J'arrive un peu après la bataille mais je voulais répondre sur le débat avec Gary et tout ça. mais je sais pas pour où commencer
donc excusez-moi si tout va arriver en même temps...
Avec des véganes, je me sens toujours assez mal (comme dit plus haut) parce que je ne suis pas "parfaite". Je n'ai pas fini ma transition vers le végétalisme : je mange vgl chez moi, et de préférence dehors, mais il peut m'arriver de manger vgr dehors quand je n'ai pas trop d'autres choix. Je sais qu'on a toujours le choix, mais pour des tas de raisons, pour moi c'est compliqué : je fais un travail chronophage à plus de 400 km de chez moi, certains jours je commence très tôt et d'autres très tard... Et étant donné ces conditions, je n'ai pas toujours envie de me trimballer avec deux tupperwares, les prévoir et les porter, c'est vraiment pas évident... Donc dans ces cas, je mange vrg, en attendant que le dieu de la titularisation se penche sur mon cas et me permette de travailler dans des conditions moins à l'arrache. La deuxième raison, c'est que mon ami ayant beau avoir énormément de qualités, il ne fait rien ou quasiment à la maison (et pas moyen de le convaincre, malgré mes conditions de travail) : je fais vaisselle, cuisine, lessive, rangement, tâches administratives (impôts), courses, etc. Donc préparer en plus de la nourriture à emporter le midi - juste penser à le faire - pour moi, pour l'instant, ce serait juste la goutte d'eau qui ferait déborder le vase.
Là je vous donne les raisons parce que je connais votre état d'esprit, mais je ne les donnerais jamais à des véganes purs et durs - ce sont des gens que j'admire, mais je me sentirais mal de devoir me justifier de mes défaillances. J'espère qu'un jour je m'améliorerai pour devenir vraiment végane, mais je considère aussi que je n'ai pas forcément à me justifier - parce qu'en termes de végéta*isme, chacun sa route chacun son chemin, toussa
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Donc bon, pour en revenir à Gary... je pense comme
@Ghost wind que quand on est face à la souffrance animale, on peut en venir à avoir du mal à tenir un raisonnement (dans la mesure où ce raisonnement ne servant pas à arrêter la souffrance, il apparait superflu, inutile, voire même indécent). Mais surtout, je pense que le contact avec les carnistes peut amener à durcir son discours - et Gary est au contact avec les carnistes tout le temps. On sait à quel point les carnistes peuvent être horribles. Je le dis d'autant plus que je suis une très mauvaise débatteuse et que, face à des discours qui m'énervent, j'ai tendance à devenir une personne horrible et à raconter n'importe quoi pour "compenser" (je n'en suis pas fière) (et je ne vais pas rentrer dans les causes de ce comportement, mais disons que le contact avec les idées parfois insoutenables de ma famille pendant des années sans pouvoir dire quoi que ce soit - car les enfants doivent se taire chez moi - jouent sans doute pas mal. J'ai de la fureur dans mon cœur et parfois elle sort n'importe comment. D'ailleurs je voulais vous dire que je trouve que vous faites ressortir le meilleur de moi !)
Bon bref je voulais dire qu'ici, il n'y a pas de carniste, donc c'est plus facile pour nous d'arriver à construire des raisonnements. On n'est pas tout encombrées de la violence des autres, on n'a pas à traiter avec cette violence pour pouvoir parler. On est dans un lieu virtuel protégé, un "refuge" en quelque sorte, et à mon avis c'est pour ça qu'on peut arriver à analyser des trucs des trucs qu'on ne pourrait pas analyser face à un carniste triomphant, ou face à des vaches mourantes - sans compter que ce serait même presque indécent de le faire à ce moment-là.
