@ShinyPony et @Titien
Il ne s'agit pas de leur dire "tais-toi" mais plutôt "ne te mets pas en avant".
Le mec de la BD écrit une BD de 5 pages pour dire qu'on le rejette et où il se présente quand même un peu comme une victime bienveillante et discriminée... C'est ça qui peut agacer la fille du Tumblr.
Ensuite, Shiny, tu dis :
j'aime pas les gens qui crachent sur l'aide qu'ils reçoivent, même si l'aide est maladroite.
Mais parfois, avoir la volonté d'aider n'est pas la même chose qu'aider vraiment ou alors cela peut être à double tranchant aider ET blesser à la fois. Alors quand on pense que l'aide qu'on nous donne sans qu'on l'ait sollicité n'apporte pas du positif, je trouve ça normal de dire "ok, j'ai compris ton intention mais stop!".
J'habite dans la zone Afrique et je voyage souvent à Madagascar où des voyages humanitaires courts sont organisés.
Parfois, les gens sont pleins de bonne volonté mais ils ne se rendent pas compte qu'ils sont à côté de la plaque. Les Malgaches qu'ils viennent aider ne mangent pas à sa faim, beaucoup sont dénutris, et tu as des médecins venus en séjour "humanitaire" de 4 semaines qui s'engueulent pendant 30 minutes sur celui du groupe qui a mangé la dernière tarte aux fraises et que non, je veux pas de tarte au citron... pendant que leurs patients n'ont même pas les moyens de s'acheter du pain. Sérieusement! J'ai vu ça de mes yeux!
Alors tu m'étonnes que les Malgaches autour qui les voient se prendre la tête sur le goût de leur tarte, dans leur tête ils vont penser "pfff ces gens-là, ils feraient mieux de rester chez eux, c'est insultant".
Le médecin a soigné plein de gens qui seront reconnaissants et il aura sûrement oublié ce coup de la tarte aux fraises qui lui parait assez anodin mais quand il entendra le Malgache-témoin lui dire "vous ne comprenez pas notre pays et vous êtes des privilégiés capricieux", il va être choqué. Il va penser "ah oui, je viens aider les gens et c'est comme ça qu'on me remercie!".
Pourtant, le Malgache aura des raisons très légitimes de réagir ainsi.
Un autre exemple pour reprendre l'analogie avec le racisme de @Lady L (je mets en spoiler pour pas charger le texte)
Cela parait un peu schématique et c'est un peu différent de ce dont on parle, mais c'est pour dire que dans certains cas, même si on a le pouvoir de faire taire quelqu'un de désagréable, raciste et sexiste, il vaut mieux laisser la personne ciblée gérer son problème, et seulement si ça dégénère trop intervenir. C'est une façon de lui faire gagner du pouvoir par son propre chef, c'est plus durable que le pouvoir qu'on lui donne qui est moins légitime aux yeux des autres.
Aussi, si un "dominant" parle en ton nom et aide à te faire entendre, ce n'est pas toi qu'on entend, c'est
sa vision de
ton problème. Il manquera toujours quelque chose que toi seule peut exprimer et comprendre intimement.
Pour revenir à vos messages, je pense que le mec qui se plaint qu'on le rejette n'a peut-être pas tout-à-fait compris la cause pour laquelle il veut s'engager pour réagir ainsi.
Parce qu'on ne le rejette pas
parce qu'il est un mec mais parce qu'il continue à se comporter comme un privilégié sans s'en rendre compte et sans pouvoir le reconnaitre du coup.
Sur la question du viol, les hommes réagissent souvent 'moi aussi ça me pèse, j'en ai marre qu'on me soupçonne d'être un violeur'. Alors, ok, on se doute bien qu'il ne considère pas qu'être violée = être traité de violeur en terme de traumatisme.
Sauf que pour la victime de viol qui est en train de raconter ce qu'elle a vécu ou d'y réfléchir, voir un gars débarquer en plein milieu du débat et sortir "ah bah pour moi non plus c'est pas cool!", ce commentaire est extrêmement violent, c'est comme vouloir atténuer l'expression de sa souffrance. Elle devrait peut-être faire preuve de compréhension et d'écoute envers celui qui essaye de s'intéresser à son sort... Mais à la base, c'est elle qui a vécu une épreuve, c'est donc plutôt à celui qui se sent simplement soupçonné de temps en temps de faire preuve d'empathie, de prendre sur lui et de dire "ok, désolé, je ne voulais pas te blesser", non?
La démarche pacifique de ce mec de la BD et de ceux qui n'apprécient pas qu'on ne les accepte pas, ce serait plutôt de dire : "ok, tu n'aimes pas mon comportement, ça ne fonctionne pas à tes yeux. Alors je vais venir avec vous, regarder ce que vous faites, tu me diras quand ça cloche, comment je peux vous aider, tu m'expliqueras comment tu vois les choses et c'est comme ça qu'on se comprendra".
La démarche inverse "je vous ai compris, coucou, je viens vous apporter l'aide que je crois être la bonne", c'est quand même partir avec certains préjugés même si on croit qu'on s'est suffisamment renseigné.
Bien sûr qu'on peut défendre et intervenir quand quelqu'un est discriminé, mais il faut voir aussi si notre aide va nous mettre nous en avant ou si elle conserve la personne discriminée au centre de la situation.
Dans la BD, le mec montre bien qu'il est content de lui pour avoir défendu la fille. C'est ptete un trait d'humour mais je pense que ça montre aussi que sa première réaction c'est en partie "
Moi, je vais agir comme un mec bien doit agir" plutôt "Ce que
cette fille subit est révoltant".
Et moi non plus je n'aime pas la vision binaire privilège/oppression car évidemment, tout s'entrelace mais dans des situations précises, ce sont des manières de rendre le débat plus clair
