Je suis très attristée de lire les témoignages de Madz traversant des périodes très difficiles et tiens à vous réitérer tout mon soutient. Tous mes voeux d'encouragement et mes prières vous accompagnent, même si nous sommes si loin, même si nous n'avons pas toutes perdu de proches, nous partageons toute la même douleur et cette double peine, celle d'assister impuissantes, aux violences commises au nom d'une religion auxquelles certaines d'entres nous croient, c'est ce qui rend les choses encore plus terrible.
Je n'arrive pas à me confier comme je le voudrais, j'ai du mal à exprimer ma douleur telle que je la ressens.
Je suis aller bosser comme d'habitude, il faut bien que la vie continue, ça m'a fait bizarre de me préparer, d'enchaîner ma petite routine matinale superficielle tandis que d'autres sont anéantis.
Vous allez peut-être trouver ça lâche mais j'ai choisi de ne pas en parler avec mes élèves.
Je suis enseignante, c'était sans doute dans mon devoir, mais ce matin c'était au-dessus de mes forces. Je ne savais pas quoi dire, comment amorcer la discussion, comment apporter du raisonnement dans des faits inqualifiables, comment poser des mots sur l'indicible, l'horreur, la barbarie...
Leur montrer BBC news et leur dire de me raconter les événements en anglais, revivre en boucle le même scénario macabre, minutieusement organisé, les bombes, les fusillades, la tuerie dans le salle de concert, ces images effroyables de ces gens s'échappant de l'issue de secours du Bataclan, les cris, la peur... ?
Je n'ai juste pas pu. Bien sûr, si certains avaient manifesté une envie de parler, j'aurais tout de suite interrompu mon cours...
La minute de silence s'est faite dans la cour, sous un soleil lumineux, et un ciel bleu azur dégagé, il fait beau, la vie continue, mes lycéens continuent leur vie, les amoureux se bécotent, ils rient tous insouciants, ils ont la vie devant eux, ils n'ont pas envie d'être déjà affligés par la vie à 16, 17 ou 18 ans.
Bref, ma vie continue aussi, mécaniquement. Mais j'ai mal comme vous. J'avais 15 ans lorsque deux avions ont foncé dans les deux tours du WTC et à l'époque, je n'avais rien compris.
Aujourd'hui j'en ai 29, et j'en comprends pas plus.