La PMA pour toutes en 2018, l'annonce qui réveille les passions

La question de l'eugénisme n'est pas vraiment liée à la question de si oui ou non la PMA ouverte pour les lesbiennes est une bonne chose. Plus exactement, c'est deux questions différentes, et parler d'eugénisme n'implique pas le besoin de condamner la PMA comme c'est fait là tout de suite. Que la PMA soit réservée aux hétéros ou qu'elle soit aussi accessible aux couples lgbt ne change rien à cette question-là.

Et j'ai un peu l'impression qu'il y a un glissement de la réflexion : de la question du père et de son rôle ou de sa place dans la famille, on est arrivé-es à parler d'eugénisme. Je pense que le chaînon manquant, c'est que pour certain-es l'idée de sortir de la famille traditionnelle (un papa une maman cis et des enfants par voie naturelle) c'est déjà une expérimentation faite pour répondre à des désirs des adultes qui ne prend pas en compte les besoins des enfants.

A cela je voudrais déjà dire que les familles qui sortent de ce moule traditionnel ne sont pas nouvelles: les mères célibataires (et les pères célibataires) les couples gay, les familles recomposées, les familles où on ne sait pas trop qui a été le géniteur / où le géniteur n'est pas le père, c'est loin d'être nouveau, on en retrouve des exemples partout dans l'histoire (et aussi dans la littérature et la culture) - ce qui est nouveau chez nous, c'est qu'on est en train de les reconnaître, et de remettre en question le modèle de la famille tradi papa-maman comme unique norme et comme unique situation familiale digne de respect. Concrètement, ce qui se passe, ce n'est pas qu'on est en train de créer de nouvelles formes de familles, c'est qu'on est en train de reconnaître socialement d'autres formes de familles, et que par cette reconnaissance on permet à ces familles de moins vivre dans la précarité.

Du reste, pour l'eugénisme: c'est une question intéressante, oui, mais elle se pose déjà avant l'ouverture de la PMA à tous-tes. L'avortement des personnes trisomiques, la possibilité de choisir médicalement si on veut une fille ou un garçon (qui est interdit en France) etc, c'est déjà des choses qui existent.

Une chose que je voudrais rajouter (je ne sais plus qui l'a dit, mais voilà): la valeur des personnes trisomiques ne se résume pas à leur capacité (réelle ou potentielle) d'apporter des choses que le reste de l'humanité ne peut pas apporter. On peut avoir une existence digne de valeur sans apporter de capacité à résister à une maladie, et même sans rien apporter du tout, on peut avoir de la valeur et mener une vie digne et digne d'être vécue en ayant des capacités intellectuelles et physiques moindres que le reste de la population, et on peut amener des choses à la société en étant plus faible physiquement et mentalement, en étant handicapé-e. La valeur d'une personne ne se mesure pas à une norme physique et mentale.

Le véritable effort à faire si l'on veut lutter contre l'eugénisme, et pour l'inclusion des personnes handicapées dans la société, c'est d'axer les efforts sur le soutien à ces personnes et à leur présence continue dans la société (parce que bien souvent, elles sont un peu balayées hors de la vision des gens, on ne les voit ni dans les médias ni dans la rue, on ne se les imagine pas dans une famille). Il faut, politiquement, demander plus de moyens pour aider ces personnes, et personnellement et socialement, se demander comment on pourrait les accueillir dans nos familles si elles y arrivent, dans notre communauté si elles y sont. Qui parmi vous, gay ou straight, s'est imaginé-e avoir un enfant handicapé? Comment faire pour lea rendre heureuxse si jamais on a un enfant handicapé? Est-ce que l'état et la sécurité sociale va vous aider, ou au contraire faire pression à avorter / vouloir vous les prendre et les parquer dans des structures spécialisées plutôt que faire des efforts pour qu'iels puissent vivre dans leur famille? Que faire, comment faire pour changer cet état des choses? Etc. Ce sont ces questions-là (et pas "est-ce qu'ouvrir la PMA aux homosexuel-les c'est la porte ouverte à l'eugénisme?") qu'il faut se poser si on veut lutter contre l'eugénisme.
 