Par exemple... Il y a quelques jours (lundi), on avait parlé sur ce fil de la souffrance possible de l'embryon à partir d'un certain nombre de semaines. Je me demandais (c'était une vraie question, pas une opinion) s'il ne pouvait pas être considéré comme illogique de ne pas vouloir face souffrir des fruits de mer, mais d'accepter de faire souffrir un embryon avancé pour l'avorter. Mais depuis j'y ai repensé. J'ai notamment pensé au fait que de toute façon on est responsable que ce que l'on met au monde, et que finalement peu importe que l'embryon de trois mois puisse se mettre à ressentir la douleur, cette hypothétique douleur momentanée doit aussi être rapportée à l'immense douleur que représente une vie de souffrance pour un enfant maltraité. Donc que le principe de responsabilité s'applique au-delà de savoir si l'embryon peut avoir acquis un système nerveux et une forme de souffrance à partir d'un certain stade.
Ça m'a fait penser à ce qu'on fait, avec l'asso dont je fais partie (là je vais faire un parallèle thématique, mais je ne suis pas du tout en train de dire que les 2 situations sont semblables) : on trappe beaucoup de chats pour les stériliser et les identifier (sinon la fourrière les choppe et les tue en masse, régulièrement...). Quand on attrape une chatte enceinte, généralement on l'avorte. En effet, on trappe à peu près une centaine de chattes enceintes par an, ce qui ferait 400 chatons en moyenne si on laissait les grossesses se mener à terme. Et c'est juste impossible : on n'a déjà à peine assez d'adoptants pour les centaines de chatons qu'on ramasse, maigres, affamés, blessés, malades ou apeurés, dehors. On met des semaines à les soigner / sociabiliser / faire adopter. Ne pas avorter les chattes enceintes qu'on récupère, ce serait pour le coup extrêmement irresponsable. Bref on est responsables des animaux qui dépendent de nous (pas les autres, évidemment : je ne suis pas du tout pour un contrôle du monde sauvage, etc !), et on est responsable des embryons qu'il peut nous arriver de porter. Si on ne pense pas pouvoir assumer ce qui dépend de nous, il est bon d'en tirer les conséquences. Mais cette responsabilité, pour moi, elle est le résultat d'une "pragmatique" : il ne s'agit pas d'une réflexion théorique mais de quelque chose que je ne peux concevoir qu'en situation. Dans un monde idéal, on devrait pouvoir faire autrement, mais dans notre monde, c'est parfois le choix le moins pire qui est le plus souhaitable. Dans un monde idéal, les gens ne seraient pas irresponsables et inconsciemment cruels au point de laisser leurs chats non opérés faire portées sur portées, avant que des voisins appellent la fourrière parce que la résidence ou le terrain est envahi de chats. Dans un monde idéal, on n'aurait pas, nous, à prendre en masse la responsabilité que eux n'ont pas daigné prendre individuellement, en trappant les chats pour pouvoir les opérer, les identifier, et éventuellement les avorter avant de les relâcher - soit leur sauver la vie - ce qui est une solution d'urgence qui ne devrait même pas se poser si les animaux domestiqués étaient soignés comme ils le méritent. Mais ce monde idéal n'existe pas, car pour les gens et les carnistes en particulier, un animal ça ne compte pas.
Bref je voulais juste vous montrer que ma réflexion sur la souffrance de l'embryon de 3 mois avait aussi évolué "en souterrain" grâce à ce qui avait dit ici, et que c'est pour que ce fils de discussion est précieux ! C'est parce qu'il n'y avait aucun pro-vie dégueulasse sur ce fil, ni aucun pro-choix péremptoire et blessant, que cette réflexion a pu évoluer. Il n'y a pas beaucoup d'endroit où on est préservé à la fois de la violence des carnistes, et de la colère (très légitime mais un peu aliénante) de certain.es militant.es, et où donc on peut se payer le luxe d'avoir une réflexion qui évolue (car c'est un luxe : face à un homme qui conduit des vaches à l'abattoir, on ne va pas dire : je pense que tu ne devrais pas faire cela mais je vais y réfléchir et peut-être que ma réflexion va évoluer).
Désolée pour le pavé