Y’a un truc qui me frappe à chaque fois dans ces discussions, que ce soit ici ou quand quelqu’un IRL qui évoque vite fait pourquoi il veut pas d’enfant, c’est que le débat porte quasi toujours strictement sur la petite enfance. Alors que la parentalité, c’est une vie.
Je me demande dans quelle mesure l’expression « avoir des enfants » ne joue pas là-dessus, alors que pour la plus grande part de la vie nos « enfants » sont des adultes.
Perso je suis maman, ça n’a jamais été une envie viscérale mais plutôt un choix de couple à tête reposée. Je ne peux pas être 100% certaine mais je pense que j’aurais été heureuse aussi sans enfants, c’est un chemin que j’aurais pu tout à fait prendre, donc je comprends totalement les CF. Ce qui m’a fait pencher pour le choix de la maternité il y a 8 ans, et toujours aujourd’hui 3 enfants plus tard, c’est plutôt ma relation actuelle avec mes parents. La période où je portais des couches dont on parle tant, comme tout le monde je m’en rappelle même pas ; pourtant la relation avec mes parents est encore une des relations les plus centrales et intéressantes de ma vie (et pourtant pas toujours rose !). Je veux dire qu’à l’échelle de tout ce que représente la relation parents-descendants, l’absence de liberté, les nuits sans sommeil, les corvées linge-bouffe-couche, ça correspond à peu près aux 10 minutes de pub avant les 3h20 de l’Odyssée de l’espace au ciné, je trouve ça ouf de s’arrêter à ça, voire de ne parler QUE de ça pendant des pages et des pages de débats sur la question de l’intérêt d’avoir des descendants.
Pour mon expérience personnelle, je trouve effectivement la réalité de la petite enfance aussi reloue que je m’y attendais. Je suis très attachée à ma liberté, plutôt introvertie avec un besoin important de solitude, je n’aime pas trop la routine. Donc globalement, être maman de jeunes enfants c’est vraiment un challenge qui me pousse dans mes retranchements et qui parfois me fait même souffrir ponctuellement. Mais je le savais, et néanmoins le sentiment qui domine ça reste que je suis infiniment heureuse et reconnaissante de construire cette relation de toute une vie avec ces 3 humains là, je sais qu’on est au passage le plus pénible mais que ce qui nous attend est un voyage hallucinant jusqu’à ce que mort s’en suive. J’ai si hâte de guider des adolescents, d’avoir des débats avec les jeunes adultes qu’ils seront, de découvrir leurs univers professionnels, les relations et le monde qui se créera autour d’eux, j’ai hâte d’être une vieille dame qui recevra ses grands enfants à la maison pour les vacances (peut-être avec leurs propres enfants, et les aider parce que je saurai ce que c’est, d’avoir des petits !), d’être pour eux le filet de sécurité et le refuge sur lequel ils compteront toujours intérieurement même quand ils auront 30, 40, 50 ans…
Autant aujourd’hui (j’ai 37 ans), quand je compare ma vie et mon quotidien avec mes amis qui n’ont pas d’enfants, ou avec les CF qui exposent leur point de vue ici, je comprends très bien que ma place ne fait pas rêver et j’envie régulièrement ceux qui n’ont pas de petits marmots dans les pattes. Mais, je n’ai jamais osé le dire à ces amis, je me demande si dans 10, 20, 30 ans, quand nous aurons vieilli et que nos enfants seront de « grandes personnes », leur regard sera toujours aussi féroce et ironique sur notre rôle de parents.
Dans ma famille élargie, j’ai pas mal d’oncles et tantes (entre 50 et 80 ans disons) qui n’ont pas d’enfants, bah ça fait quand même pas la même chose que ceux qui en ont… et pourtant, à ce stade-là les parents et non-parents ont assez strictement le même quotidien, la même liberté, les mêmes loisirs, autant d’amis les uns que les autres. Mais clairement, je suis heureuse de savoir que je ferai partie de ceux qui, en plus de tout ça, auront de la jeunesse derrière eux, 3 têtes de la génération d’en dessous qui viendront manger le rôti le dimanche, m’engueuleront de m’etre fait avoir par des vendeurs de matelas au téléphone, me demanderont de visiter avec eux leur premier achat immobilier et m’appelleront pour que je vienne les aider à repeindre la cuisine, et qui des années plus tard viendront repeindre la mienne parce que je commencerai à etre vieille et fragile.
J’ai aussi hâte de savoir que, comme moi avec mes frères actuellement, ils auront un groupe Whatsapp pour parler de moi et de mon mec et prendre des décisions diverses et variées à notre sujet