Aussi un mot sur les personnes sourdes (l'eugénisme inversé, seriously?) c'est étrange de crier à la dérive eugéniste d'un côté, et d'ensuite s'indigner qu'on ne force pas les gens à donner naissance à des enfants valides. Si ces deux femmes sourdes avaient été un couple hétéro-cis sourd qui aurait eu des enfants sourds en faisant l'amour, est-ce que ça vous aurait posé problème aussi? Est-ce que ça veut dire que pour lutter contre l'eugénisme il aurait fallu empêcher ce couple hétéro-cis sourd d'avoir des enfants? Ou est-ce que le problème, ce n'est pas tant qu'un enfant sourd soit né, mais qu'il soit né par PMA? Et donc qu'il faut pas faire de l'eugénisme mais que quand même, si on peut choisir, c'est choquant de choisir d'avoir et de garder un enfant handicapé? Sérieux? C'est quoi cet exemple?

Et puis la surdité c'est quelque chose qui a des particularités propres - à savoir, il y a une véritable communauté sourde, avec ses propres langues (la langue des signes, c'est pas juste du français transposé par gestes; ça a sa grammaire, son vocabulaire, sa logique propre, c'est une vraie langue, demandez à votre linguiste local-e) sa culture (et ses chaînes youtube et tout) et ses habitudes et tout. Beaucoup d' "aide" des gouvernements envers les personnes sourdes ignorent totalement cette culture et cette communauté, et tentent tout simplement de faire disparaître la surdité - alors que certaines personnes sourdes n'ont pas envie de ne plus être sourdes, et que plus elles sont intégrées dans ces cultures sourdes moins elles ont envie d'arrêter d'être sourde (statistiquement parlant). Les opérations médicales comme les implants cochléaires ne sont pas unanimement acceptées, et sont plutôt sources de débats. Les démarches comme aider à former plus de traducteursices interprètes ne sont pas vraiment poussées en avant par l'état.

Du coup, la surdité illustre vraiment un truc important: quand on veut aider les personnes handicapées et lutter contre l'eugénisme et le validisme, il ne faut pas le faire en plaquant ses idées reçues sur les personnes handicapées, mais au contraire travailler avec elles et écouter les besoins qu'elles expriment.

Et l'une des idées reçues à jeter à la poubelle, c'est quand même considérer que la vie d'une personne handicapée vaut moins que celle d'une personne valide. Personnellement je ne vois pas pourquoi c'est choquant que des personnes sourdes veulent avoir des enfants sourds, et se projettent comme parents comme ça.
 
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Alors je ressens le besoin d'intervenir dans ce débat parce qu'il y a des choses qui me font vraiment réagir. Je précise que je suis pour la PMA, que ce soit pour les couples hétéros, homos ou les femmes célibataires y a aucun souci.
Par contre le point que soulevait @louloulolita par rapport à l'eugénisme me semble intéressant voire même essentiel. Certes, il y a déjà aujourd'hui une "sélection" qui s'opère naturellement quant au choix du partenaire quand on veut avoir un bébé (par exemple on va chercher une personne plus belle, plus intelligente etc). Mais la différence c'est qu'on n'a pas vraiment de contrôle sur la situation ; l'effet recherché peut très bien "foirer", on peut très bien avoir des enfants avec des caractéristiques totalement imprévues (genre un enfant moche alors qu'on voulait un gamin beau et qu'on avait un partenaire beau, ça arrive et c'est pas la fin du monde). Là, ça permet d'aller beaucoup plus loin dans la sélection génétique, et effectivement ça peut être très gênant.
Alors bien sûr il n'y a pas que les couples lesbiens qui sont concernés par ce problème, les hétéros peuvent très bien en abuser aussi. Et effectivement ça ne remet pas forcément en cause l'idée d'autoriser la PMA pour tous, puisque de toute façon elle est déjà légale pour les hétéros. Par contre ça invite à faire très attention aux potentielles dérives... Ca n'a rien de parano ou de conservateur de vouloir y faire attention.

