouve ça vraiment surprenant qu'un sociologue fasse ce genre de commentaires...
C'est ce que j'appellerais la fatigue face aux jeunes garçons immatures qu'elle fréquentent. Il y a chez ces jeunes filles un culte nouveau de l'héroïsme, de la virilité. Le jeune jihadiste devient un idéal masculin pour ces adolescentes qui pensent pouvoir lui faire confiance. Son sérieux se mesure à sa volonté d'exposer sa vie au danger de mort. C'est un post-féminisme anti-féministe : le culte de la virilité, c'est dire qu'on veut un homme qui a des vertus masculines traditionnelles.
La première phrase ressemble carrément aux genres de commentaires qu'on pourrait trouver dans un magazine pour jeune fille "oh les adolescentes trouvent les garçons de leur âge trop immatures, elles préfèrent les hommes, les vrais" qui au fond relève plus du cliché que d'une réelle conclusion scientifique.
Ensuite encore une fois, je ne vois pas pourquoi il parle du "culte nouveau" de l'héroïsme et de la virilité. Les femmes ne vivent pas dans une boite fermée du reste du monde. L'héroïsme et la virilité sont portées aux nuées dans la société. C'est absolument normal dans ces conditions qu'une femme en vienne à idolâtrer la virilité. Et je ne sais pas d'où ce mec sort puisque oui, de nombreuses femmes n'aspirent pas seulement à "avoir un homme viril" mais à adopter également certaines valeurs viriles pour elles-mêmes puisque c'est ça qu'on leur présente comme le positif. Ce n'est pas un "post-féminisme" puisque malheureusement, le féminisme n'a pas réussi à réellement remettre en cause le fait que la virilité était la valeur suprême. Je suis encore une fois vraiment étonnée de lire que ce serait "une nouveauté".
La révolte adolescente et post-adolescente sous cette forme là était avant réservée aux garçons. Maintenant, les filles se révoltent aussi comme ça : elles partent, prennent un billet d'avion pour la Turquie. Elles savent que la société déteste le jihadisme, c'est le meilleur moyen de se placer en rupture avec la société.
J'avoue que la première phrase n'est vraiment pas claire dans l'article, on ne sait pas de quoi il parle précisément quand il dit "cette forme-là". Du coup, je me demande si c'est le sociologue qui a un souci ou l'article qui ne retranscrit pas bein ses propos.
Mais si c'est le sociologue qui n'est pas clair, à quoi il se réfère? Au fait de rejoindre un faction violente? Au fait de fuguer? Au fait de se tourner vers une version extrême de la religion? Au fait d'abandonner leur famille pour adopter un mode de vie jugé inacceptable? Au fait de vouloir participer à des combats? Je ne vois vraiment pas quelle forme de "révolte adolescente" était autrefois réservée aux garçons, à part peut-être que dans certains pays il a pu être très compliqué de rejoindre l'armée pour "se révolter" quand on est une fille mais je pense que tout le reste, y compris rejoindre des sectes, des combattants rebelles ou des organisations terroristes, a toujours été accessibles aux femmes qui le souhaitaient.
Enfin du coup, je ne sais pas si c'est l'article qui est mal écrit mais s'il s'agit d'un interview, je trouve très bizarre qu'un sociologue chargé d'étudier la radicalisaiton des adolescents semble se baser sur des préjugés de genres sur le le lien entre femmes et violence pour ses analyses.
Que des adolescentes soient plus nombreuses à s'engager auprès de Daesh que dans d'autres groupes violents parce que leur accueil massif fait partie de la stratégie de Daesh, je veux bien. Mais que des adolescentes aient un désir plus profond de pratiquer la violence qu'autrefois, j'ai du mal à être convaincue...
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