En revanche je ne suis PAS DU TOUT d'accord avec les arguments en faveur des parents sourds qui ont fait un enfant sourd. Je suis même extrêmement choquée. Quelque part je comprends qu'ils veuillent se sentir "plus proches" de leur enfant comme ça, mais mince à quel moment on a le droit d'imposer un handicap à un enfant ?! Parce que là c'est pas un accident ni une fatalité, visiblement ils ont fait exprès d'avoir un enfant sourd en le concevant comme tel. Mais enfin.... Comment vous pouvez trouver ça ok ?! Je répète : les parents ont volontairement imposé un handicap à leur enfant.
Mais on n'a pas le droit de décider d'une telle chose pour lui/elle ! Vous vous rendez compte qu'il/elle ne pourra jamais entendre, ne pourra jamais écouter de musique, et subira ce handicap toute sa vie (avec tous les soucis pratiques ou autres que ça comporte) parce que ses parents ont décidé qu'il était mieux pour eux d'avoir un enfant sourd.... Mais qui peut souhaiter ça à son enfant ? Là je suis désolée mais c'est en aucun cas dans l'intérêt de l'enfant, c'est purement dans l'intérêt des parents. Pour le coup c'est carrément de l'égoïsme, oui. Je vois même pas comment on peut défendre ça.
A la place du gamin je haïrais les parents qui m'ont fait ça. Je pense même que je leur foutrais un procès. Enfin merde quand on est parent on pense d'abord à l'intérêt de son enfant, vous croyez vraiment que c'est trop cool d'être sourd et que c'est ce qu'il y a de mieux pour son gamin ? Si j'étais sourde et qu'il y avait un moyen d'éviter ça à mon enfant je ferais tout pour ça mais JAMAIS je ferais exprès d'avoir un enfant sourd parce que c'est mieux pour moi ! On marche sur la tête là. Ca aurait jamais dû être légal de faire ça, pour moi les parents devraient clairement aller en tôle. Non mais là si j'imagine un équivalent ce serait "ok je suis paralysé alors je vais faire en sorte que mon enfant soit paralysé aussi, après tout le handicap c'est pas grave et si vous trouvez qu'il vaudrait mieux éviter ça pour l'enfant vous êtes qu'un nazi, c'est mon droit de faire l'enfant qui me convient le mieux" non mais allo !! Réfléchissez parce que là ça fait carrément peur vos justifications...

Et sinon bonjour la culpabilisation pour les femmes qui souhaitent avorter d'un foetus handicapé hein. Je rappelle quand même que le droit à l'avortement est valable pour tout le monde et qu'on n'a pas à juger des raisons pour lesquelles on avorte. Après il peut y avoir des dérives (ex : avorter des foetus féminins) mais pour les foetus handicapés je rappelle que quoi que vous en pensiez, c'est un droit. Il y a des femmes qui n'ont tout simplement pas les moyens ou qui ne se sentent pas d'élever un enfant handicapé et personne ne devrait les culpabiliser pour ça. Personne ne dit que les personnes handicapées sont mauvaises ou ne devraient pas exister, mais les femmes ont le choix d'avoir cet enfant ou pas, parce que c'est très compliqué et que ça demande beaucoup de temps et d'argent d'en élever un. A vous lire on dirait pas qu'on est sur un forum féministe, c'est presque effrayant...
 
@just_in_case La question de l'eugénisme est une question importante (mais je ne suis pas sûre que la greffer à une discussion sur la PMA soit judiciable en soi, parce qu'il s'agit d'un outil et pas des motivations poussant à utiliser cet outil - mais enfin bon c'est fait).

La question de si oui ou non choisir d'avoir un enfant sourd est discutable. Tu pars beaucoup du fait qu'être sourd c'est "moins bien" que ne pas l'être. Je ne sais pas, la comparaison qui m'est spontanément venue à l'esprit (parce que je suis peut-être concernée, et parce que je connais beaucoup de gens comme ça) c'est l'autisme: est-ce que, si on me laissait choisir, je voudrais avoir un enfant autiste plutôt qu'un enfant qui ne l'est pas? C'est pas facile à répondre d'un coup - l'autisme apporte des handicaps, mais aussi des spécificités de fonctionnement, spécificités que franchement je souhaiterai à tous-tes si je le pouvais (parce que si c'est bien ce que j'ai, les intérêts spécifiques c'est quand même grave cool et votre vie à tous-tes est amoindrie de ne pas en avoir). Il en est comparablement de même avec la culture sourde - mais on n'a pas besoin d'avoir un enfant sourd pour l'introduire dans la culture sourde, on peut tout à fait parler en langue des signes à un enfant entendant. Enfin bref, je pense que pour le coup, il est contre-productif de comparer les handicaps. La surdité, ce n'est pas l'autisme, ce n'est pas la paralysie. Toutes sont différentes, avec leurs dynamiques et leurs limites propres. Et certains handicaps ne sont des handicaps que par rapport au reste de la société qui ne s'adapte pas à elleux. Est-ce le cas pour la surdité? Je ne sais pas. D'un côté c'est clair qu'il y a le manque d'un sens par rapport aux reste des humains. De l'autre la surdité a permis l'émergence et l'existence d'une culture propre.

Je trouve aussi très étrange l'idée de faire un procès à ses parents parce qu'on est né-e sourd-e. Si l'enfant avait été né-e d'une autre gamète, iel n'aurait pas été lae même personne mais en version pas sourde, iel aurait été une personne toute différente, avec un code génétique différent, et des caractéristiques, des intérêts, des tas de choses différentes. Les gamètes, ça ne détermine pas juste si un enfant va naître sourd-e ou non...

Pour l'avortement: pourquoi est-ce que choisir si on a une fille ou un garçon, c'est une dérive, mais choisir si on a un enfant valide ou non, ça n'en est pas une? Plus exactement - à quoi sert l'avortement? A pouvoir choisir d'avoir une grossesse ou non, d'exercer un contrôle sur son corps, ou à pouvoir choisir l'enfant qu'on veut avoir, en avortant celleux qui nous conviennent pas? Le fait de laisser le choix aux personnes enceintes d'avorter un enfant handicapé ou non, c'est le fait de leur laisser choisir l'enfant qu'elles veulent. Je ne vois pas en quoi c'est plus une dérive de choisir un garçon que de choisir un enfant valide.

Et du coup, ça pose vraiment la question: est-ce qu'il faut faire tout son possible pour qu'un enfant handicapé ne naisse pas? A partir de quel point ça devient de l'eugénisme? Quand on interdit aux gens de vouloir des enfants handicapés? D'avoir des enfants handicapés? Quand on avorte les foetus handicapés? Quand on stérilise ou qu'on se débarrasse des gens handicapés? A l'inverse, à partir de quel point ça devient un préjudice à la personne de la concevoir, de la faire naître et de la laisser vivre? Vaut-il mieux être né-e sourd ou handicapé-e, ou ne pas être né-e du tout?

Je trouve que la question n'est pas simple, et pas clairement répondue d'une façon ou d'une autre.
 

Lumioptéryx

il + masculin
27 Juin 2014
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@just_in_case Dans l'absolu je ne dis pas qu'il ne peut pas y avoir matière à débattre de ce cas, je disais que partir d'emblée de l'idée que ces gens sont pervers et stupides est un jugement brut sans empathie ni recherche. Mon avis dans l'ensemble sur cette question, c'est que je ne suis ni malentendant.e ni sourd.e et que je ne saurais donc pas me rendre compte suffisamment de ce que ça fait d'être dans cette situation.

En revanche, pour prendre une comparaison avec un cas que je connais mieux, c'est-à-dire le mien, je suis autiste. En temps que personne "handicapée", comme toutes celles qui se sont posées la question des enfants un jour, je me suis demandé.e ce que j'aimerais. Il faut bien comprendre que ce n'est pas une question théorique comme ça peut le sembler quand on n'est pas dans cette situation. Se demander si je préfèrerais que mon enfant soit autiste ou pas, ça renvoie à beaucoup de choses. Ça renvoie déjà à ma propre identité. Considérer d'office qu'il vaut mieux que l'enfant soit non-autiste, c'est le définir par son handicap, c'est considérer sa vie uniquement par cet aspect et c'est considérer que cette vie là a moins de valeur que celle d'une personne non-autiste.
C'est bien plus violent que tu ne pourrais le penser d'écrire que tu es choquée de ça et que ces parents devraient aller en prison. Tu nous envoies en pleine face l'idée que notre existence est une sous-vie, qu'elle est régie par nos difficultés et que notre différence ne nous apporte rien de positif. Et ça on se le prend déjà tout le temps. C'est pour ça que qu'on ne propose quasiment que des aides qui nous normalisent et qu'on se fout complètement de si on a envie d'être normal ou pas. Parce que les gens nous perçoivent comme des personnes qui n'ont pas eu de chance, à qui il manque un morceau et qui, si elles avaient pu choisir, n'auraient jamais décider de naître telles qu'elles sont. Ce qui est extrêmement nocif pour l'estime de soi et qui aboutit à toute une partie des personnes handicapées qui se retirent socialement, ne se mettent pas en couple ou carrément se tuent parce qu'elles pensent qu'elles sont un poids pour les autres et qu'elles sont intrinsèquement nuisibles.

Il y a aussi toute une sphère relationnelle que tu ne sembles pas te représenter et c'est pour ça que je ne veux pas émettre d'opinion tranchée sur le cas de la surdité, parce que je sais en temps qu'autiste que c'est beaucoup plus compliqué et personnel que ce que les typiques et les valides s'imaginent. Si je devais avoir un enfant, probablement que tout le monde aurait cette idée que ce serait terrible si je transmettais mes gènes autistes, on me l'a déjà dit. On verrait ça comme un "risque" et jamais autrement. Mais c'est pas ça, c'est pas ça qu'on se dit. Ça en fait partie, mais c'est une question parmi les trois mille qu'on a dans la tête. Et justement, ces personnes qui n'ont été que brièvement citées, on ne les connaît pas du tout, on ne sait pas par quelles réflexions elles sont passées. Ce dont je suis sûr.e au moins, c'est qu'elles savent qu'être sourd.e ça ne se résume pas à ne pas entendre. Je doute que leur raisonnement s'arrête à "on est sourdes donc on veut un enfant sourd".

J'écris ça sans animosité mais je voudrais vraiment transmettre l'idée que c'est pas neutre d'écrire qu'à choisir il faut toujours privilégier l'enfant valide, que c'est pas un débat théorique mais véritablement un rapport au validisme et à l'identité des personnes concernées.
 
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Je répète : les parents ont volontairement imposé un handicap à leur enfant.

Non. Ca ne marche pas comme ça. Ils n'ont pas imposé un handicap à leur enfant, ils ont mis au monde (de façon volontaire) un enfant handicappé. La nuance paraît peut-être subtile, mais elle est importante : il n'existait pas une version "valide" du même enfant, cet enfant sourd n'aurait pas existé autrement (= entendant) si elles avaient choisi un autre donneur. Cet enfant existe, a une personnalité propre, qui est liée à sa surdité, et qui n'en fait pas un enfant qui sera intrinsèquement malheureux ou moins épanoui dans sa vie qu'un autre.
 
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Alors je voudrais préciser quelques trucs : je pars effectivement du principe qu'être sourd c'est moins bien qu'être entendant, ça me semble plutôt évident... Mais en aucun cas ça ne veut dire qu'un enfant entendant vaut mieux qu'un enfant sourd ! Ce n'est tout simplement pas la même chose, ce n'est pas une façon de dire que la personne vaut moins ou est un poids. Mais le fait d'être sourd, oui, clairement, c'est un handicap. Ca vous plairait de ne pas pouvoir entendre la voix des gens que vous aimez, de ne pas pouvoir écouter de musique, de ne pas pouvoir communiquer avec tout le monde ou encore de ne pas pouvoir entendre une voiture ou autre en cas de danger ?
J'ai une question simple pour vous : vous connaissez beaucoup de gens qui voudraient volontairement perdre l'ouïe ? Et inversement, vous voyez pas mal de personnes sourdes qui aimeraient bien entendre, non ? Je sais pas si vous avez vu cette vidéo d'un gamin qui entend pour la première fois grâce à la médecine mais sa réaction était juste la plus belle du monde...

Après je peux comprendre la question de l'identité des personnes sourdes, qui préféreraient qu'on ne stigmatise pas leur handicap et qui choisissent de l'assumer comme une part d'eux-mêmes. Mais personne ne les force à se soigner s'ils n'en ont pas envie, on ne va pas forcer quelqu'un à entendre s'il souhaite rester sourd (perso je reconnais que je trouve ça un peu absurde mais je ne suis pas dans cette situation donc je ne peux pas l'imaginer). Par contre en aucun cas on n'a le droit de faire ce choix (très difficile) à la place d'un enfant ! Pour moi s'il y a une possibilité d'éviter la maladie, ben on l'évite. On dirait que maintenant le simple fait de dire des évidences (comme le fait que la surdité est un handicap) c'est oppressif :hesite: bientôt on va dire aux médecins qui se donnent à fond pour soigner les enfants atteints de surdité qu'ils sont des sales oppresseurs qui nient leur identité et leur droit à être sourd ? :dunno: c'est absurde... Je trouve quand même qu'il y a une grosse différence entre dire que quelque chose est une maladie/un handicap et pourrir les gens qui en sont atteints. Je suis totalement OK pour intégrer les personnes handicapées autant que possible et les respecter, mais en aucun cas vous ne me ferez dire qu'être handicapé et valide c'est pareil et que ça ne pose aucun souci d'être handicapé. A choisir, tout le monde préfèrerait être en pleine possession de ses capacités...

Pour moi imposer un handicap à un enfant en le faisant exprès comme ça, genre en choisissant de le faire naître handicapé, c'est ultra problématique et ça s'apparente à une mutilation. Je dis pas ça pour stigmatiser les personnes sourdes mais faut être honnête 5 min, c'est toujours mieux de pouvoir profiter de ses cinq sens, et là on en priverait volontairement un enfant au nom du droit supérieur des parents ? :hesite: et le droit de l'enfant il est où ? Il est où son intérêt à lui/elle dans tout ça ? Vous pensez vraiment, sincèrement, qu'il ne vaut pas mieux être entendant ? Je parle même pas d'un point de vue social (genre le jugement des autres) mais juste pour l'enfant, pour sa vie quotidienne, pour tous les trucs qu'il pourra faire ou justement ne pas faire s'il est sourd. Pour moi un handicap reste un handicap quelle que soit la société dans laquelle on vit, là c'est pas un problème de société mais un problème physique avant tout. Après je dis pas qu'on ne peut pas vivre avec mais ce sera toujours par défaut.

D'ailleurs @Lumiciole je peux pas m'empêcher de relever un truc problématique dans ton message : " comme toutes celles qui se sont posées la question des enfants un jour, je me suis demandé.e ce que j'aimerais" puis " Se demander si je préfèrerais que mon enfant soit autiste ou pas" Mais là ce n'est pas de toi qu'il s'agit et ce n'est pas à toi de décider comment devra être ton enfant. On ne devrait pas choisir ces choses-là. Désolée mais on ne fait pas un enfant à la carte...

Pour l'avortement : ben c'est simple, être une fille n'est pas une maladie et ne pose aucun problème physique. S'il y a un souci c'est uniquement à cause de la connerie et du sexisme des gens, or ça peut changer. Etre sourd/handicapé, quelle que soit la société, ça reste une maladie invalidante. Par contre je ne dis pas qu'une vie d'handicapé ne vaut pas la peine d'être vécue, ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit. Je dis juste que c'est à la femme qui va porter l'enfant d'en décider, d'autant plus qu'il y a d'importants enjeux financiers ou autres, et qu'on a le droit d'avoir le choix. Ce n'est pas simple du tout d'élever un enfant handicapé, et ça n'a rien à voir avec une simple question de convenance personnelle. Vous comparez ce qui n'est pas comparable.
Et je ne pense pas qu'on devrait interdire aux enfants handicapés de naître ! Simplement qu'on doit avoir le choix de les faire naître ou non, parce que c'est très lourd à porter.
Mais franchement, me sortir que le handicap c'est juste une différence et que ça peut être positif... Ben c'est peut-être vrai pour l'autisme, qui est un cas très particulier, mais pour d'autres je suis pas du tout d'accord. Je vois pas ce que ça peut avoir de positif de pas pouvoir entendre. Désolée. Pour moi ça reste quelque chose que les médecins doivent aider à guérir, et ce ne sont pas les enfants qui ont recouvré l'ouïe qui vous diront le contraire.
Et puis en fait, le souci que je vois c'est que si on considère comme oppressif le fait de dire que quelque chose est un handicap et qu'on devrait essayer de le soigner, ben certes certaines personnes handicapées vont peut-être mieux s'accepter elles-mêmes, mais en aucun cas ça ne rendra service à celles qui rêveraient de pouvoir guérir ce handicap. Comme je l'ai dit, avec cette mentalité ça va devenir politiquement incorrect d'essayer de soigner la surdité. Génial.
Après on aura plus le droit non plus de dire que le cancer est une maladie et qu'on vit mieux sans, et pareil ça sera oppressif d'essayer de soigner ceux qui en sont atteints, parce qu'être malade ne fait pas de nous des personnes moins bien, et nous on a choisi de vivre comme ça... Bon je pousse le raisonnement à l'absurde mais vous voyez le souci.
 
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@Growing Entish Tu n'as pas tort en effet. Je distingue simplement l'avortement thérapeutique des autres formes d'avortement, parce que je considère que c'est un cas très particulier qui a à voir avec l'intérêt de l'enfant et de la famille, de manière définitive et parfois très importante ; par exemple si on a un enfant trisomique il va falloir mettre le paquet niveau ressources financières, temps, énergie et accompagnement... tout ça pour avoir le coeur brisé quand l'enfant mourra précocemment (parce que l'espérance de vie est pas ouf) et pour le voir être exclu socialement, peut-être ne jamais avoir de vie de couple, de travail... J'essaye pas de faire un portrait misérabiliste non plus parce que c'est pas toujours le cas mais faut pas oublier que certains handicaps peuvent apporter beaucoup de souffrance (pour l'enfant comme pour les parents).
Après c'est pas seulement mon opinion l'avortement thérapeutique, c'est un droit. Vous voudriez sérieusement remettre en cause les droits des femmes ? Non parce que je le revendique haut et fort, un enfant c'est si je veux quand je veux, et je considère que je n'aurais pas du tout les moyens et la disponibilité d'élever un enfant lourdement handicapé. Alors, vous voudriez me forcer à rester enceinte peut-être ? C'est ça votre solution ?
Encore une fois je pense qu'on n'a pas à faire d'enfant à la carte dans le sens choisir son sexe, son physique ou je ne sais quoi, mais là on ne parle pas de la même chose en cas de maladie/handicap et ça paraît logique de faire une exception pour ça, parce que tout n'est pas comparable.
 
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@just_in_case : j'ai aucun soucis avec l'avortement. J'ai un soucis avec le fait qu'on décale la limite légale de l'avortement spécifiquement pour avorter un enfant trisomique (donc, quand même, viable, mais différent). Je trouve que ça sous-entend très fortement que cet enfant-là est, d'une certaine façon, moins humain que celleux que tu peux avorter seulement pendant les 3 premiers mois de la grossesse, ou a moins de valeur à naître, parce qu'iel est trisomique. C'est un symptôme du validisme de notre société, oui.

Je trouve aussi qu'à partir du moment où tu décides de faire un gosse (et tu devrais pouvoir en décider, encore : je suis pour l'avortement, je parle de gens qui ont décidé de garder le bébé, qui en sont à plus de trois mois de grossesse, tout ça), tu t'engages pas sur 18 ans (ou, genre, 25, le temps que le gosse finisse ses études) : tu t'engages sur toute une vie. T'arrête pas d'être parent à partir du moment où ton enfant est adulte. Donc oui, si mon enfant est trisomique, j'organiserai ma vie pour pouvoir m'en occuper, même si ça change mon mode de vie ou mes projets. Tout comme si j'avais accouché d'un enfant valide qui était devenu tétraplégique ou qui avait eu un traumatisme cranien à 4 ans, ou 12, ou 26. Mes enfants, ma responsabilité.

Bien sûr c'est compliqué, surtout à cause de la façon dont fonctionne notre société, mais plutôt que de dire aux gens d'avorter les enfants "indésirables", bah, mettez plus de moyens sur les structures d'aides aux personnes handicappées, quoi.

Edit: A la limite, si la limite de l'avortement était décalée pour tout le monde, pas seulement les enfants trisomiques, je n'aurais pas de soucis à ce qu'on avorte à ce terme là tout foetus qu'on ne veut pas porter à terme, peu importe la raison. Ce que je déplore, c'est la différence de traitement, comme je l'ai dit dans mon premier paragraphe.
 

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